L'Utica est consciente de la dégradation du pouvoir d'achat du consommateur, mais «l'entreprise ne peut plus vivre avec les sentiments». Certaines entreprises peuvent assurer des augmentations de salaires, d'autres sont en difficulté et ne peuvent guère supporter d'augmentations salariales », affirme d'emblée la présidente de l'Utica dans l'entretien qu'elle nous a accordé en marge des Journées de l'entreprise Lors des assises de la 30e édition des Journées de l'entreprise, organisées les 4 et 5 décembre à Sousse, Mme Wided Bouchamaoui, présidente de l'Utica s'est penchée sur le dialogue Ugtt-Utica et les négociations sociales dans le secteur privé qui suscitent encore la polémique. De prime abord, la présidente de l'Utica n'a pas manqué de rappeler que les entreprises ne peuvent exister sans les ouvriers et les patrons. «Nous sommes condamnés à vivre ensemble, chefs d'entreprise et employés. Mais il y a des règles de jeu que nous devons respecter les uns et les autres, des règles de jeu désormais définies par la loi et le dialogue et sur la base du réalisme et de la transparence. C'est l'essence même du contrat social». Et d'ajouter que l'Utica est consciente de la dégradation du pouvoir d'achat du consommateur, mais «l'entreprise ne peut plus vivre avec les sentiments». Certaines entreprises peuvent assurer des augmentations des salaires, d'autres sont en difficulté et ne peuvent guère supporter d'augmentations salariales, «ça sera irresponsable de ma part de les engager sur cette voie. C'est tout simplement concourir à leur disparition et à la perte de leurs emplois. C'est pour cette raison que nous n'avons pas encore trouvé de solutions aux négociations sociales. Nous sommes prêts à accorder des augmentations, mais ces augmentations seront bien calculées, parce que je suis responsable de la survie des entreprises tunisiennes, de la création d'emplois. Nous allons donner ce que nous pouvons donner». La présidente du patronat tunisien a dû rappeler que le secteur privé contribue à raison de 70% du PIB, représente 60% de l'investissement global et 80% de la masse active, et pourtant «il est mis à l'index, soupçonné, diabolisé et ignoré et, parfois même, maltraité. Après la révolution et la période de transition, on croyait que cette image allait progressivement changer du fait de la transparence, des libertés et de l'Etat de droit ; hélas, le phénomène s'est amplifié». Mais, en dépit de ce sentiment d'hostilité, le secteur privé assume sa responsabilité en raison d'un déficit de communication manifeste. «Nous avons également d'énormes chantiers. Il faut qu'on se mette ensemble sur une nouvelle vision économique, qui favorise, entres autres, un partenariat public-privé, «bien qu'il y ait une incompréhension de ce projet et une tendance constante de diabolisation du secteur privé». Pour parler de la vision, «nous sommes tous d'accord sur le diagnostic, tous les indicateurs sur la Tunisie sont clairs et nets, la solution est claire. Nous sommes tous tenus de faire des sacrifices, employés, employeurs, partis politiques, société civile, jeunes, hommes et femmes. Nous sommes tous prêts à ce sacrifice parce que jusqu'à aujourd'hui, cinq ans après la révolution, il y a encore un déséquilibre régional. On souffre tous de l'administration tunisienne, de la notion du travail qui a complètement chuté, de l'économie informelle et du fléau du terrorisme». Pour conclure, la présidente de l'Utica insiste sur la nécessité d'investir, de créer de l'emploi, créer de la richesse pour pouvoir la répartir après. «De part nos moyens limités, il faut oser investir dans les régions de l'intérieur, même si les infrastructures sont insuffisantes, afin de redonner de l'espoir à leurs populations».