Nos politiciens sont des amateurs, quel que soit le bord auquel ils appartiennent. C'est un constat douloureux : se rendre compte que notre classe politique est coupée de la Tunisie. Non seulement aucun programme, même fantaisiste, n'a vu le jour jusque là mais en plus, le côté social et économique de l'avenir du pays est complètement mis de côté, par incompétence ou par négligence. Voici quelques exemples de vies de personnes qui s'en foutent de leur dialogue dit national. Il existe dans notre beau pays des jeunes filles, des gamines, issues de milieux défavorisés qui sont obligées d'arrêter l'école car leurs familles sont incapables de subvenir à leurs besoins. A partir de là, le sort de ces jeunes filles est scellé par les difficultés financières de sa famille. Elle doit aller travailler. Au mieux, la jeune fille trouvera un poste dans une usine où elle sera allégrement exploitée pour un salaire misérable. Sinon, elle ira à Tunis pour faire la bonne. Elle passera ses journées à nettoyer et récurer chez l'une de ses femmes botoxées, liftées, reliftées et adeptes du fameux « Rendez moi ma Tunisie ». Sauf que sa Tunisie n'est pas celle de cette jeune fille. Si la jeune fille a le malheur d'être un tant soit peu attirante, elle pourra se faire violer et servir d'entraîinement au fils ou de défouloir au mari. Je n'invente rien, ce sont des histoires qui existent. Que proposent les politiciens pour ce type de cas ? Que propose-t-on contre le travail des mineurs, puisque l'on parle de fillettes de 14 ans ? Mystère et boule de gomme. Si l'on parlait de politique et de dialogue national à l'une de ces jeunes filles que dirait-elle ? Des personnes sont aujourd'hui en prison. Rien de plus normal dans une société qui applique la loi. Ce qui est moins normal ce sont les conditions de détention dans la plupart de nos prisons. Entre insalubrité et promiscuité, les détenus subissent un préjudice supplémentaire en plus de la privation de liberté. Ces conditions médiocres donnent naissance à des problèmes de santé, souvent occultés dans nos prisons. En parlant de prisons, la population carcérale explose en Tunisie sans que des mesures ne soient prises ni en amont par l'adoption de peines alternatives, ni en aval par la construction de nouvelles prisons. Cette surpopulation carcérale oblige les directeurs de prison à mettre tous les détenus dans les mêmes cellules. Par conséquent, la personne emprisonnée pour un chèque en bois peut côtoyer le violeur et le tueur. C'est ce qui fait de nos prisons actuelles de vraies académies du crime le coupable d'un larcin mineur en sort en étant devenu un criminel prêt à récidiver. D'un autre côté, des personnes dont l'innocence a été prouvée croupissent toujours en prison. Ne dit-on pas qu'il vaut mieux qu'un coupable soit en liberté plutôt qu'un innocent soit en prison ? Cette maxime ne semble pas s'appliquer en Tunisie. Qu'est ce qui proposé par les politiciens en matière de politique carcérale ? Comment éviter qu'un gamin qui entre en prison pace qu'il a fumé un joint en ressorte avec l'expérience d'un criminel en puissance ? Que faut-il faire pour qu'aucun innocent ne soit en prison ? Encore une fois, aucun homme politique ne semble vouloir s'atteler à la tâche, préférant la lumière des plateaux télé et les visites de complaisance dans les régions, accompagnés de caméras évidemment. Si on parlait de tergiversations politiques et de dialogue national à Maher Mannaï par exemple, toujours en prison alors que son innocence est avérée et prouvée, que dirait-il ? Quelques 80.000 étudiants obtiennent chaque année leur diplôme de diverses universités et facultés tunisiennes. Ces milliers de néo-chômeurs, gens de petite condition sont vomis chaque année par leurs établissements de formation pour se diviser en catégories. Les plus chanceux poursuivront leurs études à l'étranger, quelques uns parviendront à trouver du travail dans les sociétés tunisiennes quant aux autres, ce sera le parcours du combattant fait de précarité et de longues périodes de chômage. Le système universitaire et éducatif tunisien produit un haut pourcentage de diplômés destinés à devenir des cadres ce qui est une totale aberration vu les besoins du marché du travail en Tunisie. Conséquence, la journée d'un apprenti maçon aujourd'hui est payée 50 dinars alors que celle d'un cadre moyen tourne autour des 35 dinars. La rareté expliquant ce phénomène. Du coup, on se retrouve avec des diplômés chômeurs dont le nombre augmente chaque année alors que le nombre de personnes habilitées aux travaux manuels diminue. Ceci crée de l'instabilité sociale et exerce une pression croissante sur le pouvoir d'achat du tunisien. A-t-on entendu parler de la part des hommes politiques d'une réelle proposition de réforme du système éducatif tunisien qui ne souffre pas que de ce seul problème ? Pas dans mon souvenir… Que penserait un diplômé chômeur dont la famille a fait des sacrifices pour ses études et qui se retrouve à devoir faire n'importe quel métier pour subvenir à ses besoins et, souvent, à ceux de sa famille ? Que dirait-il si on lui parle de dialogue national et de « consensus élargi dans le but de réaliser les objectifs de la révolution » ? Il existe des dizaines de sujets brûlants qi touchent de manière directe le citoyen tunisien qui sont royalement ignorés par notre classe politique. La réforme du système de santé tunisien, le dossier de la corruption dans le pays, la prostitution, la diminution du pouvoir d'achat, l'avenir des caisses de sécurité sociale, les retraites…sont autant de problématiques manifestement trop compliquées pour notre classe politique. Le fait que nos politiciens soient en rupture totale avec les réalités du pays n'est pas un scoop. Ils l'ont démontré à plusieurs reprises. Cependant, le plus dommageable dans leurs actes est qu'ils ont réussi à dégouter le peuple de sa propre révolution. Les voix qui s'élèvent pour regretter le temps de la dictature sont de plus en plus nombreuses et ne se cachent plus pour le dire. On peut comprendre l'immaturité et l'adolescence politique de nos élites, mais de là à devenir des autistes obnubilés par des luttes de pouvoir stériles, il y a de la distance, et notre patience a des limites…