Kalthoum Badreddine : « La commission du règlement intérieur, de l'immunité, des lois parlementaires et des lois électorales a voté presque à l'unanimité pour que le bureau de l'assemblée ait son mot à dire dans les nominations administratives » L'ouverture hier des travaux de l'assemblée a été marquée par une action de protestation d'une partie des fonctionnaires du parlement qui s'opposent à l'amendement proposé dans certains articles du règlement intérieur et qui touche directement à leur carrière professionnelle. En effet, l'amendement, s'il est voté en plénière, prévoit que les nominations aux postes administratifs deviennent l'une des prérogatives du bureau de l'assemblée. Le bureau où, rappelons-le, siègent les représentants des groupes parlementaires majoritaires. « Nous refusons l'amendement des articles 3 et 48 du règlement intérieur, déclare Lamjed Guizani, secrétaire général adjoint du syndicat de base des salariés de l'assemblée. Ces amendements sont en totale contradiction avec l'article 15 de la constitution sur la neutralité de l'administration. Nous voulons que l'administration reste au-dessus des tiraillements politiques ». Guizani affirme être soutenu par la centrale syndicale, l'Ugtt, et prévient : « Si nos revendications ne sont pas entendues, nous allons vers une escalade ». Ce que craignent les protestataires, c'est de voir leurs carrières administratives devenir l'otage de leurs affinités avec les partis puissants et influents de l'assemblée. « La vraie question est de savoir s'ils veulent que leurs carrières soient aux mains d'une seule personne ou bien d'un bureau aux opinions diverses », leur répond Kalthoum Badreddine, présidente de la Commission du règlement intérieur, de l'immunité, des lois parlementaires et des lois électorales. Jusqu'à présent, les décisions de nommer tel ou tel fonctionnaire à un poste relèvent exclusivement du président du parlement « Il y a eu un vote presque unanime à l'intérieur de la commission pour que le bureau de l'assemblée ait son mot à dire sur la question, précise Kalthoum Badreddine. Le bureau de l'assemblée délibère, mais le dernier mot reviendra toujours au président ». La présidente nie toute tentative de politiser l'administration. Selon elle, plusieurs conseillers parlementaires ont même soutenu cet amendement, car ils étaient lésés par la toute puissance du président du parlement. Une volonté d'affaiblir le président ? L'une des dispositions de l'amendement qui sera proposé au vote vise à mieux répartir et délimiter les prérogatives entre le président de l'assemblée et ses assesseurs. Le projet d'amendement prévoit ainsi, dans l'article 57, de préciser de manière exhaustive les tâches de chaque assesseur. Jusqu'ici, ces derniers n'avaient pas de fonctions claires. « On ne pouvait pas continuer ainsi », lance Habib Khedhr, membre de la commission. Dans les coulisses et depuis le début des débats à l'intérieur de la commission, il se disait que le but de ces amendements était d'isoler le président de l'assemblée, de limiter son pouvoir. Augmentation du nombre de commissions « Il semble que le président ait cette angoisse de perdre de ses prérogatives, mais il n'y a aucun fondement à cette crainte, répond Habib Khedhr. L'objectif est de rendre l'ARP plus performante, plus démocratique, plus transparente et mieux organisée ». Mieux encore, selon lui, un amendement devrait être déposé en séance plénière par un certain nombre d'élus qui proposent d'élire un président de parlement à chaque nouvelle session. D'un autre côté, dans le but d'accélérer l'examen des multiples projets de loi, la commission a choisi de proposer une augmentation du nombre de commissions permanentes, afin que les projets de loi trainent moins dans les tiroirs avant d'atterrir dans les commissions. « Il s'agit en gros d'alléger le travail de la commission de législation générale, celle de l'agriculture, droits et libertés en créant de nouvelles commissions », explique Khedhr. Une décision qui, de manière mécanique, entraînera la diminution du nombre de parlementaires par commission. Certains autres amendements proposent par ailleurs d'exempter les commissions de l'obligation d'un quorum lorsqu'il n'y a pas de vote. Pour sa part, l'association Bawsala a critiqué l'absence d'une réelle fermeté dans la répression de l'absentéisme à l'intérieur des commissions et lors des séances plénières. Hier à l'hémicycle, le député d'Ennahdha Habib Khedhr a accusé certaines parties de vouloir empêcher le vote de l'amendement du règlement intérieur, en vue de garder un statu quo, contrairement au mouvement Ennahdha qui paraît le plus motivé pour cet amendement. Avec une majorité confortable de députés, le groupe parlementaire nahdhaoui cherche à augmenter son influence au sein de l'ARP, présidée par un nidaiste.