Ce qui se passe dans nos établissements scolaires depuis ces deux ou trois dernières années est inédit. Parents, élèves et enseignants sont déboussolés à cause des perturbations ininterrompues qui marquent le déroulement des études et la bonne marche des programmes. Ce phénomène dévastateur ne cesse de s'amplifier sans que personne ne s'y intéresse. Cette année scolaire le montre clairement. D'aucuns s'étonnent, en effet, de voir les élèves (du primaire, du moins) déjà en vacances. Normalement les cours ou d'autres activités (examens, correction des devoirs, etc.) devraient se poursuivre au cours du mois de juin. Le pré carré des syndicats ! Leurs camarades collégiens, eux aussi, ont quitté de façon prématurée leurs établissements. Certains avaient terminé leurs devoirs de synthèse plus tôt que prévu. Tout semble avoir été bousculé, bâclé même. De nombreux parents déplorent le fait que les programmes n'aient pas été achevés en raison, comme on le devine, des grèves, des absences des enseignants et à d'autres facteurs. Ce cumul de contreperformances pèse lourd sur les acquis de nos élèves et cause beaucoup de torts au niveau et à la qualité de notre enseignement. Selon un rapport du ministère de l'Education, l'absentéisme des enseignants représenterait près de 2 millions de journées perdues. Soit 1,8% de la masse salariale et 0,6% d'impact sur le budget. Mais ce qui a le plus lésé le système c'est cette déstabilisation constante au niveau des prises de décisions. On a vu le ministère de l'Education en perpétuelle querelle avec les deux syndicats de l'enseignement. Le premier représentant le Syndicat général de l'enseignement de base (Sgeb) et le second le Syndicat général de l'enseignement secondaire (Sges). Ces deux structures passent leur temps à s'opposer, automatiquement, à toutes les mesures et décisions prises par les autorités. Au point que les élèves et leurs parents ne savent plus ce qu'ils doivent faire et quelles directives suivre. Devant l'incapacité de débloquer la situation, les choses ont empiré et la qualité de l'enseignement a chuté. Le laisser-aller pédagogique s'est, alors, propagé. Du coup, le doute s'est installé chez les parents d'élèves. Ils n'ont plus confiance dans le secteur public. Ils pensent, de plus en plus, qu'on est en train de le saper pour les obliger à choisir le privé. C'est, justement, ce que l'on constate. La « migration » vers l'enseignement privé s'affirme chaque jour davantage. Si, avant, on se limitait au primaire, aujourd'hui, des collèges privés s'implantent partout et attirent tous les déçus du public. Le niveau est, nettement, supérieur. La discipline y est plus respectée et les parents ont un droit de regard sur ce que reçoivent leurs enfants. Ce qui n'est plus le cas dans les établissements étatiques où on ne sait plus qui «commande» ou qui gère. Libérons l'école Si on observe le rendement du privé, force est de constater qu'il devance, de loin, celui du public. Les résultats du concours d'admission dans les collèges pilotes montrent que le taux est plus élevé dans le privé. A titre d'exemple, il avait frôlé les 90% (89,69%) en 2012. La moyenne dans le public était de 51,57% au cours de l'année dernière. Ce qui laisse un espoir, c'est que la meilleure moyenne est détenue par une lauréate du public : 19,25 / 20. C'est ce qui pousse les internautes à se déchaîner sur les réseaux sociaux (il n'est que de voir le site officiel du ministère de l'Education ou celui de l'Ugtt) pour constater leur indignation. Ils ne s'empêchent pas de s'en prendre aux syndicats qu'ils jugent trop envahissants et bloquent le travail du ministère. Ils dénoncent la mainmise de ces organisations sur la politique de l'enseignement. Ils en appellent à la constitution d'un «collectif» de défense de l'Ecole publique contre les dérives idéologiques, politiciennes, syndicales ou autres. En un mot, la neutralité de l'institution publique. Que ceux qui ont des agendas particuliers choisissent d'autres terrains de combat. Toujours est-il que le bon sens oblige à revoir de fond en comble les abus des uns et des autres depuis au moins trois ou quatre ans pour redonner un nouveau souffle à notre système éducatif et lui permettre de rattraper, un tant soit peu, les graves lacunes et retards accumulés. Car avec ces agissements, on ne fait qu'encourager le secteur privé. Ces syndicats qui disent défendre l'école publique conduisent à l'inverse. Ils favorisent (inconsciemment ou délibérément) la fuite vers le privé. Ce dernier n'attend que cette occasion. Et, il a raison d'en profiter puisqu'il ne cesse d'améliorer ses performances grâce à son sérieux et au travail de ses cadres. Dans le public, au contraire, tout dégringole. Les responsables des établissements sont, presque, des fantoches. Ils ne sont pas capables d'agir comme ils l'entendent. Si d'aventure, ils s'avisent de faire respecter la discipline et la bonne marche de l'institution ou s'ils prennent des sanctions pour manquement avéré aux devoirs, ils sont vite vilipendés. Des grèves et des « dégage» sortent des chapeaux des «gardiens» des droits et par des «défenseurs» patentés d'on ne sait quelle logique. C'est ce qui pousse la majorité des directeurs d'établissements à laisser faire, voire laisser pourrir. Devant cette situation, la majorité silencieuse et les parents demeurent impuissants. Ceux qui ont les moyens choisissent les écoles primaires et les collèges privés. Ceux qui n'en ont pas, acceptent leur sort en priant que des vents favorables viennent les sortir de l'impasse.