Le constat est affligeant. Il en dit long sur la mauvaise gestion des biens confisqués depuis 2011. Le palais du président déchu, sis dans la région d'El Houidh (délégation d'Utique) est complètement ravagé. Ce bien confisqué à la famille Ben Ali est dans un état de délabrement total. Vandalisé, les portes et les fenêtres ont été arrachées, les escaliers sont couverts de poussière, le sol disparaît sous les crottes et les squelettes d'oiseaux et est jonché de détritus, le faux plafond s'effondre... En effet, le dossier des biens confisqués traîne, comme un boulet, depuis six ans, et ne semble toujours pas avoir trouvé la bonne issue C'est pourquoi le secrétaire d'Etat chargé des domaines de l'Etat et des Affaires foncières, Mabrouk Korchid, au pas de charge, cherche à lui donner une nouvelle vie. C'est la deuxième visite en l'espace d'un mois qu'il effectue à Utique. Cette fois-ci, il est accompagné par la ministre du Tourisme, Mme Salma Elloumi, qui a qualifié la situation de ce palais de « catastrophique ». La ministre a souligné l'impératif de le réaménager, dans les plus brefs délais, afin de le réexploiter à des fins touristiques, étant donné sa proximité avec le site archéologique Utique. Pour sa part, le secrétaire d'Etat chargé des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières a indiqué que ce palais fait partie des biens confisqués devant être réaménagés et transformés en projets rentables. Il a fait savoir que son département coordonnera avec la présidence de la République et la présidence du gouvernement pour étudier les idées de projets qui permettront de redonner vie à ce palais. L'objectif de ce genre de visite est de sensibiliser les différents acteurs à la nécessité de remédier à une situation kafkaïenne qui dure depuis six ans, selon les observateurs. En effet, si l'état peine à se défaire de ce palais, qui couvre une superficie de 1000 hectares comprenant un bâtiment de trois étages et un sous-sol que Leila Ben Ali utilisait pour ses réunions familiales, c'est que le dossier, comme beaucoup d'autres similaires, est trimbalé de cour de justice en cour de justice, d'administrateur judiciaire en administrateur judiciaire. D'ailleurs, les appels d'offres, publiés sur le site web du ministère des Finances, concernant la vente de villas situées à La Marsa, Gammarth, Sidi Bou Saïd et des lots de terrains aménagés, demeurent à ce jour infructueux. En effet, les problèmes liés à la faiblesse de la coordination entre les différents intervenants dans le dossier des sociétés confisquées et l'absence de concrétisation de plusieurs décisions adoptées par la commission de gestion de ces sociétés, outre le non-règlement de la situation juridique d'un certain nombre d'entre elles (sociétés confisquées), l'arrêt de l'activité de certaines et la détérioration de la situation d'autres, entravent toute démarche de cession des conditions normales. Il est à noter que la liste des biens confisqués comprend 546 sociétés représentant une valeur estimée à 1.862 millions de dinars dont 696 millions de dinars reviennent à l'Etat, 510 biens immobiliers enregistrés, 29 autres non enregistrés, 142 véhicules, 15 fonds de commerce et 380 comptes bancaires. Les avions présidentiels propriété de Tunisair, à savoir le Boeing B737-700 et l'Airbus A340-500, destinés à la vente, connaissent également le même sort puisqu'ils n'ont pas trouvé preneurs jusqu'à ce jour. L'avion présidentiel de type Airbus A340 acquis par Tunisair en 2009, pour un montant de 212,5 millions de dinars et stationné actuellement à l'aéroport de Bordeaux en France, coûte à l'Etat des sommes exorbitantes et risque de voir sa valeur se dégrader. Le deuxième appareil présidentiel de type Boeing 737, acheté en 1999, pour un montant de plus de 54 millions de dinars, n'intéresse personne. La société Cruz Tours à qui on a confié la cession des voitures et yachts confisqués, et dont le parking étale un parterre de marques de voitures toutes plus prestigieuses les unes que les autres, et en parfait état de marche, mais en garage forcé, a lancé récemment un cri de détresse quant aux problèmes et pressions que vit cette société depuis sa prise en charge de ce dossier. Hormis la préservation des droits de l'Etat, qu'impose une gestion optimale du dossier des biens confisqués, des frais de gestions additionnels viennent enfoncer le gouffre financier causé par l'entretien, la restauration et la réfection de ces biens. Il est grand temps de trouver les solutions à même de surmonter les difficultés et les entraves, d'évaluer l'approche adoptée dans le dossier des biens confisqués depuis 2011 et ses résultats, en vue de mettre en place des orientations stratégiques pour garantir un traitement efficient de ce dossier.