Le secteur du textile et de l'habillement tunisien est en crise. Nul ne peut le nier et des preuves concrètes sont là pour le confirmer, dont la plus évidente est la suppression depuis 2011 de plus de 40 mille emplois et la disparition pure et simple de quelque 400 entreprises y compris de grandes marques de prêt-à-porter, naguère bien et durablement installées dans le pays, et qui ont préféré délocaliser vers des pays moins « perturbés ». Les professionnels du secteur, fort affectés par le climat ambiant et le contexte très délétère, font savoir n'ont de cesse de déclarer leur inquiétude et d'exposer leurs difficultés grandissantes à maintenir la viabilité de leur activité, de faire et de partager le constat de la dégradation critique de leur compétitivité. Une situation qui ne semble pas, en fait, émouvoir les pouvoirs publics au grand dam des professionnels. Pire, pour corser la situation, un accord salarial centralisé est signé, en mars dernier, entre les centrales ouvrière et patronale instituant une augmentation de 6% pour 2017, mais rétroactive à 2016. « S'il venait à être appliqué, cet accord ferait peser sur les entreprises textiles un surcroît de charges estimées à 12,35%, alors même que la masse salariale représente déjà 70 à 75% des coûts de production du secteur. » dénoncent à l'envi les industriels. Mais, le principal grief formulé par les opérateurs du secteur demeure « leur marginalisation, leur mise à l'écart des décisions impliquant directement le secteur ». Ils estiment qu'ils bénéficient d'une faible représentativité et d'une écoute distraite et insouciante de leurs difficultés. Ils incriminent à cet égard une fédération Nationale du Textile et de l'Habillement (FENATEX) dont la « passivité voire la docilité» sont dommageables au secteur et qui « encouragent » les autorités à « prendre leur liberté vis-à-vis du secteur, de ses opérateurs, de ses travailleurs. » Leur réaction est à la mesure de la profonde amertume et déception ressenties : un rejet de l'accord salarial et surtout une décision spectaculaire de retrait de l'UTICA, désavouant l'unilatéralisme de la centrale patronale et le laxisme de la FENATEX. Les professionnels du textile et de l'habillement en Tunisie décident de « prendre leur destin en main » en fondant la Fédération Tunisienne du Textile et de l'Habillement (FTTH). Ses fondateurs lui assignent un objectif à court terme : celui de revenir à la table des négociations et rediscuter l'accord du 10 mars 2017, relatif aux augmentations salariales. Mais, décidée à rompre avec la politique et la stratégie de la FENATEX, la nouvelle fédération entend faire valoir ses droits et entendre sa voix dans le but de défendre les intérêts du secteur et ce faisant de créer des entreprises plus fortes à l'échelle régionale et nationale. Cette fédération se veut flexible, proche des industriels, active pour leur intérêt mais également et essentiellement se poser tel un partenaire incontournable, responsable et soucieux de la pérennité des emplois existants, veillant à en créer de nouveaux. La FTTH veillera à rétablir la confiance des marchés cibles pour pérenniser les débouchés et en prospecter de nouveaux. La nouvelle Fédération veut incarner une instance qui monte de la base vers un Conseil National du textile éminemment représentatif de la structure du textile et de l'habillement.