Dans le cadre des rencontres qu'il organise chaque semaine, depuis de longues années, sous forme de tables rondes animées par Hatem Bourial, le club Tahar-Haddad invitait lundi dernier l'artiste plasticien Mourad Harbaoui, le peintre du moment dont l'ascension a été fulgurante, sur le plan artistique et comme valeur marchande. Peu de public, mais une assistance avertie quand même, avec des représentants des domaines de la poésie, de la musique, des médias et même de la peinture, en les personnes de Brahim Azzabi et de l'épouse de l'artiste invité, elle-même plasticienne et enseignante en beaux-arts. Appuyés par une projection en boucle de ses œuvres et par une mini-exposition (sur chevalets) d'autres, tout ce qu'il y a de plus récent, les débats ont porté sur les sept dernières années uniquement du parcours de Harbaoui, soit après son retour définitif en Tunisie. Nous aurons, malgré tout, (ré) appris, au cours de cet après-midi-là, que notre bonhomme a attrapé le virus du dessin de son oncle, portraitiste, qu'il s'est senti, très jeune, destiné aux crayons et aux couleurs et que c'est là la raison pour laquelle il a suivi une formation poussée à l'école de feu Safia Farhat, avant de se jeter à l'eau et de se consacrer à sa vocation. Il s'essayera, tour à tour, au figuratif, à l'impressionnisme puis à l'abstrait, avant de découvrir sa voie qui lui vaudra, très vite, reconnaissance et multitude d'expositions ici et ailleurs, dans des galeries des plus prestigieuses, dont celle de Robert Four de Paris où il fut le seul peintre tunisien à voir deux de ses tableaux reproduits en tapis, à l'instar de plasticiens mondialement réputés. Avec une démarche propre, où le semi-figuratif flirte avec un semblant d'abstrait, ses formes prennent souvent l'apparence de silhouettes, tantôt accomplies, tantôt inachevées, mais toujours vivantes et en mouvement, quelle que soit l'impression qu'elles dégagent: de paix ou de déchaînement, de fierté ou de soumission. Sa palette où les tons du rouge et de l'oranger cohabitent allègrement avec les différents degrés du bleu et du gris, reflètent dans tous les tableaux une spontanéité allègre, un pinceau léger et libre (libéré serait plus adéquat) qui a laissé aux formes le temps de jaillir du fond de la toile, dans un foisonnement idoine de couleurs. Travaillant à partir d'une idée déterminée (souks, un instant d'intimité…), le peintre y échappe souvent, apportant des modifications et des ajouts instinctifs, nés de l'inspiration du moment. Résolument moderne et chantant la vie, la peinture de Mourad Harbaoui est poignante par l'harmonie, la force des couleurs et la quiétude qu'elle dégage, même lorsque le sujet-prétexte évoque le tumulte. Ceux qui n'ont pas encore eu l'occasion de voir ses tableaux peuvent le faire à Art Libris où il expose à partir du 21 octobre, en compagnie de Brahim Azzabi, Walid Zouari et deux autres peintres irakiens.