L'attentat survenu, mardi, au centre-ville, qui a secoué tout le pays, n'a pas empêché la projection en avant-première du long métrage de Farès Naânaâ Les frontières du ciel (Chbebek el janna), sélectionné pour la compétition officielle. La direction des JCC a maintenu la projection prévue pour 18h00 au Colisée, soit près d'une heure après l'attentat. Une manière de résister et de ne pas se plier face au terrorisme. Les festivaliers (ceux qui ont pu avoir un ticket!) ont aussi tenu à assister à cette avant-première et leurs voix ont retenti pour chanter en chœur l'hymne national avant la projection. Le film était pour le moins attendu par le public tunisien. Les festivaliers se sont bousculés, le matin-même, devant l'unique guichet disponible ouvert à 8h00, deux heures après, il était fermé, ce qui les a incités à exprimer leur colère contre l'administration de l'organisation des JCC sur les réseaux sociaux. Les frontières du ciel (Chbebek el janna), un film plein d'émotion qui nous a dévoilé un Lotfi Abdelli touchant et convaincant dans la peau de Sami qui, avec son épouse Sara (l'excellente Anissa Daoued), subissent la perte de leur petite fille. Le film raconte le deuil, le déchirement et la réparation après la perte, cette descente aux enfers que chacun vit à sa manière. Chbebek el janna, c'est le nom de ces petits gâteaux au miel que la fillette préparait avec sa grand-mère (Mouna Nourredine), mais ce sont, surtout, ces doux moments de bonheur volés par l'horrible perte. Sami et Sara, la trentaine, mènent une vie paisible et semblent heureux, un tableau plein de couleurs que ce drame viendra ternir. Rongé par la culpabilité, Sami sombre dans le désespoir et s'éloigne petit à petit de Sarra qui, malgré sa douleur, tente de recoller les morceaux. Un changement violent dans la vie de ce couple, appuyé par un montage fait de flash-back et un parallèle entre la vie avant le drame et le deuil. Le récit tire son éloquence et sa force de son image qui le porte jusqu'au bout. Une image impeccable, signée Sofiène El Fani, qui figure ces moments de vie et dessine ses nuances et ses frontières.