Les syndicalistes refusent que 2017 soit déclarée année blanche en matière de majorations salariales. Ils appellent le gouvernement à lancer une campagne nationale pour le recouvrement de ses dettes fiscales et de ses pénalités douanières Qui a dit que le torchon brûle entre le gouvernement Youssef Chahed et l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) à propos des dispositions contenues dans le projet de loi de finances 2017, notamment celle prévoyant le report des majorations salariales au profit des fonctionnaires de l'Etat et des établissements publics jusqu'en 2019 (dans une première étape) et jusqu'en 2018 selon la proposition faite par le gouvernement samedi dernier ? Qui a dit que les syndicalistes de l'Ugtt, rejoints ces derniers jours par ceux de l'Union des travailleurs tunisiens (UTT), sont prêts à aller jusqu'à la grève générale pour imposer à Youssef Chahed leurs conditions et le pousser à revoir sa copie concernant la loi de finances que Abada Kefi, le député de Machrou Tounès, considère comme «une loi n'ayant ni odeur ni goût et conduisant le pays à coup sûr vers la catastrophe ?». Du côté de la place Mohamed-Ali, on insiste toujours sur la disposition de Hassine Abassi, secrétaire général de l'Ugtt, et de ses collaborateurs à poursuivre le dialogue «même si la rencontre gouvernement-Ugtt du samedi 5 novembre a échoué». Bouali M'barki, secrétaire général adjoint de l'Ugtt, est clair : «Nous sommes toujours disposés à négocier dans le but de parvenir à une solution consensuelle qui prenne en considération aussi bien les intérêts des salariés que ceux de l'Etat. Les sacrifices incontournables, nous y adhérons, mais à condition qu'on convienne d'une approche commune sur la base de laquelle toutes les parties concernées consentiront les sacrifices exigés». Y aura-t-il une nouvelle rencontre de négociations gouvernement-Ugtt avant que l'on décide que le dossier ne soit transféré au palais de Carthage, comme le suggèrent Wided Bouchamaoui, présidente de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), et le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi. Une source informée auprès du secrétariat général de l'Ugtt confie à La Presse : «Nous attendons que le gouvernement nous contacte d'un moment à l'autre pour reprendre le dialogue. Quant à l'idée d'une rencontre de conciliation ou d'arbitrage des signataires du Pacte de Carthage sous la présidence du chef de l'Etat, l'Ugtt n'y adhère pas pour le moment. Nous laissons la porte ouverte au dialogue». Pour une campagne nationale de recouvrement des dettes fiscales Mais au fait que propose l'Ugtt en contrepartie de son refus de reporter les augmentations salariales à 2018, ce qui revient à accepter que l'année 2017 soit déclarée année blanche, comme ce fût le cas en 2012, la première année au cours de laquelle la Troïka a accédé au pouvoir à l'issue des élections du 23 octobre 2011 ? Les experts de l'Ugtt estiment que les solutions existent et ils citent en premier lieu «le recouvrement par l'Etat de ses dettes fiscales auprès des hommes d'affaires qui ont fait de l'évasion fiscale leur sport favori. Il y a également les pénalités douanières qui n'ont jamais été payées. Leur recouvrement peut rapporter à l'Etat beaucoup de milliards de dinars. C'est pourquoi l'Ugtt demande au gouvernement de lancer une campagne nationale de recouvrement de ses dettes fiscales et des pénalités douanières impayées». Toutefois, le discours apaisant développé par Bouali M'barki ne concorde pas, aux yeux de plusieurs observateurs, avec celui de Sami Tahri, membre du bureau exécutif et porte-parole de l'Ugtt, qui multiplie ces derniers jours les menaces à peine voilées selon lesquelles la patience de la direction de la centrale ouvrière n'est pas illimitée et que les bases syndicales auront leur mot à dire pour ce qui est des mouvements qui seront organisés à travers le pays au cas où le gouvernement ne renoncerait pas au projet de loi de finances dans sa version actuelle.