"La crise financière et internationale, dont les relents ne sont pas encore totalement dissipés, n'a pas obstrué les orientations de la Tunisie en matière d'ouverture et de partenariat. Au contraire, elle les conforte et les consolide". Ces quelques phrases résument assez bien la philosophie du gouvernement tunisien, sous l'impulsion du Président Ben Ali. En procédant à l'ouverture, jeudi 3 juin 2010, de la 12ème édition du Forum de Carthage, un meeting international organisé par l'Agence de promotion des investissements extérieurs, le Premier ministre Mohamed Ghannouchi l'a franchement annoncé devant un parterre d'hommes d'affaires, de gouvernementaux et journalistes : la Tunisie ne remet jamais en cause ses orientations stratégiques. La libéralisation est une démarche irréversible nourrie à la sève d'une lecture minutieuse, avertie et pragmatique des mutations économiques et sociales tant nationales qu'internationales. L'irruption de la donne technologique dans la sphère économique internationale procure aux pays émergents de nouvelles possibilités de changer la fameuse « division internationale de travail », ce dont la Tunisie a besoin. Elle en est même parfaitement consciente puisque cette douzième édition du Forum de Carthage a été placée sous le thème «Investir dans le futur». Objectif : orienter les IDE en direction des activités innovantes et à haute valeur ajoutée. Un véritable changement de cap pour une Tunisie ambitionnant de devenir, d'ici quelques années, une plate-forme technologique et une place financière centrale dans le pourtour méditerranéen. Cette option a été clairement retenue, précise M. Ghannouchi, dans le programme présidentiel, désormais, feuille de route de l'action du gouvernement pour la période 2009-2014. Or, on le sait tous, les grands challenges technologiques ne peuvent pas être réalisés uniquement par les ambitions et les vux ardents mais par les actions concrètes et pragmatiques. Encore une fois, le Premier ministre tire les choses au clair. Quatre axes majeurs sous-tendent la stratégie du gouvernement pour faire de la Tunisie une plate-forme technologique : Il s'agit de mieux investir dans le capital humain en engageant un vaste programme d'amélioration de la qualité articulée autour d'une grande maîtrise de langues étrangères, de l'établissement de partenariat et d'alliance entre les universités tunisiennes et étrangères, européennes, notamment, du recours à la co-diplomation et à la certification des compétences par des organismes indépendants et du développement des filières scientifiques et technologiques. De même, l'accent doit être mis sur l'investissement dans les infrastructures technologiques en accélérant la réalisation des pôles technologiques, dédiés à l'agroalimentaire, la biotechnique médicale, la biotechnologie végétale, les TIC, les multimédias, la micro-électronique, la santé, le textile. Quelque 200.000m2 de bâtiments technologiques sont engagés pour être loués ou cédés à des groupes tunisiens ou étrangers opérant dans le cadre de l'off-shoring ou dans tout autre cadre. Dans les discours prononcés par les membres du gouvernement, quelques mots clefs reviennent souvent : capital humain, innovation, TIC, valeur ajouté, off-Shoring, libéralisation, ce qui témoigne, sans l'ombre d'un doute, la détermination du staff gouvernemental, chacun de son côté, à aller de l'avant dans cette optique. Devant les 1.300 participants, dont 498 venus de 34 pays avec un nombre record d'hommes d'affaires italiens (300), Mohamed Ghannouchi, Premier ministre, Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de la Coopération internationale, Hédi Djilani, président de l'UTICA, Afif Chelbi, ministre de l'Industrie et de la Technologie, Mohamed Naceur Ammar, ministre des Technologies de la communication n'ont pas rechigné sur les efforts pour présenter, aux différents partenaires de la Tunisie, les progrès réalisés par le site Tunisie en matière de technologies de l'information et de la communication (TIC), la dynamique que l'infrastructure de base connaît dans ce secteur, les différentes distinctions que la Tunisie a obtenues à la faveur de l'essor accompli dans le domaine des TIC, le développement des pôles technologiques vecteurs de progrès et, enfin, les efforts consentis en matière de promotion des ressources humaines en général et de compétences spécialisées dans les TIC. M. Jouini a souligné que ce forum, devenu une manifestation de référence dans le pourtour méditerranéen, se tient à un moment où le monde passe par l'une des crises économiques les plus graves et ce, en dépit des quelques signes de reprise. Toutefois, a-t-il ajouté, la Tunisie a continué, en dépit de cette conjoncture difficile, à rechercher des partenariats fructueux, à diversifier son tissu industriel et à consolider l'intégration de son économie dans son environnement international. Il a rappelé que la stratégie du gouvernement est ainsi axée sur le développement de l'économie à fort contenu technologique, la maîtrise des nouvelles technologies et la réalisation d'une croissance durable. Hédi Djilani, président de la centrale patronale, a affirmé, pour sa part, que face à la formation de nouveaux groupements régionaux et l'ouverture de nouveaux marchés, la Tunisie a adopté, sous l'impulsion du Chef de l'Etat, les différents mécanismes destinés à améliorer la compétitivité de son économie. M. Djilani, a fait remarquer que la compétitivité est désormais tributaire de la maîtrise des technologies avancées, rappelant, dans ce contexte l'investissement dans le savoir que la Tunisie n'a cessé de réaliser tout en mettant l'accent sur la volonté des hommes d'affaires des pays du Maghreb d'établir le marché maghrébin, ajoutant que "le souhait le plus cher est l'Euro-Afrique". Tout le monde l'a explicité. La réhabilitation de l'initiative, le renforcement de la compétitivité et l'amélioration du climat d'investissement, ont permis d'inscrire l'économie tunisienne sur un trend de croissance soutenue, de l'ordre de 5 % par an à prix constants et d'améliorer le pouvoir d'achat. Une parfaite illustration : le PNB par capital s'établit en terme de Parité de pouvoir d'achat (PPA) à 9000 dollars en 2009, un endettement extérieur qui ne dépasse pas les 40%, quarantième sur 133 pays en compétitivité globale, 69ème sur 183 pays en informatisation de l'administration, 60ème sur 192 pays en commerce extérieur "Désormais, nous devons avoir une croissance de plus en plus tirée par l'innovation. Cette croissance est nécessaire et revêt même un caractère contraignant étant donné le profil de la demande additionnelle d'emploi, désormais dominée par le diplômés du supérieur", déclare le Premier ministre. Derrière ce dessein tutoyant les nuages, figure une stratégie proactive et perspicace. Le Premier ministre a fait savoir que le processus d'intégration de l'économie tunisienne dans l'économie mondiale, en général, l'espace euroméditerranéen en particulier, sera amplifié. Au top des priorités, pleine attention sera portée sur la finalisation de négociations portant sur la libéralisation des services avec l'Union européenne et l'accession au statut de partenaire avancé de l'Union européenne. Ainsi, la maîtrise de la donne technologique est assurément le premier pas d'un parcours de mille ambitions plus que légitime. Cette 12ème édition du forum de Carthage a permis aux hôtes venus de 34 pays de côtoyer une nouvelle Tunisie, plus ambitieuse, plus déterminée, et surtout plus sûre d'elle-même, animée de convictions qu'elle s'est forgée suite à une lecture progressiste de la nouvelle donne internationale. Walid Ahmed Ferchichi