Si l'olivier unit les deux rives de la Méditerranée en une même culture millénaire, il en est de même de la vigne et du vin. Les Phéniciens en ont apporté le savoir, le Tunisien romain Magon l'a élaboré, et surtout en a laissé trace dans un traité, aujourd'hui disparu, mais dont on a gardé la mémoire. La vigne, donc, la viticulture, unifie, dans ses pampres et ses crus les coteaux de Mare nostrum. Aussi, n'était-il pas incongru de voir s'élaborer un projet transversal qui, en Sicile et en Tunisie, dessine «Un chemin de la vigne sur les traces de Magon». L'idée est née au sein d'un groupe d'amis viticulteurs : l'Union européenne offrait un financement pour des projets culturels ou scientifiques transfrontaliers. Le financement était accordé à un pays européen, à charge pour lui de s'associer à un partenaire de l'autre rive. Une vingtaine de projets avaient ainsi été concrétisés en Tunisie. Une nouvelle batterie d'appels à projets était lancée. Mohamed Ben Cheikh, président de la Chambre des vins à l'Utica, et des viticulteurs siciliens, tout aussi passionnés que lui, élaborèrent un rêve magnifique : dessiner, en Sicile et en Tunisie une route du vin sur les traces de Magon. Un circuit œnologique, mais aussi culturel, des visites de caves exceptionnelles où l'on dégusterait du vin, des produits du terroir, mais où l'on découvrirait, également, les sites archéologiques et les musées liés à cette longue et belle histoire de notre culture commune. Le projet enthousiasma les bailleurs de fonds, fut adopté, élaboré, affiné, et sera inauguré au mois de septembre prochain. Trois caves émailleront le circuit tunisien : la cave aux mille amphores, à Megrine, dont on dit quelle est une des plus belles du monde. Elle sera associée au site de Carthage, et au musée du Bardo, où l'on découvrira un parcours sélectionnant les plus belles mosaïques évoquant la vigne et le vin. La cave de Néphéris, sur le site archéologique du même nom au Cap Bon, associée au musée de Nabeul qui possède une des plus belles collections de vaisselle à vin et d'amphores vinaigres. La cave de Kuribis, à Kerkouane, associée au site et au musée du même nom. Ce circuit tournera donc autour de la culture du vin, de l'œnogastronomie, mais aussi de l'histoire des civilisations. Pour le réaliser, on a opéré une mise à niveau des caves, mettant en place signalétique, écrans d'information didactiques, totems et applications téléphoniques. Des guides spécialisés sont en cours de formation. Des salles de dégustation ont été aménagées dans la plus belle tradition des grands crus. Il est vrai que le coordinateur du projet, Mohamed Ben Cheikh s'est entouré d'une équipe de partenaires de choc : l'Inp, l'Agence du patrimoine, l'Ontt, la Ftav, ainsi que d'un réseau d'archéologues, d'architectes, de photographes et de paysagistes. Tant et si bien que «La route du vin sur les traces de Magon» vient d'intégrer le très sélectif Itervitis, réseau de routes du vin qui sillonne l'Europe, du Portugal à l'Azerbaïdjan