Le Bureau de l'ASECTU, Association des Economistes Tunisiens, rappelle que la révolution tunisienne a commencé par un soulèvement populaire pacifique porté par l'aspiration à la dignité, à la justice sociale et à la liberté et par le rejet de la corruption et du népotisme. C'était un soulèvement populaire sans idéologie. Les facteurs économiques à savoir le chômage, particulièrement celui des jeunes diplômés ; les disparités régionales, l'accroissement de la pauvreté et de la marginalisation notamment dans les régions intérieures et les quartiers populaires des grandes villes ainsi que la corruption sont à l'origine de ce soulèvement. Deux ans après la Révolution, les Tunisiens, particulièrement ceux de l'intérieur, affirment ne pas avoir connu une amélioration tangible de leurs conditions économiques et sociales: le chômage a augmenté sensiblement par rapport à son niveau d'avant la révolution, en particulier chez les jeunes des régions déshéritées ; le coût de la vie, surtout les prix des produits de consommation de base, s'est envolé ; l'insécurité et la violence, phénomènes étrangers à la société tunisienne, se sont répandues et, enfin, les services publics sont en nette détérioration en raison d'un ralentissement général de la plupart des services de l'administration centrale et locale. Plus préoccupant encore, les deux principaux moteurs de l'économie, à savoir l'investissement privé et les exportations, sont en recul prononcé avec une économie informelle, en marge de toute régulation, en forte progression, à l'ombre d'un Etaten perte d'autorité et de prestige. La notation de la Tunisie a été dégradée plus de trois fois en mois de 14 mois par les principales agences internationales spécialisées, ternissant l'image de notre pays en tant que destination d'investissement et rendant sensiblement plus difficiles et plus coûteux nos recours au marché financier international. Les citoyens sont aujourd'hui inquiets en raison de l'impasse dans laquelle se trouve le pays. Ils comprennent mal pourquoi le processus de transition est en panne. L'absence d'engagement des responsables au pouvoir (y compris l'ANC) sur une feuille de route et un calendrier précis, le manque de sécurité et de stabilité politique, l'émergence dans le paysage tunisien de la violence politique ont épuisé la confiance des citoyens dans les institutions de l'Etat et dans leurs gouvernants et ont jeté le doute sur l'issue du processus de transition et l'éventualité d'aboutissement aux prochaines élections. En plus de leurs préoccupations quotidiennes pour faire face à ces questions économiques non résolues, les Tunisiens s'inquiètent des débats souvent houleux, passionnés, mal informés qui animent aussi bien l'Assemblée Nationale Constituante que les médias. Ce climat de tension, d'insécurité, de violence et d'impunité, ainsi que l'absence de feuille de route mettant fin à toutes les spéculations sur le processus de transition et sur les intentions des responsables au pouvoir, ne sont pas de nature à rassurer la population et les acteurs économiques et à redonner confiance aux investisseurs nationaux et étrangers et aux pays qui sont nos partenaires. La situation économique et sociale et celle des finances publiques sont réellement dégradées. La classe politique en général, et le gouvernement en particulier, doivent comprendre que cette situation préoccupante est le fait de la détérioration de la situation politique et sécuritaire, et de la perception de l'absence d'Etat de droit. Pour rassurer les acteurs et les partenaires économiques, relancer l'investissement privé et la croissance économique et créer des emplois, la période actuelle exige un engagement clair et ferme de la classe politique sur la mise en œuvre d'une feuille de route dont l'élaboration se fera d'une façon consensuelle entre toutes les parties prenantes et sans exclusion aucune.Elle exige un gouvernement de compétences avérées dans la gestion des affaires publiques et ayant une mission précise comprenant, en priorité, le rétablissement de l'ordre, de la sécurité et de l'Etat de droit, la gestion des affaires courantes en accordant une attention particulière aux dossiers économiques et sociaux. C'est de cette manière que la confiance peut être rétablie, car c'est en donnant des signaux forts aux citoyens et aux investisseurs, en cultivant l'espoir des jeunes, que l'on pourra créer les conditions du redémarrage de notre économie et restaurer nos équilibres financiers externes mis à mal. D'après communiqué