L'examen par la commission parlementaire de la législation générale du projet de loi portant sur la réconciliation économique et financière a été de nouveau reporté hier. Plusieurs séances ont été ainsi, de manière impromptue, annulées et reportées à une date ultérieure, traduisant la persistance, au sein de l'ARP, au niveau des partis politiques et de la société civile, des divergences et des clivages autour de la question de la réconciliation avec les responsables administratifs et les hommes d'affaires influents sous l'ancien régime La réunion portant sur l'examen du projet de loi de réconciliation nationale, annoncée par le directeur exécutif de Nida Tounès le 23 mai dernier, jour de l'arrestation d'un des plus grands hommes d'affaires, Chafik Jarraya, et de sept autres grands contrebandiers, a été reportée à mercredi prochain 7 juin. Nida Tounès aurait de nouveau revu sa copie suite aux récents événements qui ont marqué le déclenchement de la guerre contre la corruption. Le président de la commission de la législation générale à l'Assemblée des représentants du peuple et député Nida, Taïeb Madani, a expliqué hier que son parti veut introduire des modifications au projet de loi pour ne plus concerner que les fonctionnaires. Il s'agit là d'un revirement décisif dans l'attitude des nidaïstes à l'égard du projet de réconciliation économique et financière qui touchait jusqu'à hier également les hommes d'affaires. Les affaires de corruption, que nul n'ignorait, mais qui ont maintenant éclaté au grand jour ont permis de constater que la plateforme d'opposition au projet de loi sur la réconciliation économique et financière avec les hommes d'affaires et les hauts cadres administratifs de l'ancien régime s'est élargie et renforcée. Le mouvement d'adhésion populaire à cette dynamique gouvernementale montre, sans détour, qu'un bon nombre de Tunisiens sont attachés à la reddition des comptes avec tous ceux qui sont responsables de crimes économiques. La grande satisfaction de l'ensemble de l'opinion publique et d'une bonne partie de la classe politique et de la société civile a conduit de fait à la question : l'examen du projet de loi sur la réconciliation économique et financière est-il toujours opportun, est-il toujours possible maintenant ? Devant le siège de l'ARP, hier, le mouvement «Manich Msameh» observait un sit-in pour marquer sa franche opposition au projet de loi sur la réconciliation et exiger son retrait par le gouvernement. Aujourd'hui que le dossier de la corruption est ouvert, et qu'il est même, selon diverses sources, lié à la contrebande d'armes et aux renseignements avec une armée étrangère menaçant la sûreté de l'Etat, il devient difficile de parler de réconciliation sans reddition des comptes dans la transparence.