La femme tunisienne a toujours été une pionnière en matière de statut social et d'égalité des droits avec l'homme. La célébration de la fête de la femme, dimanche 12 août, par la section de Nabeul du parti Al Jomhouri coïncide avec cette période de morosité où des acquis arrachés de haute lutte sont menacés. Mais au-delà de ce symbole, il s'agit d'un message adressé à tous ceux qui doutent encore aussi bien de la volonté de la femme tunisienne que de ses capacités à affronter tous les défis actuels et à venir, a précisé Hichem Belhadj Hmida coordinateur du parti Al Jomhouri à Nabeul devant une assistance nombreuse de femmes venues célébrer leur fête au Résidence Imène à Nabeul : « Cette journée de la femme aura une tonalité particulièrement militante. Il s'agit de dénoncer l'adoption d'un article de la future Constitution consacrant la « complémentarité » de la femme avec l'homme et non l'égalité entre les sexes. Nous sommes vraiment surpris par la teneur de cet article 28 que nous considérons comme étant une insulte à la femme tunisienne ». Après une demi heure de musique et de chant avec la troupe Olfa Baouab, l'invitée du parti Al Jomhouri, Emna Mnif, Présidente de l'Association Kolna Tounes a évoqué la situation difficile que vit le pays au moment où nous célébrons cette fête de la femme : « Les sit-in, les grèves, les mouvements sociaux à Sidi Bou Zid, Metlaoui, Mdhila , les coupures d'eau et d'électricité ont provoqué un grand désordre social, mais ont eu également beaucoup d'impacts économiques qui vont laisser leurs traces pour des années dans l'inconscient collectif des Tunisiens. Les acquis de la femme sont aussi menacés. Il en est de même du Code du statut personnel promulgué le 13 août 1956, soit quelques mois après l'indépendance qui consacre un processus de modernisation en gestation depuis le milieu du XIXe siècle. De 1868 à 1930, des penseurs tels que Khaïreddine Pacha, Cheikh Mohamed Snoussi, Abdelaziz Thaalbi et Tahar Haddad ont défendu la cause de la femme. C'est un acquis historique auquel nul n'a le droit de toucher. Ce code avait tout de l'acte précurseur. C'était même, quand on y songe, un acte inouï à l'époque. Et il reste, un demi-siècle après, d'une modernité saisissante. Il était déjà hardi, en 1956, de proclamer l'égalité des sexes. Reconnaître le principe était - dans toute l'acception du terme - révolutionnaire. Le consacrer dans la loi et se donner les moyens de lui donner corps, de le concrétiser relevait quasiment de l'exploit. Ce statut personnel de la femme tunisienne est unique dans le monde arabe. Mais, nous avons besoin d'acquis supplémentaires et davantage de droits qui les protègent. Là, nous devrons reconnaitre au Code du Statut Personnel une valeur constitutionnelle, afin que, quelle que soit la mouvance politique au pouvoir dans l'avenir, celle-ci ne puisse plus méconnaitre les droits de la femme qui seraient élevés au statut d'acquis. Il faut nous prémunir contre tout retour en arrière et agir ensemble pour préserver les acquis de la femme et faire évoluer ses droits pour une égalité effective et une citoyenneté entière ». L'Assemblée nationale constituante est en train de tracer les contours d'une nouvelle société. La Présidente de Kolna Tounes appelle à défendre une société basée sur les valeurs de la citoyenneté où tous les citoyens sont égaux dans les droits et les devoirs : « Nous militons pour bâtir la deuxième République. Pour moi, ça a toujours été plus de fierté de femme qui retrouve dans ce code le respect des droits pas seulement de la femme, mais au-delà. C'est le respect de la personne humaine. C'est la reconnaissance de la femme tunisienne en tant que citoyenne. La préoccupation majeure, aujourd'hui, est de ne pas toucher à ce statut qui a fait d'elle la femme la plus libre au monde arabe. Nous devrons être vigilants et mobilisés contre toute atteinte aux acquis de la femme. La Tunisie doit plus que jamais se battre pour défendre cet acquis fondamental à l'heure où certains sont en train de propager un message réactionnaire et rétrograde. Il faut tenir bon et donne l'exemple car cette révolution s'est faite par des citoyens qui aiment la vie et qui voudront mourir pour défendre ses acquis. A l'heure où l'on s'interroge et où l'on s'insurge face aux régressions des droits des femmes dans nombre de pays, c'est un message d'espoir qu'adresse la Tunisie citoyenne et là je vous invite ce soir à venir nombreux manifester devant le statut d'Ibn Khaldoun et défendre la liberté de la femme et ses acquis ».