Par M'hamed JAIBI La Tunisie est toujours à l'heure de la crise économique et des caisses béantes d'un Etat providence qui n'en a plus les moyens. Et, encore une fois, la croissance de la masse salariale risque d'hypothéquer les investissements publics destinés au développement, aussi bien national que régional. Le fait est qu'alors que la future Loi de finances mériterait de voir toutes les forces vives du pays unir leur génie à identifier des voies de sortie innovantes, l'on assiste de nouveau à une ruée des ambitions partisanes à l'encontre du gouvernement et réclamant son remaniement. Le prétexte chevauché par diverses voix, pourtant si disparates, à l'Assemblée autant que sur l'ensemble de la scène politique, se trouve être la «défense de la souveraineté nationale» vis-à-vis des mesures suggérées par la Banque mondiale et le FMI. Comme la privatisation de certaines banques d'Etat et entreprises publiques, l'allégement de la compensation et un dégraissage au niveau de la fonction publique, de même qu'une réforme conséquente des caisses sociales dont le déficit pèse lourdement sur le budget de l'Etat. Les «opposants purs et durs» Les «opposants purs et durs» à toutes les réformes réalistes pouvant sauver les finances publiques parlent, haut et fort, de renoncement aux biens publics et de trahison à l'égard de la souveraineté nationale, mais aucun ne produit de propositions alternatives réelles, autres que la lutte contre la corruption et la fraude fiscale, laquelle est bel et bien engagée par Youssef Chahed, mais qu'il s'agit de manipuler avec doigté, dans la stricte légalité, pour ne pas la compromettre.. Et ces «opposants purs et durs» se recrutent dans plusieurs courants et tendances, parfois aux antipodes les uns des autres, ce qui perturbe la cohérence et la pertinence du débat parlementaire et national. D'où l'incompréhension que rencontrent ces discussions orageuses, souvent populistes et démagogiques, auprès de l'opinion publique. Des mesures courageuses s'imposent Car le pays et l'opinion attendent, plutôt qu'un hypothétique remaniement gouvernemental, des mesures bien concrètes ayant des chances de redonner du souffle aux finances de l'Etat, de permettre aux pouvoirs publics de respirer. Surtout que ces derniers sont désormais pleinement engagés dans une guerre d'usure contre la corruption, la contrebande, le commerce parallèle et le terrorisme. En plus de toutes les réformes de fond exigeant d'importants moyens comme la réforme de l'administration dans le sens de la bonne gouvernance, de la transparence et de la numérisation. Sans «lignes rouges» L'Ugtt brandit déjà ses inquiétantes «lignes rouges» ayant montré leurs limites, alors que la situation exige plutôt que l'adhésion au Document de Carthage soit entière et effective, non soumise aux aléas politiciens ni de la part des partis ni du fait des centrales socioprofessionnelles. Sachant que le nouveau Pacte social est appelé à poser toutes les problématiques en profondeur. Les mesures de replâtrage ont fait la preuve de leurs limites et appellent désormais à des réformes courageuses, forcément douloureuses, qui nécessitent que l'on mette une sourdine aux dogmes idéologiques, y compris à propos du dégraissage ou de la dénationalisation. Pour sauver le pays.