Par Abdel Aziz HALI «Nous avons deux poids et deux mesures : nous approuvons, pour une idée, un système, un intérêt, un homme, ce que nous blâmons pour une autre idée, un autre système, un autre intérêt, un autre homme», disait François René de Chateaubriand dans sa principale œuvre «Mémoires d'outre-tombe». Cet extrait semble coller à la perfection quand on voit l'attitude de l'Occident vis-à-vis des groupes jihadistes œuvrant sur le territoire syrien. Si tout le monde s'est mis d'accord de mener une guerre aérienne contre Daech, l'Armée de la conquête (Jaich al-Fatah), une alliance militaire de plusieurs factions islamistes composée essentiellement du groupe islamiste Ahrar Al-Sham et du Jabaht (Front) Al-Nosra, semble ne pas être concernée par cette décision. Réellement, Al-Nosra, mouvement jihadiste, branche levantine d'Al-Qaïda, n'a rien à envier au sinistre groupe Etat islamique. Entre lapidation de femmes adultères en public et écrasement des brigades rebelles trop proches à son goût des Etats-Unis, ce bras armé de l'organisation dirigée par l'Egyptien Ayman Al-Zaouahri passe presque inaperçu aux yeux des chancelleries occidentales. Et voilà que la Russie décide de régler leur sort que Washignton et Paris crient au scandale! En effet, François Hollande a déclaré, hier, à la presse : « C'est Daech qu'il faut viser et pas d'autres »? De son côté, l'administration Obama est sur la même longueur d'onde que le président français sur ce sujet. « Nous n'avons pas vu de frappes contre le groupe Etat islamique, nous avons vu des frappes contre l'opposition syrienne », rajoute un responsable américain de la Défense. On parle ici des premières frappes de l'aviation russe opérées, avant-hier, sur le territoire syrien, ciblant des positions d'Ahrar al-Sham dans les provinces d'Idlib et de Hama, d'après l'Observatoire syrien des droits de l'homme (Osdh) et les médias syriens. En revanche, au nord de la ville de Homs, Jabhat Al-Nosra a été touché par ces frappes, selon l'Osdh. Ainsi, les Etats-Unis et ses alliés ne voient aucun mal de laisser sévir Al-Qaïda et groupes satellites tant qu'il ne s'agit pas de combattants armés appartenant à l'organisation Etat islamique. Drôle de stratégie de lutte antiterroriste ! Rappelons que ces derniers jours, l'armée américaine avait affirmé que des rebelles syriens modérés entraînés par le Pentagone ont remis leurs armes à Jabhat Al-Nosra. «Un puissant camouflet pour les USA (...). Le nouveau groupe de la division 30 entré hier a remis toutes ses armes à Jabhat Al-Nosra après s'être vu garantir un passage en toute sécurité», lit-on sur le compte Twitter d'un certain Abu Fahd Al-Tunisi, membre de groupe armé salafiste jihadiste affilié à Al-Qaïda, «Ils ont remis un grand nombre de munitions et d'armes de moyen calibre ainsi que plusieurs véhicules tout-terrain», a-t-il renchéri. Or malgré cette perte matérielle, tout porte à croire que la neutralisation de cette menace est le dernier des soucis de la Maison-Blanche et de l'Elysée. Alors l'Occident est-il vraiment sérieux dans sa lutte antiterroriste car qui dit groupes djihadistes ne dit pas uniquement Daech ? Manifestement, la politique des deux poids et deux mesures reste la seule solution à une telle interrogation.