Hédi Majdoub, ministre de l'Intérieur, a beau expliquer que l'enquête policière est en cours, les partis politiques veulent que le gouvernement porte plainte contre Israël auprès de l'ONU Hier, mardi 20 décembre, l'actualité était dominée par l'assassinat de l'ingénieur Mohamed Zouari à Sfax et les déclarations du ministre de l'Intérieur, Hédi Majdoub, soulignant que «plusieurs éléments laissent penser que l'opération a été conduite par une organisation étrangère» (voir La Presse du mardi 20 décembre) n'ont fait qu'accentuer les interrogations sur la facilité avec laquelle les auteurs de l'assassinat ont procédé. Et comme prévu, les professionnels de la polémique, qu'ils soient de gauche ou de droite, ont trouvé le champ fertile pour se lancer dans leurs querelles interminables à caractère idéologique, qu'on croyait révolues à jamais. Malheureusement, les démons de la sédition dans son sens le plus abject se sont réveillés bien avant que l'ingénieur assassiné ne soit accompagné à sa dernière demeure. Est-il, en effet, admissible qu'on se pose la question abjecte : feu Mohamed Zouari est-il à considérer comme un martyr ou comme une simple victime d'un crime ordinaire même si les auteurs de ce crime peuvent être des étrangers, plus précisément des Israéliens qui agissent sous les ordres des services de renseignements israéliens connus sous l'appellation «Mossad». Et la tragédie vécue à Sfax de nous faire découvrir qu'il existe en Tunisie des experts se disant au parfum de ce que fait le Mossad, connaissant les détails les plus cachés des opérations qu'il mène et informés aussi du timing et des lieux où il conduit ses opérations. Lazhar Akremi, le dirigeant nidaïste et l'ancien secrétaire d'Etat à la Sécurité sous le gouvernement transitoire de Béji Caïd Essebsi en 2011, nous a livré, hier, sur Radio Mosaïque des secrets, des ficelles et des tours que peut-être les agents du Mossad ne connaissent pas. Restent maintenant les partis politiques de l'opposition et au pouvoir : ils ont tous dénoncé «le lâche assassinat de l'ingénieur Mohamed Zouari» et demandé au gouvernement «d'éclairer immédiatement l'opinion publique sur les conditions dans lesquelles a été perpétré l'attentat ainsi que sur ses auteurs directs et leurs manipulateurs», et sans attendre que l'enquête policière révèle qui est derrière l'attentat, ils ont exigé du gouvernement «de porter plainte auprès de l'ONU contre Israël, commanditaire de l'opération». Et quand Hédi Majdoub a précisé, lundi soir, «que pour le moment, on ne peut accuser nommément aucune partie étrangère d'être derrière l'assassinat et qu'on doit attendre ce que l'enquête va révéler», ces mêmes partis ont réagi négativement aux propos du ministre, estimant qu'il n'a rien dit d'important et que les données qu'il a livrées aux journalistes ont déjà été publiées sur les réseaux sociaux». Les syndicalistes au-devant de la scène A Sfax, ce sont les syndicalistes de l'Ugtt qui ont pris le commandement des opérations sur le terrain en demandant des funérailles nationales en l'honneur de l'ingénieur Mohamed Zouari et en organisant une marche de protestation dans la ville au cours de laquelle ils ont exhorté le gouvernement à «prendre ses responsabilités et à exiger que les auteurs du crime soient punis». A Tunis, plus précisément sur l'avenue Habib-Bourguiba, devant le Théâtre municipal, s'est déroulé, hier, un sit-in avec la participation de plus de 500 protestataires représentant des partis politiques et des organisations de la société civile brandissant les drapeaux palestinien et tunisien et le portrait du martyr Mohamed Zouari et appelant «à la criminalisation de la normalisation avec l'entité sioniste, à resserrer les rangs pour la combattre et à la nécessité de préserver la souveraineté nationale et aussi de punir les responsables accusés de négligence». Mokhtar Trifi, président d'honneur de la Ligue tunisienne de défense des droits de l'Homme (Ltdh), précise : «On s'attendait à ce que le ministre de l'Intérieur expose la position du gouvernement tunisien sur l'agression perpétrée par les bandes sionistes contre l'intégrité du sol national. Malheureusement, il s'est limité à expliquer les aspects techniques relatifs au crime». De son côté, Salem Labiedh, député d'Achaâb, a qualifié l'assassinat de Mohamed Zouari «de crime d'Etat» et a rappelé que le Bloc démocratique au parlement a appelé à «une séance plénière exceptionnelle en vue de lancer une nouvelle initiative législative criminalisant la normalisation avec Israël». Issam Chebbi, porte-parole d'Al Joumhouri, a demandé au gouvernement «d'internationaliser l'affaire, surtout que la griffe du Mossad est bien claire». Il est à préciser que le sit-in s'est déroulé dans le calme et sous une surveillance sécuritaire rapprochée. On a enregistré la présence des militants d'Al Joumhouri, d'Ettakatol, du Mouvement Achaâb de Tunisie Volonté et des militants de l'association «Manech msamhine» (Nous ne pardonnerons jamais) ainsi que de plusieurs Palestiniens résidant à Tunis.