Alors que Carthage fêtait la jeunesse en grande pompe, «les fins becs» de la musique ont été servis et resservis par la voix mélodieuse et les chansons harmonieuses de la Syrienne Mayada Bsiliss, qui a donné un concert, jeudi dernier, dans le cadre du festival international de Hammamet. Depuis 2000, année de sa première apparition au festival de la Médina, cette cantatrice est devenue une habituée des festivals et du public tunisiens. Cette première visite et toutes celles qui l'on suivie, sont venues couronner un long parcours. En effet, Mayada Bsiliss chante depuis 1976, alors qu'elle n'avait que neuf ans. En plus de la beauté de l'être et du paraître, cette artiste jouit d'une voix magnifique, dont elle connaît les possibilités étendues, comme les limites, peut-être, car tout le monde a ses limites. Avec une technique de chant maîtrisée à la perfection et des compositions de son chef d'orchestre et compagnon de route, Samir Kwifati, elle dispose d'un répertoire qui la distingue des artistes de sa génération. Les paroles de ses chansons, ouvertes à tous les soucis humains, ne sont que la cerise sur le gâteau. Lors du concert de jeudi, Mayada bsiliss est entrée sur scène, sans un mot. Devant un public qui l'attendait comme une mère attend le retour d'un fils, elle a interprété y a jabal ma yhezzak rih et quelques-unes de ses chansons les plus connues comme Ala îni et y a tayoub, avant de donner à l'audience un aperçu de son nouvel album Ila ommi wa ardhi, avec le titre khallini mâak. Au fur et à mesure que le concert progresse, les œuvres à succès, et Dieu sait qu'elle en a tout un tas, se succèdent : Ma baddi y a mama, Aadi, Natalie… Mayada Bsiliss a également puisé dans le répertoire folklorique d'Alep, pour faire plaisir à un public conquis d'avance et qui ne cessait de réclamer des titres. L'ambiance bat son plein avec Ma hada b'yesâal anni qu'elle a rechantée à la demande du public. Annoncée par un dialogue entre le piano et le synthétiseur, puis par la voix de Mayada et le son du luth, Kezbak helou a eu, à son tour, son moment de gloire. Choufou baladi, un autre nouveau titre et Wahdi bala rfik sont venues au bout de la soirée impeccable en tous points. Mayada Bsiliss sur scène, c'est une preuve que l'art est un engagement en lui-même et pour lui-même, quel que soit le sujet abordé. Sa tenue sobre et son apparente timidité laissent place, devant le micro, à une bête de chant qui n'en a que pour son récital. C'est aussi la preuve qu'un tel parcours ne peut être que le fruit d'un long travail et d'un projet complet, allant de la réflexion à l'exécution à travers le labeur et la foi en l'art. Il est clair que pour elle, le sérieux n'est pas une posture, c'est tout un état d'esprit. Respecter le public à qui l'on s'adresse l'est tout autant ! Que d'enseignements et de valeurs Mayada Bsiliss nous transmet-elle à travers ses chansons qui trouvent le juste milieu entre l'héritage de ses ancêtres d'Alep et une conception moderne de la musique. L'on ne pouvait s'empêcher, jeudi dernier, d'avoir une pensée pour ces «invités» de nos festivals dont plusieurs ne nous ont offert que sornettes et des «choses» creuses et purement commerciales.