Sur les trois prochaines années, la Commission européenne compte octroyer 7 milliards d'euros aux pays du sud de la Méditerranée, à travers ses bras financiers : la Banque européenne d'investissement, la BEI, et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). L'historique de ces deux institutions laisse planer beaucoup de doutes quant à leur capacité à promouvoir et à supporter la démocratie dans la région. La proposition de la Commission pour son aide à la région Méditerranéenne, débattue d'ailleurs lors du Conseil européen les 24 et 25 mars derniers, stipule que l'aide de l'EU aux pays de la région, se concentrera sur l'instauration d'institutions de démocratie, l'effort pour contrecarrer la corruption, le renforcement du rôle des composantes de la société civile ainsi que l'instauration des bases d'une croissance économique saine et pérenne. La Commission est « certaine du fait que la BEI et la BERD sont capables de jouer un rôle majeur dans ces domaines ». Ceci dans un moment ou ces institutions bancaires européennes opèrent selon des mandats politiques vagues, ce sont les banques elles-mêmes qui mettent sur pied et le design et la gestion de leur portefeuille d'investissement. Les institutions politiques de l'UE exercent une influence minime sur les activités bancaires. Un regard quelque peu attentif sur les activités précédentes des deux banques prouve qu'elles ne pourront pas être capables de répondre aux attentes de la Commission européenne. La BEI est active dans la région depuis 1979. Près de 10 milliards d'euros, d'un total de 23 milliards investis dans la région, l'ont été en Egypte et en Tunisie, au cours des trois dernières décennies. Du 1, 87 milliard prêtés par la BEI à l'Egypte, entre 2006 et 2010, 92% ont été destinés au secteur de l'énergie. 4/5 de ce montant ont été consacrés à la promotion du fuel extraits des fossiles. Et du 1,8 milliard prêté à la Tunisie, durant la même période, 50% du montant a été investi dans l'amélioration de l'infrastructure permettant le transport du gaz vers l'Italie. Ces chiffres démontrent que les financements de ces institutions sont totalement déséquilibrés. Au même moment que ces financements essayent d'assurer les importations énergétiques de l'UE, la vision est floue quant à leur apport en matière de valeur ajoutée, pour ne pas parler par la suite de leur apport en matière d'instauration de démocratie et de croissance. De plus, la BEI est appelée à promouvoir le développement dans les pays bénéficiaires, mais on voit très mal son apport dans des secteurs bien déterminés telles que la santé ou l'éducation. Ceci laisse dire que « la vision de la BEI au développement est clairement éphémère », la Banque a, par contre, évalué les progrès des économies des pays de l'Afrique du Nord sur la base de la croissance des PIB des pays, tout en omettant la distribution des richesses. Dans d'autres pays africains, les fonds crédités par la BEI ont fini dans les paradis fiscaux. Une commission indépendante d'audit commissionnée par l'autorité fiscale en Zambie vient de publier un rapport où l'on découvre qu'un prêt de 48 millions d'euros de la BEI à la Zambian Mopani Copper, propriétaire de mines d'acier, a fini dans les comptes de ladite société en Suisse. Un simple exemple qui indique que la BEI dispose de très peu d'outils, ou peut être encore de volonté, pour assurer que ses prêts finissent dans les bonnes mains et aux bons endroits. Les sorties de Philippe de Fontaine-Vive, vice président de la BEI en Tunisie sont multiples. Elles l'ont aussi été bien avant un certain 14 janvier. Il faisait toujours l'éloge des politiques « progressistes » suivies par l'ancien régime…