Hier, les agriculteurs ont voulu faire entendre leur voix et signifier à l'opinion publique que leur secteur est dans la tourmente. Leur coup de colère a été durement étouffé Entre le gouvernement Habib Essid et les agriculteurs affiliés à l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap), c'est désormais la guerre. Hier, Abdelmajid Ezzar, président de l'Utap, a mobilisé, dès les premières heures de la matinée, ses troupes devant le siège de l'organisation agricole à la cité El Khadra (située tout près du siège de l'Utica) et comptait organiser une marche de protestation en direction du ministère de l'Agriculture, situé à l'avenue Alain-Savary. Objectif : «Les agriculteurs voulaient crier au ministre de l'Agriculture Saâd Seddik leur ras-le-bol de la marginalisation dont ils souffrent depuis la révolution et des lois que le gouvernement Essid a fait adopter à l'instar de la loi de finances complémentaire pour 2015 où les agriculteurs ont été totalement oubliés. Idem pour ce qui est de l'amendement de la loi sur la concurrence et les prix examinée actuellement par les députés au palais du Bardo. Dans cette loi, tous les amendements présentés par les agriculteurs ont été purement et simplement rejetés», confie à La Presse Fayçal Tebbini, député au nom du parti «La voix des agriculteurs», insistant pour dire qu'il s'exprime avant tout en tant qu'agriculteur. «Hier, c'était la journée de la colère des agriculteurs. On voulait exprimer pacifiquement nos revendications et faire entendre notre voix au gouvernement et à l'opinion publique en droit d'être éclairée sur les véritables problèmes du secteur. Et c'est bien pour que les Tunisiens sachent comment et qui est derrière l'augmentation vertigineuse des prix des produits agricoles que les agriculteurs ont cherché à organiser, hier, une marche en direction du ministère de l'Agriculture. Malheureusement, les forces de l'ordre en ont décidé autrement en nous réprimant dans les murs de notre maison bien avant qu'on gagne la rue nous conduisant vers le ministère de l'Agriculture», ajoute-t-il. Appel à une enquête sur la violence subie par les agriculteurs Mais en fait, que revendiquent les agriculteurs et quels mouvements de protestation envisage à l'avenir l'Utap face surtout à la possibilité de voir le marché inondé de moutons importés à l'approche de l'Aïd El Kébir ? Fayçal Tebbini résume les demandes des agriculteurs ainsi: «Nous avons exigé à ce que les importateurs des produits agricoles soient obligés par la loi de payer leurs impôts à l'instar des agriculteurs et nous avons proposé que les gains ou bénéficies des agriculteurs soient fixés à au moins 20%. Nos deux propositions n'ont pas eu de suite. Quant à l'importation de moutons à l'occasion de l'Aïd El Kébir, on ne peut que respecter au sein de l'Utap la promesse faite par le ministre du Commerce de ne pas y recourir. Mais nous attendons la tournure des événements puisque l'on prévoit qu'il y aura des pressions ou des interventions afin que réapparaissent les moutons slovènes ou espagnols sous le prétexte de réguler les prix. En tout état de cause, les agriculteurs sont déterminés à faire face avec énergie à la poursuite du système de la malversation au sein du secteur agricole. Volet lutte contre la violence subie par les agriculteurs, on exige l'ouverture d'une enquête en vue de déterminer pourquoi les forces de l'ordre ont agi ainsi et pour savoir qui a donné les ordres pour que les agriculteurs soient durement réprimandés. En attendant que les choses soient tirées au clair, les agriculteurs poursuivront leur mobilisation afin que leurs revendications soient satisfaites». Il est à préciser que contrairement aux informations relayées par certains sites électroniques, le président de l'Utap, Abdelmajid Ezzar, n'a pas été violenté par les forces de l'ordre et c'est lui même qui l'a confirmé dans une déclaration à une radio privée. Décidément, le mois de septembre s'annonce chaud, très chaud, dans la mesure où les journées de colère vont se succéder très prochainement. En effet, les instituteurs et les enseignants du secondaire se préparent à organiser, à la fin de la semaine, des journées de colère dans les régions, au cas où les négociations avec le ministère de l'Education ne répondraient pas à leurs exigences. De son côté, le Front populaire menace de retourner à la rue si le projet de loi sur la réconciliation économique n'est pas retirée. Et comme en Tunisie l'on s'est habitué aux compromis et aux solutions de dernière minute, le mardi 7 septembre, jour du deuxième round du sommet du quintette à Carthage, pourrait apporter beaucoup de surprises.