Chaude…chaude était l'ambiance, samedi dernier, au Théâtre du Palace de Montmartre où se produisait Lotfi Ebdelli dans le cadre de la soirée de clôture du festival du rire tunisien à Paris. Malgré le froid de canard qui régnait ce soir-là sur la capitale française, l'ambiance était donc chaude, grâce à la réputation de l'artiste au parcours atypique, qui ne laisse personne indifférent, grâce à son audace et ses positions. Devant une salle qui affichait presque complet, c'est l'artiste algérien Baâziz, qui a entamé la soirée pour rendre à sa manière un hommage émouvant à la révolution tunisienne, avant de céder la place sur scène au jeune Yassine Ben Abdallah. L'imitateur officiel de ZABA a présenté, avec beaucoup d'humour teinté d'une ironie mordante, les sentiments du président déchu à l'encontre de l'artiste Lotfi Ebdelli, qui n'a pas eu froid aux yeux de le traiter de pot de yaourt périmé et de demander son départ, alors qu'il était encore aux commandes du pays ! Cette introduction intelligente n'a fait qu'enflammer encore plus un public conquis d'avance, et impatient de découvrir la nouvelle version du one man show « Made In Tunisia » présentée pour la première fois en public. Vêtu d'un costume noir et d'une chemise blanche, l'acteur fait son entrée sur scène en dansant d'une façon remarquable, sous un faisceau de lumières et sur une musique rythmée. La scène est nue, ni décor ni accessoires. La mise en scène de Chedly Arfaoui, basée uniquement sur la lumière, la musique et la danse, a paru très sobre. A travers un discours direct et très franc, ainsi qu'une galerie de nouveaux personnages divers, Lotfi a consacré la première partie de son one man show à la révolution tunisienne et ses répercussions sur notre quotidien. Passant avec aisance d'un personnage à l'autre, Lotfi a analysé, avec un humour hilarant, le comportement très particulier des Tunisiens face à la révolution et à la démocratie. Il a exprimé, à sa manière, leur fierté des acquis et leur angoisse de l'avenir. Jonglant avec réussite (ce n'était pas évident) entre cette première partie d'une quarantaine de minutes, présentée pour la première fois en public et une seconde partie légèrement modifiée, l'artiste a évoqué à sa manière sa génération ballottée entre tradition et modernité, authenticité et aliénation, profitant au passage pour fustiger les tabous, les conditions économiques précaires et les disparités sociales. Très attentif, le public présent a savouré durant une heure et quarante minutes, la nouvelle version de cet one man show, qui s'est avéré à la fois dramatique, ludique et esthétique, mêlant le verbe et la gestuelle, l'humour, la danse et la musique, le rythme et les lumières. En somme, cette présentation réussie a clôturé en apothéose ce festival du rire tunisien à Paris parfaitement organisé par Yalil Prod en partenariat avec Tunisiana et Star Magazine.