Le quatrième art mexicain s'est invité sur nos scènes depuis jeudi dernier avec la pièce «Tres ensayos sobre una escalera» (Trois essais sur une échelle) de la comédienne Nadia Carreón et son frère, l'auteur Alán Carreón, organisée par l'Instituto Cervantes de Tunisie et jouée pour la première fois en Tunisie dans l'espace culturel l'Artisto. Malgré les intempéries, un bon nombre de spectateurs se sont déplacés jeudi dernier à l'espace culturel l'Artisto pour rencontrer les artistes mexicains Alan Carreón et Nadia Carreón et découvrir leur œuvre qui se joue pour la première fois en Tunisie. Soutenu par le groupe musical tunisien The Alexander Furreur Committe, les artistes mexicains nous ont présenté un monologue intitulé «Tres ensayos sobre una escalera» (Trois essais sur une échelle) présenté pour la première fois lors de la 21e édition du Festival de monologues Coahuila 2016, au Mexique. Il s'agit de trois récits de trois personnages différents : Daniel, une femme qui souffre de l'indifférence des autres, une «captive de la vie» comme l'indique le sens de son prénom, Célia une femme âgée, seule, abandonnée par ses enfants et une astronaute qui a du mal à «avoir les pieds sur terre». Des personnages bouleversants justement incarnés par Nadia Carreón. Une jeune comédienne, diplômée de l'école de théâtre de Mexique. Présentée dans la langue de Cervantès, sous-titrée en français, heureusement que la traduction a pu préserver la substantifique moelle de l'ouvrage. A travers cette pièce, l'auteur Alán Carreón donne la parole à des femmes de la classe moyenne, aux destins ordinaires, apparemment tracés d'avance, dont le quotidien normé, ronronnant, monotone, sans surprise va soudainement dérailler, vriller dès qu'elles montent sur une échelle et qu'elles tombent. Ces êtres fragiles et sensibles, dont la vie devient attachée à la symbolique de l'échelle, font face à une réalité tragique. Elles prennent conscience de l'absurdité de la vie et pointent du doigt une société matérialiste, castratrice et des rapports humains marqués par l'égoïsme, la froideur et l'indifférence. Ce monologue poignant qui interroge le spectateur sur ce qui le pousse à lutter, à se battre, sur ce qui le retient à la vie quand ce qu'elle a pu lui offrir de plus beau et de plus fort se trouve derrière lui, Nadia Carreón se l'approprie merveilleusement. Elle insuffle à ces femmes sa tendresse, sa sensibilité, sa simplicité, sa profondeur. Elle offre à chacun des personnages ses traits, ses gestes, sa respiration pour en transmettre toute l'humanité. La jeune comédienne au jeu simple, naturel, évident, passe avec fluidité d'un personnage à l'autre, s'engouffre avec subtilité dans la complexité de ces portraits féminins ; sensibles, farfelus, poignants ouvrant avec grâce les portes du conscient et de l'inconscient. Doux amers, parfois plus sombres, dramatiques ou cruels, les propos mettent en lumière l'humanité, la solitude, la singularité et la sensibilité des personnages. Captivantes, émouvantes, ces confessions saisissent et séduisent les spectateurs.