C'est maintenant ou jamais. Face au Brexit, à l'arrivée de Donald Trump et à l'impérieuse nécessité de reconquérir les opinions en faisant montre de sa capacité à être source de prospérité, l'Europe doit faire plus et plus vite et notamment « tirer le meilleur du marché unique ». Le Conseil d'analyse économique appelle à harmoniser les réglementations et à mieux coordonner les régulateurs nationaux. «Tirer le meilleur du marché unique» C'est le message qu'adresse une note du Conseil d'analyse économique (CAE, rattaché à Matignon), publiée hier jeudi et que dévoilent «Les Echos». Elle appelle à «tirer le meilleur du marché unique», qualifié de «verre à moitié plein» tant de «nombreuses barrières non tarifaires aux échanges subsistent». Résultat, analysent les économistes Vincent Aussilloux, Agnès Bénassy-Quéré, Clément Fuest et Guntram Wolff, les échanges entre pays européens sont encore quatre fois plus faibles que ceux entre Etats aux Etats-Unis. Le principal moteur de la croissance Doubler cette intensité commerciale «ferait augmenter les revenus européens d'environ 14 %», insistent-ils. Pour y parvenir, ils pointent l'importance de bâtir un vrai marché unique des services, principal moteur de la croissance. En dépit de certaines avancées, dans l'aérien notamment, «nombre de secteurs de services restent fragmentés», pointe le CAE, citant l'énergie, le ferroviaire, les télécoms, l'assurance et les banques. La note appelle en réponse l'Europe, «dans les secteurs à fortes externalités transfrontalières et/ou économies d'échelles», à « viser une réglementation unique et une étroite coordination, voire une fusion, des régulateurs nationaux». Enjeu clef dans le numérique L'enjeu est particulièrement dans le numérique, insiste l'étude, où les start-up européennes «souffrent de la segmentation du marché et d'une insécurité concernant l'utilisation et l'échange de données» quand, «dans des secteurs où le gagnant rafle la quasi totalité du marché, les entreprises américaines ont l'avantage de démarrer sur un grand marché intégré». L'étude appelle aussi à passer au crible, et à la moulinette, les quelque 3.000 exigences réglementaires nationales (sur la forme juridique, l'actionnariat, etc.) existant encore dans les secteurs des services aux entreprises. Des projets profitables Sur le volet financement, le CAE salue le projet de mise en place d'une Union des marchés de capitaux et les efforts récents pour harmoniser les restructurations d'entreprises. L'étude soutient aussi l'effort européen de relance de l'investissement (plan Juncker), mais appelle à mieux cibler les dépenses de l'UE vers des projets profitables à tous. «L'UE cofinance des infrastructures qui ont souvent peu d'impact sur d'autres Etats membres», note l'étude, citant les dépenses liées à la politique agricole commune (PAC) et celles liées aux politiques régionales «dans des Etats, comme la France et l'Allemagne», qui «pourraient les financer eux-mêmes». Le dernier volet de la note insiste sur la nécessité de relever «le défi de l'équité», clef pour l'acceptation par les citoyens d'un marché unique plus poussé. Le CAE propose en particulier de développer des interfaces électroniques afin de vérifier que les charges sociales des travailleurs détachés sont bien versées dans leurs pays d'origine, et de rendre l'entreprise recourant aux détachés «immédiatement redevable» en cas d'irrégularité.