Le hasard fait bien les choses, dit le dicton. Le hasard a fait en sorte que la publication des Perspectives économiques mondiales par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) à l'occasion de la tenue de leurs assemblées générales annuelles, dévoilant ses prévisions économiques de l'année prochaine, coïncide avec la publication, chez nous, du Budget économique et du projet de loi de finances et de budget. Bien évidemment, cette année n'échappe pas à la règle.
Pour 2018, le gouvernement s'est fixé un objectif de croissance économique de 3%. Selon les dernières actualisations, le taux de croissance du PIB serait de 2,2% contre 2,5% initialement fixé. Pour une fois, les prévisions du gouvernement de Youssef Chahed deviennent crédibles. L'écart entre l'objectif et le résultat est ténu, rendant compte des impondérables de conjoncture et, probablement aussi, du retard dans l'agenda de mise en œuvre des réformes structurelles.
C'est dans le même sens qu'abonde le FMI dans ses perspectives économiques pour l'année 2018. Selon l'institution de Bretton Woods, la Tunisie devrait enregistrer un taux de croissance de 3% en 2018 contre 2,3% en 2017. Tiens, le FMI affiche un peu plus d'optimiste que le gouvernement. Il est de bon ton de le souligner. D'autant que le gouvernement fait également preuve de réalisme en fixant le taux de croissance à 3% en 2018. Tout comme le FMI. Certains esprits pourront toujours suggérer un « suivisme », rappelant « le diktat du FMI ». Ils seraient surpris de constater que sur bien d'autres indicateurs, les prévisions du Fonds sont plus optimistes que ceux établis par le gouvernement.
Similitudes et différences Il en est ainsi des prévisions d'investissement en 2018. Le budget économique estime que l'investissement global atteindrait 21,4 milliards de dinars l'année prochaine contre 18,9 milliards en 2017, soit une augmentation de 13%. En revanche, le FMI prévoit que l'investissement global serait de l'ordre de 25,4 milliards de dinars en 2018 et 21,9 milliards en 2017. Il en est de même de l'inflation avec une prévision de 5,8% en 2018 alors que le FMI ne prévoit que 4,4%. Et ce n'est pas tout puisque cela concerne également nos performances de commerce extérieur. Le FMI estime qu'à prix constants, l'augmentation des exportations de biens et services dépasserait celle des importations en 2017 alors que les autorités tunisiennes estiment l'inverse avec respectivement 4,5% et 4,9%. Dans ses prévisions 2018, le FMI table des exportations tunisiennes de biens et services en hausse de 9,2% alors que le gouvernement n'escompte qu'une évolution de 5,3%. On pourrait étendre la liste.
Cela n'empêche pas de préciser que le gouvernement tunisien est plus optimiste que le FMI sur d'autres prévisions. Par exemple, lorsqu'il s'estime être capable de limiter le déficit des paiements courants à 8,2% en 2018 contre 9% en 2017 alors que le Fonds estime cet objectif à seulement 8,4% l'année prochaine. Relativement, l'écart est faible. Mais en volume, cela représente des centaines de millions de dinars. En serait-il de même de l'endettement et du déficit budgétaire? Le FMI estime que le taux d'endettement de la Tunisie atteindrait 72,2% en 2018 et que le déficit budgétaire serait de l'ordre de 5,5 milliards de dinars.
Sans préjuger des données budgétaires du gouvernement, il semble bien que les prévisions du gouvernement s'inscrivent dans ce profil. Selon des données préliminaires du budget de l'Etat 2018, l'encours de la dette augmenterait d'environ 2,5 milliards de dinars en 2018. Quant au déficit budgétaire, il serait de l'ordre de 5,3 milliards de dinars en 2018. Alors, qui serait le plus réaliste ?