Le chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi a déclaré, samedi 28 octobre 2017, qu'il craignait que les élections municipales n'aient pas lieu dans les temps : « Ce sera un signal négatif pour la démocratie et on craint qu'il y ait des événements qui justifieraient ce report ». Une déclaration faite en marge d'un petit-déjeuner organisé, ce samedi, avec des directeurs de journaux et des rédacteurs en chef des principaux journaux de la place et en présence de quelques dirigeants d'Ennahdha. Rached Ghannouchi voulait cette rencontre pour détendre un peu l'atmosphère entre les médias et le mouvement. Il dit qu'il n'était pas du tout satisfait de l'image que renvoie Ennahdha auprès de l'opinion publique, que le parti ne s'adressait pas suffisamment aux Tunisiens , que sa communication était faible et que son message n'était pas correctement transmis aux gens. « Nous voulons nous rapprocher davantage des médias et de l'opinion publique. Nous pouvons ne pas nous mettre d'accord, mais au moins nous aurions instauré le dialogue ». Il faudra signaler que la majorité des médias présents sont connus pour leur opposition à l'égard du parti islamiste.
Le leader d'Ennahdha a été interrogé sur plusieurs points, notamment, le budget de l'Etat, ses rapports avec Nidaa Tounes et le président de la République, ses rapports avec les figures de l'ancien régime, pourquoi il a rencontré Abdallah Kallel. Il a également été interrogé sur ce qu'il pense de l'UGGT, de l'IVD et du gouvernement actuel avec dans ses rangs plusieurs ministres de l'ancien régime. Concernant ses rapports avec Béji Caïd Essebsi, il dit qu'ils sont excellents, assurant que le président de la République a toujours la porte ouverte et que chaque fois qu'il a besoin de lui, il le lui demande et lui parle en face. Et d'ajouter qu'il n'a pas besoin de dire ce qu'il pense du chef de l'Etat à travers les médias. Quant à l'UGTT, il a indiqué que l'organisation syndicale fait beaucoup de sacrifice pour le pays par patriotisme.
Il a par ailleurs fait remarquer, en ce qui concerne le paysage politique, qu'il y a certes 209 partis mais pas du tout de projets de société concrets. Pour ce qui est du consensus, Rached Ghannouchi considère que c'est ce qu'il y a de mieux pour le pays : « Dans les grandes démocraties, il existe la démocratie de la majorité, mais ce système n'est pas bon pour la Tunisie, d'où la nécessité du consensus, autrement c'est l'échec ». Il cite ainsi l'exemple égyptien où ce système a mené le pays dans une impasse.
Evoquant l'IVD, le chef d'Ennahdha a estimé que cette instance n'a pas réussi sa mission et a regretté les différends qui y existent actuellement. « Le rôle de l'IVD est historique. C'est une instance constitutionnelle, donc je regrette qu'elle n'a rien réalisé de ce qui lui a été demandé de faire ».
Pour ce qui est des figures de l'ancien régime, notamment les actuels ministres, Rached Ghannouchi a précisé que la Tunisie doit profiter de toutes ses compétences, déclarant : « Cette position est claire depuis des années avec le refus de la loi sur l'exclusion et celle de l'immunisation de la révolution ». Il dit qu'il a été contacté par les filles de Zine El Abidine Ben Ali et de Abdallah Kallel pour une intervention. Il a fait empêcher la première de quitter son domicile, expliquant qu'il faut préserver la dignité humaine. En ce qui concerne la deuxième, Ghannouchi a indiqué qu'il est intervenu pour qu'elle soit transférée d'une institution hospitalière de Bizerte vers Tunis pour qu'elle puisse se rapprocher de son père. Sachant que Abdallah Kallel est l'un des ennemis jurés des islamistes puisque les tortures ont eu lieu sous son mandat.
Le leader islamiste a en outre cité les chiffres de Sigma Conseil pour démontrer que la popularité d'Ennahdha est inchangée depuis 2014 et que les principaux taux dans les sondages sont pratiquement identiques. « Tous les nouveaux partis, dont Machrouû, ne pèsent absolument rien dans le paysage et ne paraissent même pas dans les sondages ».