En réaction aux récentes recommandations et observations générales émises par le Comité de l'ONU contre la torture quant au 3e rapport périodique de la Tunisie présenté le 20 avril dernier à Genève, « l'Institut tunisien de réhabilitation des survivants de la torture », faisant partie de la société civile nationale, a tenu tout récemment à Tunis une conférence de presse, au cours de laquelle il vient de mettre au clair sa position à l'égard du phénomène et les reproches qu'il a à faire au gouvernement Le président de l'Institut tunisien de réhabilitation des survivants de la torture, Dr. Fethi Touzri, a passé en revue les remarques conséquentes avancées par le comité onusien relevant de « la Convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants », en ce qui concerne l'état des lieux sous nos cieux. Car, depuis le 2e rapport qui lui a été remis en 1999, sous l'ancien régime, la situation dans nos prisons laisse encore à désirer. Et bien que la thèse d'une torture méthodique soit, éventuellement, démentie, la multiplication des cas « isolés » suscite autant d'interrogations. Au point de ne plus savoir à quel saint se vouer. La réalité est tellement floue qu'on n'arrive pas à la déchiffrer, ce qui laisse perplexe. Sommes-nous face à des tortionnaires déguisés ou à des victimes biaisées ? L'on parle, d'ailleurs, de « 230 cas de torture devant les tribunaux entre janvier et juillet 2014, 165 seraient encore en phase d'enquête et seulement dans deux cas les accusés ont été condamnés à des peines d'emprisonnement avec sursis », note ledit comité dans son dernier rapport spécifique à l'état des lieux en Tunisie. En tant que membre adhérent à ladite convention des Nations unies de lutte contre la torture, la Tunisie est appelée à honorer ses engagements. Par conséquent, elle doit, par ailleurs, accélérer la mise en application des récentes recommandations onusiennes qui viennent d'être rendues publiques, le 13 de ce mois. Mais, qu'en est-il au juste ? M. Touzri a tenu à ressortir les points positifs tels que jugés par le comité de Genève. Ce dernier n'a pas manqué de faire valoir le climat législatif et institutionnel dont dispose, désormais, la Tunisie post-révolution. Nouvelle constitution incriminant la torture, réformes judiciaires, code pénal, justice transitionnelle, instance nationale de prévention de la torture (Inpt) fraîchement créée, sont des mécanismes censés réduire autant que possible le phénomène de la torture dans les différents lieux de détention. Entre autres aspects positifs, le centre « Nebras » de réhabilitation relevant dudit institut lui-même que le comité de l'ONU a tenu à saluer pour l'assistance et l'accompagnement psycho-sociologique fourni aux survivants de la torture. Soutenu par l'institut danois « Dignity » et le fonds des contributions volontaires des Nations unies pour les victimes de la torture, indique-t-on, ce centre, lancé en 2014, a permis à quelque 127 cas de recouvrer leurs droits à la santé et à la dignité. D'où, affirme-t-il, une prise en charge intégrale leur a été réservée. N'empêche, il y a, quand même, des zones d'ombre et des écueils soulevés dans le rapport du comité. Le conférencier s'est limité à y dégager 15 points noirs touchant à des cas de sévices et supplices à degrés variables. « Bilan mi-figue, mi-raisin », estime-t-il, évoquant que ledit comité a tenu en compte des rapports alternatifs présentés par la société civile tunisienne à Genève. Définition de torture non conforme à l'article 1 de la convention internationale, faibles garanties juridiques lors de la garde à vue, examens médicaux des détenus mis en cause, magistrats et police judiciaire pointés du doigt, intimidation des activistes des droits de l'Homme pour avoir stigmatisé la persistance de la torture, impunité totale sont, à vrai dire, les principaux sujets qui ont préoccupé le comité de l'ONU contre la torture. En réaction à cela, l'Institut tunisien de réhabilitation des survivants de la torture demande que l'Etat assume ses pleines responsabilités et ne doit, en aucun cas, faillir à ses devoirs, en tant que seul garant des droits de l'Homme. Aux côtés de l'ARP, comme institution législative, l'Etat ne devrait pas lésiner sur les moyens susceptibles de renforcer les programmes et les actions de réhabilitation des victimes et leur fournir l'assistance matérielle requise. Les rapports périodiques réalisés, en principe, tous les cinq ans, sur la lutte contre la torture devraient être régulièrement publiés au public, insiste-t-il. « De son côté, l'institut s'est engagé avec le ministère de la Santé et d'autres organisations civiles œuvrant en la matière pour améliorer ses prestations fournies aux victimes de la torture », renchérit-il, en conclusion.