1.080 médecins dentistes sont actuellement au chômage parmi les 5.000 inscrits au Cnomdt et pas moins de 100 autres médecins dentistes praticiens ont été obligés à mettre la clé sous la porte en raison de difficultés financières . La crise que connaît la médecine dentaire perdure comme en témoigne le dernier communiqué qu'a adressé en juillet 2017 le Conseil national de l'Ordre des médecins dentistes de Tunisie (Cnomdt) aux ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Dans ce communiqué, le Cnomdt a annoncé la mise à exécution de quatre importantes mesures, à savoir son retrait de la commission d'équivalence des diplômes, la non-inscription de tous les médecins dentistes qui ont été réorientés à la Faculté de médecine dentaire de Monastir au Conseil national de l'ordre des médecins dentistes, ce qui les prive de leur droit d'exercer, la limitation des inscriptions des étudiants diplômés à l'étranger à 15 inscriptions pour chaque année universitaire, et celle des diplômés de la faculté de Monastir à 100 inscriptions par an. Des décisions sous la contrainte, selon le Cnomdt Pour revenir sur les raisons de ces décisions, on a contacté le secrétaire général du Cnomdt, M.Salah Ghozzi, qui a expliqué que le Conseil des médecins dentistes a été acculé à prendre ces décisions. Il regrette l'absence de réaction des deux ministères de tutelle pour solutionner cette crise qui n'a que trop duré. Il a rappelé l'accord signé en 2015 entre le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, le Cnomdt, et le Syndicat tunisien des médecins dentistes ainsi que la faculté de médecine de Monastir . Cet accord stipule que le nombre d'étudiants orientés vers la faculté de médecine dentaire ne doit pas dépasser 120 pour les trois prochaines années. Il était convenu aussi que le nombre des réorientés ne dépassera les 15% du nombre total d'étudiants inscrits en première année (pour 2015). M.Salah Ghozzi a ajouté que cet accord s'inscrivait dans le cadre des solutions préconisées pour pallier le problème de l'augmentation du taux de chômage dans le secteur des médecins dentistes. En effet, 1080 médecins dentistes sont actuellement au chômage parmi les 5000 inscrits au Cnomdt et pas moins de 100 autres médecins dentistes praticiens ont été obligés à mettre la clé sous la porte en raison de difficultés financières. Absence de communication avec les ministères de tutelle Le ministère de la Santé et celui de l'Enseignement supérieur ne sont pas en mesure de fournir des information sur le nombre d'étudiants tunisiens poursuivant leurs études à l'étranger (médecine, médecine dentaire....), a-t-il fait savoir, regrettant en même temps l'absence totale de tout contact entre le ministère de l'Enseignement supérieur et le Cnomdt et la non-application de l'accord conclu en 2015.Selon le secrétaire général du Conseil des médecins dentistes, la faculté de Monastir passe par une situation difficile. Il a expliqué que cette faculté peine à assurer la formation de tous les médecins dentistes. Le nombre de ces derniers ne cesse d'augmenter alors que les 2/3 du nombre total des fauteuils dentaires disponibles dans cette faculté (120 au total) sont aujourd'hui défaillants. «Le niveau des études de médecine dentaire en Tunisie est meilleur que celui existant en Roumanie ou en Russie, le cursus universitaire à la faculté de médecine dentaire de Monastir est le même qu'en France et nous avons les meilleurs professeurs universitaires en Tunisie», a tenu à confirmer M.Ghozzi. «Les décisions annoncées dans notre communiqué ont déjà été mises à exécution à partir de ce mois d'août», confirme Salah Ghozzi, qui ajoute que «la balle est dans le camp des ministères de tutelle, surtout celui du ministre de l'Enseignement supérieur qui a refusé de nous rencontrer, ce qui explique que nous nous sommes absentés des réunions des commissions mixtes». Et d'ajouter que les décisions finales ont été prises après l'accord commun conclu entre le Conseil de l'Ordre national et ses Conseils régionaux .Elles visent, en premier lieu, la protection des étudiants de médecine dentaire et le maintien de la qualité des prestations liées à la médecine dentaire dans les années à venir, confie M.Ghozzi. Il a soulevé, à la fin, d'autres problèmes, dont les textes de loi régissant ce secteur qu'il a qualifiés de surannés mais qui sont toujours là. «Il y a également le problème des retards de remboursement avec la CNAM et des subventions prévues pour les médecins dentistes exerçant dans des pays africains», a-t-il ajouté. La voie de l'entente est toujours ouverte assure le ministère de la santé Si le Cnomdt a déjà pris ses décisions, Mme Nabiha Falfoul, directrice générale au ministère de la Santé avec qui on s'est entretenu, a tenu à rassurer les étudiants en médecine dentaire. «On ne peut pas priver ces futurs médecins dentistes de leur droit à l'inscription au Conseil de l'Ordre ni de leur droit sacré au travail», a-t-elle expliqué.Mme Nabiha Falfoul a fait état de la mise en place, depuis janvier dernier, d'une commission mixte entre le ministère de la Santé et celui de l'Enseignement supérieur, coprésidée par les deux directeurs généraux au sein des deux ministères et dans laquelle figurent les représentants de toutes les facultés. Cette commission se réunit une fois par mois pour discuter des sujets communs, échanger les points de vue et relever les propositions aux deux ministres.Les points inscrits dans le communiqué en question du Cnomdt ont été programmés pour la prochaine réunion dont la date a été retardée en raison de la démission du directeur général du ministère de l'enseignement supérieur. Mais cette réunion aura lieu prochainement, rassure M.Nabiha Falfoul. Elle a toutefois regretté de telles décisions de la part du Cnomdt qui «peuvent semer la panique» chez nos jeunes. Elle a insisté sur la nécessite d'échanger les avis sur les questions restées en suspens, telles les promesses qui ont été faites pour réduire le nombre d'inscrits (allusion à l'accord de 2015),et ce, dans le cadre de cette commission mixte.En ce qui concerne les diplômés de l'étranger, il faut mettre en place des critères stricts d'équivalence et d'évaluation «pour qu'à travers les mailles du filet ne passent que les personnes réellement compétentes qui assureront leurs rôles à l'échelle nationale et régionale», a-t-elle souligné. Et d'ajouter qu'il ne faut pas qu'on prive ces personnes de leur droit à l'inscription et leur droit au travail. Il faut attendre donc les tractations entre les deux ministères pour la prochaine réunion de la commission mixte afin de trouver un terrain d'entente. Elle devrait se tenir en septembre prochain. «La voie de la discussion et de l'entente est encore ouverte pour la prise de mesures communes», tient-elle à confirmer.En ce qui concerne l'affaire de corruption liée à des pots-de-vin versés par des étudiants étrangers parmi lesquels des Tunisiens à des professeurs d'une faculté roumaine, Mme Nabiha Falfoul explique que cela concerne la médecine générale et non la médecine dentaire et que cela n'a concerné que deux Tunisiens. L'enquête est actuellement en cours. «Nous allons nous renseigner sur tous nos diplômés au cas par cas», rassure-t-elle.