Mohamed Hammadi Jarraya, expert en économie, nous explique les effets du déblocage de la deuxième tranche du crédit octroyé par le FMI à la Tunisie qui s'est engagée à effectuer des réformes au niveau de plusieurs secteurs comme ceux de l'administration, de la fiscalité et du système financier Quelle est l'importance du déblocage de la deuxième tranche du crédit du FMI ? Accordé pour réduire le déficit budgétaire (6% du PIB pour 2016), le crédit global du FMI est appelé à « sauver » l'équilibre des finances publiques de façon générale. En outre, la décision de débloquer la deuxième tranche (pour 2017), sur avis favorable du comité d'experts du FMI en charge du suivi du dossier tunisien, signifie que le gouvernement avance bien dans l'exécution des réformes exigées par le FMI. C'est un signe rassurant de soutien et de progrès. L'invitation de la Tunisie dans les forums des grands (7, 8 et 20) est un indicateur très positif. Saurons-nous lever le bon défi par le travail et l'abnégation ? Le FMI a recommandé à la Tunisie de ne pas dépasser un taux d'endettement de 70% à l'horizon 2020. Pensez-vous que ce taux est excessif ? Nous mesurons l'importance du taux d'endettement d'un pays par rapport à sa capacité de créer de la richesse (la croissance économique) et d'honorer ses engagements qui en découlent (paiement des échéances). Actuellement, avec une faible croissance (2%), même 50% d'endettement c'est beaucoup. Cependant, nous n'avons pas d'autres choix que d'avancer en parallèle : endettement bien encadré et impulsion de l'économie. Les 70% sont un plafond fixé par le FMI. Cet objectif de sécurité est imposé par la situation actuelle et les défis. A mon avis, si la dynamique économique reprenait rapidement, pour atteindre 6% d'ici 2020, ce taux pourrait être réduit sensiblement. La deuxième tranche du crédit du FMI où devrait-elle être dépensée ? La priorité serait pour la relance de l'économie : infrastructures et projets productifs. Cependant, le budget est un ensemble cohérant devant atteindre l'équilibre entre dépenses et ressources, toutes catégories confondues. Il ne faut pas perdre de vue l'objectif vital de réduire la masse salariale dans le budget qui représente presque 15% du PIB, un taux des plus élevés au monde. Tout effort de compression des dépenses, qui entraîne une baisse de la demande de consommation, doit être accompagné par une véritable relance économique. A défaut, la compression aura des impacts plutôt négatifs sur les marchés. Le grand défit pour le budget 2018 serait de trouver des ressources fiscales autres que la contribution conjoncturelle exceptionnelle imposée, une seule fois, sur 2016 pour le budget 2017. On commence à parler d'augmentations de la TVA. La pression fiscale risque de s'aggraver pour atteindre 30%. Les investissements locaux et le pouvoir d'achats souffriront.