L'homme a le verbe facile. Il impose le respect et ses idées sont claires. Ce qui lui a valu un second mandat à la tête du Comité national olympique tunisien. Une réélection haut la main. En choisissant son équipe, Mehrez Boussayène voit loin. Il veut révolutionner le sport national et écrire son nom dans l'histoire. C'est un bénévole sans répit et acharné de travail. Ecoutons-le. Pour commencer, quelles conclusions avez-vous tirées après un premier mandat à la tête du Cnot? Je me souviens de la date de ma première candidature. C'était le 17 mars 2013. J'étais le seul candidat sur les 42 à présenter un programme. J'ai obtenu 8 voix sur 9. Je voulais être président du Cnot, c'était mon ambition. Je me souviens qu'il y avait à cette époque un clivage terrible. Deux clans étaient face à face. J'étais devant un énorme problème. Fraîchement élu, j'étais contraint de rétablir la paix au lieu de construire. C'était ma première leçon. La seconde leçon est qu'il fallait absolument changer le système électoral. J'étais pour une assemblée générale et la refonte des règlements. J'ai réussi à le faire. Vous avez donc réussi votre première mission? Oui. L'assemblée générale du 5 février 2017 m'a donné raison après la modification des statuts. Je me souviens aussi de la souffrance endurée suite à la guerre avec le secrétaire général du Cnot. C'est aussi une leçon de retenue. J'ai également compris que le mouvement olympique est plus large que le mouvement sportif. Il repose sur trois piliers : le sport pour tous et le sport de compétition, la culture qui implique la promotion des valeurs et des idéaux olympiques et enfin la durabilité environnementale ou environnement durable. Le mouvement olympique est la vitrine ou le ministère des Affaires étrangères du sport. Vous comprenez alors le poids du Cnot. C'est la seule instance responsable de la participation de toutes les disciplines sportives du pays aux grandes manifestations mondiales. Le Cnot ne s'arrête donc pas au sport uniquement? Le Cnot est en relation avec toutes les composantes de la société civile : sport, culture, environnement et développement durable. J'ai moi-même découvert le rôle du comité dans l'autonomie du mouvement sportif et olympique national pour éviter toutes sortes de pression. Qu'elles soient politiques, religieuses ou ethniques. Le rôle du Cnot est aussi le financement de la préparation de notre élite sportive en communion avec toutes les fédérations nationales. Vous venez d'être élu pour un second mandat. Comment avez-vous choisi votre nouvelle équipe? J'ai opté pour un amalgame entre l'expérience et le sang neuf pour donner l'occasion à des jeunes nouvellement élus de se rapprocher du mouvement olympique. J'ai aussi misé sur deux dames qui sont les présidentes des fédérations de tennis et d'escrime en ajoutant dans ma liste une troisième qui n'est autre que la championne olympique Marwa Amri. J'ai aussi choisi, comme le recommande le CIO, des présidents de fédérations en exercice. Enfin, j'ai misé sur les fédérations de sports collectifs et individuels pour essayer de trouver un équilibre entre les différentes disciplines sportives. La meilleure gestion possible Tokyo 2020, c'est demain. Y songez-vous déjà ? Après les Jeux de Rio 2016, le comité olympique a commencé à écrire l'histoire. Deux livres ont été édités retraçant l'évaluation de nos sportifs à Rio et les défis qui les attendent durant la période de 2017-2020. Aujourd'hui, nous avons donc mis en place les nouveaux statuts pour une gouvernance transparente et une meilleure gestion. Trois commissions ont été créées : la commission électorale indépendante, la commission d'éthique qui mettra en place un code et la commission des athlètes dont deux membres représenteront ladite commission à l'assemblée générale du Cnot avec bien entendu le droit de vote. Il s'agit de deux sportifs qui sont Amine Rzig et Nihel Cheïkhrouhou. Quant à Marwa Amri, elle figure dans le comité exécutif. Nous avons aussi décidé d'appuyer le Cnas en attendant de développer cette structure pour qu'elle devienne une entité juridique indépendante. Quel est le rôle du Cnot sur le plan sportif ? Lors du premier mandat, nous avons mis en place une commission mixte entre le Cnot et le ministère de la Jeunesse et des Sports pour la préparation olympique qu'il faut développer au niveau du fonctionnement et du financement. Nous savons que Tokyo 2020 est à l'horizon et avant ces Jeux, l'intérêt doit passer obligatoirement par les compétitions continentales et internationales durant les quatre prochaines années. Notre objectif est aussi de développer le mode de gestion et d'encadrement de l'élite et du haut niveau spécialement. Il faut utiliser tous les moyens scientifiques dans la préparation des athlètes. Tout cela ne peut se faire qu'avec l'amélioration matérielle et sociale des athlètes et de leurs encadreurs techniques. Ces derniers doivent suivre des stages de recyclage et de formation permanents. D'autre part, nous ne pouvons parler de sport qu'avec une infrastructure adéquate aux normes internationales. La révision du cadre légal du sport s'impose plus que jamais. Tous ces chantiers ne peuvent être réussis sans l'union sacrée entre le Cnot, le MJS et les fédérations nationales. Comment jugez-vous les relations du Cnot avec les fédérations nationales ? Les rapports sont excellents avec toutes les fédérations, surtout après les dernières élections. Nous jouissons d'un climat de confiance et de transparence totale. Le Cnot et les fédérations doivent écrire ensemble une nouvelle page de l'histoire du mouvement sportif et olympique national. Si nous sommes encore en place, c'est grâce à la confiance des fédérations. Personnellement, je me sens impliqué et au service de toutes les fédérations pour qu'elles s'acquittent convenablement de leur mission. Un lourd fardeau Pourtant, les choses ne tournent pas rond avec la FTF. Vous en convenez ? Wadii Jery est un président de fédération intelligent. Je pense qu'il va tirer les bonnes conclusions des dernières élections du Cnot. Le football est devenu un fardeau lourd à gérer uniquement par la fédération, vu les dangers collatéraux en rapport avec cette discipline qui commencent gravement à dégénérer. Ce problème est à traiter par toutes les parties concernées, le MJS, le Cnot et la FTF. Wadii Jery a été prévenu. J'espère qu'il est maintenant disposé à collaborer. Et les relations du Cnot avec le MJS, comment vont-elles ? Il y a de la bonne volonté. Il faut que la tutelle comprenne que le traitement des dossiers est un travail en commun entre le MJS et le Cnot, pour le bien du sport national. Il y aura plus de visibilité dans les prochains jours. Pouvons-nous voir d'autres athlètes médaillables à Tokyo ? Il y a des conditions à cela. Il faut améliorer, et je le répète, l'infrastructure, maintenir la commission mixte de préparation des athlètes et la doter de tous les moyens de fonctionnement. Pour demander des médailles aux athlètes, il faut leur donner des moyens. La relève existe-t-elle d'ici aux prochains Jeux olympiques ? Nous avons des champions olympiques confirmés. Les Oussama Oueslati, Marwa Amri et Inès Boubakri seront présents à Tokyo. Pourquoi certaines fédérations ont la préférence du Cnot au niveau du budget alloué. Nous pensons à celles du tennis et du judo... Il n'y a rien de vrai à cela. L'exemple le plus flagrant est celui de Malek Jaziri. Il a reçu une subvention de 25.000 dinars de la part du MJS au moment où il est en train d'écrire en lettres d'or l'histoire du tennis tunisien et de grimper à l'échelle mondiale. C'est honteux ! C'est au ministère de traiter les fédérations sur un pied d'égalité. Les athlètes ciblés ont besoin d'un programme de préparation établi selon des critères définis par les techniciens et les spécialistes des sciences du sport. Cela nécessite un budget adéquat. Pour terminer, la ville de Sfax pourrait-elle être relancée pour l'organisation des Jeux méditerranéens ? Nous soutiendrons toujours la ville de Sfax pour l'organisation d'une édition des Jeux méditerranéens. Ces jeux sont le moteur du développement régional. J'encourage toujours une ville comme Sfax de relancer sa candidature en 2025, après les Jeux africains de 2023.