C'est en ce lundi 14 janvier 2019, que la Tunisie fête le 8ème anniversaire de la révolution tunisienne. Un évènement qui a chamboulé, non seulement, le paysage politique, social et économique du pays, mais aussi tout le monde, en étant la première étincelle du printemps arabe. Il y a 8 ans, jour pour jour, la Tunisie s'est réveillée sur un évènement historique, la chute du régime de l'ancien président Ben Ali, après quelques semaines de protestations et de mouvements sociaux enflammés. L'étincelle est partie avec le suicide du vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, qui s'est immolé par le feu à Sidi Bouzid. Ainsi, le 14 janvier 2011 était le coup d'envoi pour une nouvelle ère pour la Tunisie. Le démarrage du processus de la transition démocratique a été entamé avec des acquis certes, mais non sans embuches. Les Tunisiens ont gagné en matière de liberté d'expression et liberté de presse, en contrepartie d'une dégradation considérable de la situation socioéconomique, sans parler de l'effervescence continue de la scène politique. Cela n'a pas empêché, les citoyens de sortir dans les rues pour fêter ce 14 janvier, et c'est le mouvement islamiste d'Ennahdha qui a pris possession de l'avenue emblématique de la révolution. Plaçant sa scène au milieu de l'avenue Habib Bourguiba, les sympathisants du mouvement ont hissé leurs drapeaux pour fêter cette révolution qui leur a permis de revenir en force au-devant de la scène politique et d'être le premier parti au pouvoir. Et en avançant de quelques mètres, c'est Ettahrir qu'on croise. Munis de leurs drapeaux et leurs hauts parleurs prônant la Chariâa et le califat, les sympathisants de ce parti extrémiste étaient là pour appeler à la chute de régime en place. Un régime sans lequel, ils n'auraient jamais vu le jour, ni pu exercer la moindre action politique.
Toujours est-il, le plus important venait de quelques ruelles de l'avenue Habib Bourguiba. Exactement, depuis la place Mohamed Ali où se tenait un grand rassemblement syndical, présidé par le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi. Ce rassemblement était le dernier d'une série de réunions programmées par la centrale syndicale en guise de préparatifs pour la grève générale prévue le 17 janvier 2019. Cette grève de la fonction publique et du secteur public a été décrétée à la suite du blocage des négociations avec le gouvernement autour des augmentations de salaires dans la fonction publique. « Huit ans après, on est gouverné avec le même modèle de développement dicté par les milieux qui consacrent l'injustice, les disparités régionales, l'absence de protection et subtilisent la dignité », explique M. Taboubi. Avant d'ajouter : « La situation est la même. Pire, elle s'est détériorée davantage! Les disparités demeurent, avec plus de pauvreté et d'injustice, plus de chômage, de marginalisation et d'exclusion. Le pouvoir des barons de la contrebande et de l'économie parallèle a augmenté, allant jusqu'à la dépendance du citoyen et à l'attaque du prestige de l'Etat et surtout de l'Etat de droit. Donc, davantage de corruption et de pillage méthodique », indique le secrétaire général de la centrale syndicale dans un discours enflammé, rappelant que l'UGTT avait essayé par tous les moyens d'éviter la grève, prenant en compte les conditions difficiles que traverse le pays. « Mais, la position du gouvernement qui suit les directives du Fonds monétaire international et son acceptation injustifiée et inacceptable des conditions injustes et non populaires, ne nous a laissé d'autre choix que de recourir à la grève pour la deuxième fois en un mois pour défendre nos droits légitimes et inscrits dans des accords et PV », renchérit-il.
Ainsi, la centrale syndicale semble déterminée à mettre en exécution la grève générale, la deuxième dans l'Histoire de la Tunisie après celle du 26 janvier 1978. En effet, l'UGTT estime que ses revendications constituent une rectification du pouvoir d'achat du fonctionnaire qui s'est dégradé à cause de la hausse sans précédent du taux d'inflation. D'ailleurs, les modalités de cette grève ont été même annoncées, aujourd'hui même. Sauf qu'une réunion entre le chef du gouvernement Youssef Chahed et le secrétaire général de l'UGTT a été annoncée pour ce soir vers 20h. M. Taboubi s'est dit optimiste quant à l'issue de cette rencontre bien que plusieurs observateurs ont estimé qu'elle n'aboutira à rien dans la mesure où l'UGTT est attachée à ses revendications, d'une part et que d'autres part, il est presque impossible, pour le gouvernement d'y répondre, vu les conditions et la situation financière et économique du pays.
En tout état de cause, il est bien triste pour la Tunisie de fêter sa révolution en décrétant la grève générale. D'ailleurs, le président de la République avait mis en garde contre les répercussions de cette grève rappelant les faits observés en 1978. Cela dit, pour éviter la grève générale, le gouvernement devrait répondre aux revendications de l'UGTT, au prix de l'approfondissent de la crise des finances publiques. Un cercle vicieux, dont seul le citoyen en paiera le prix.