«Une baisse de l'aide sécuritaire et économique US à la Tunisie risque d'envoyer un message négatif aux organisations terroristes sur la promptitude des forces de sécurité». «Nos réussites contre les terroristes plaident en notre faveur pour que notre pays ait droit à un traitement spécifique de la part des Etats-Unis». C'est le plaidoyer que soutient Youssef Chahed, chef du gouvernement, à l'adresse des Américains qui comptent réviser à la baisse leurs aides militaires à leurs partenaires dans la guerre antiterroriste Le secrétaire d'Etat américain à la Défense a salué l'engagement inconditionnel de la Tunisie dans la guerre contre le terrorisme et son implication, en sa qualité de partenaire actif, dans le combat contre Daech «Désormais, la Tunisie a le devoir de se prévaloir d'une bonne expérience en matière de lutte contre le terrorisme, et les Américains n'ont pas manqué de nous féliciter pour les réussites réalisées par notre pays et pas uniquement dans les domaines sécuritaire et militaire dans la mesure où notre approche est multidimensionnelle». Ce sont là les propos tenus, hier, par Youssef Chahed, chef du gouvernement, à l'issue de ses entretiens avec James Mattis et Steven Mnuchin, secrétaires d'Etat américains respectivement à la Défense et au Trésor, entretiens qui ont marqué la deuxième journée de sa visite d'amitié et de travail aux Etats-Unis. Et Youssef Chahed d'être encore plus précis en soulignant: «La Tunisie est disposée à adhérer à toute alliance contre le terrorisme. Nous sommes en première ligne dans la lutte internationale déclarée contre le terrorisme et l'extrémisme. Nos réussites engrangées jusqu'ici face aux semeurs de mort plaident en faveur de la Tunisie qui a le droit d'être considérée comme un partenaire incontournable dans la lutte du monde libre et démocratique contre les terroristes». L'engagement inconditionnel de la Tunisie dans le combat contre Daech et ses satellites est salué à sa juste valeur par le secrétaire américain à la Défense, James Mattis. Le responsable américain se félicite, en effet, de l'implication de la Tunisie dans la guerre contre les terroristes en «sa qualité de partenaire actif» et aussi pour sa bataille contre la corruption et la contrebande. Il a insisté sur la disposition de Washington à «renforcer davantage sa coopération militaire et sécuritaire avec la Tunisie et à continuer de soutenir le processus tunisien de transition démocratique». Voici pour les déclarations officielles faites aux médias qui traduisent la convergence de vues de Tunis et Washington quant à la lutte commune que les deux pays mènent contre les terroristes qui peuvent toujours frapper n'importe où, n'importe quand, même si leur défaite cuisante en Irak et la déconfiture qu'ils vivent en Syrie et en Libye ont réduit considérablement leur capacité de nuisance. Il reste qu'il existe une certaine différence entre les déclarations officielles et la volonté déclarée de la nouvelle administration américaine de baisser ses aides militaires aux pays qui sont en guerre contre le terrorisme, y compris la Tunisie, qui a surmonté, selon certains collaborateurs de Donald Trump à la Maison-Blanche, «les moments critiques dans sa lutte contre le terrorisme». En plus clair, serait-ce en raison de sa réussite à s'imposer comme le seul modèle démocratique dans les pays du «printemps arabe» et grâce aussi au professionnalisme de ses forces armées et de sécurité, que la Tunisie n'a plus besoin d'une assistance américaine militaire et sécuritaire aussi poussée que lors des premières années de la révolution ? Sauf que cette approche ne fait pas l'unanimité au sein des cercles proches du Pentagone et de la Maison-Blanche et aussi au sein des instituts d'études stratégiques qui ont leur part dans l'élaboration de la politique américaine et qui peuvent pousser Trump et ses conseillers à revoir leurs plans. Ils estiment que «baisser les aides militaires servies aux pays aux postes avancés dans la guerre contre le terrorisme, dont la Tunisie, peut constituer une grande menace pour les intérêts des Etats-Unis dans la région de l'Afrique du Nord». Et certains autres responsables au département d'Etat américain qui ne sont pas totalement acquis aux thèses de Donald Trump tirent la sonnette d'alarme et vont jusqu'à affirmer que «rien ne peut empêcher nos partenaires et alliés traditionnels de chercher ailleurs les aides qu'on leur refuse, c'est-à-dire auprès de la Russie et de la Chine». S'agissant de la Tunisie, ne peut-elle pas tirer profit de sa crédibilité, de son statut d'allié majeur non membre de l'Otan et des relations privilégiées qu'elle a toujours entretenues avec les groupes de pression et les lobbies américains ? Un message négatif aux terroristes Comme à son habitude, Youssef Chahed a tenu à ses interlocuteurs américains un discours de franchise, d'audace et de courage. Il a notamment souligné : «Toute révision à la baisse de l'aide sécuritaire et économique à la Tunisie risque d'envoyer un message négatif aux organisations terroristes quant aux capacités et à la promptitude des forces sécuritaires et militaires tunisiennes». A propos de la crise libyenne, il a insisté sur l'initiative du président Caïd Essbesi et sur le rôle de la Tunisie «comme allié stratégique incontournable sur ce dossier».