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«Les artistes tunisiens sont insuffisamment présents sur les scènes internationales»
Entretien du lundi avec Sophie Renaud, Directrice de l'Institut Français de Tunisie
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 11 - 2017

Nouvelle directrice de l'Institut français, Sophie Renaud, nommée début septembre, avoue d'emblée qu'elle est venue en Tunisie non pas par mobilité professionnelle, mais par choix personnel, «un choix du cœur», tient-elle à préciser. Tout au long de sa carrière, elle a travaillé comme directrice de la culture à l'Institut français à Paris. Sa mission était de rencontrer et d'identifier à travers le monde les projets culturels forts, mais aussi de valoriser et renforcer la présence des artistes français dans les rendez-vous internationaux. Elle a été chargée de développer pendant quinze ans un programme important du nom d'«Afrique en créations» qui avait pour vocation d'accompagner les acteurs culturels du continent africain, qu'elle connaît bien, dans leur développement localement et à l'international. Aujourd'hui, Sophie Renaud nous livre les grands axes de la nouvelle programmation de l'Ift à travers une vision générale qu'elle détaille avec force arguments. Entretien.
Quels sont les fondamentaux du fonctionnement de l'Ift ?
L'Ift est un lieu qui a la chance d'être situé au centre-ville avec un beau bâtiment, un outil de travail assez formidable. Pour que cet outil fonctionne, il doit œuvrer en symbiose avec le tissu culturel local. Les projets qu'on y développe doivent être pensés dans un dialogue avec les acteurs culturels du terrain dans tous les champs. Il faudra aussi que cet outil s'adresse de manière la plus large possible à la population tunisienne. En outre, la Tunisie est un pays dans lequel se déploie une dynamique sur les plans culturel et éducatif n'existant que dans peu d'endroits au monde. La société civile y est très active. C'est une richesse que d'avoir des interlocuteurs de la nature de ceux qu'on peut trouver ici pour construire des projets.
Le public qui suit les activités de l'Ift est catégorié ou bien vous touchez toutes les couches sociales et les tranches d'âge ?
Ma volonté est de toucher le plus largement toutes les couches sociales et les tranches d'âge. La particularité de la population, c'est la place qu'occupe la jeunesse. C'est la raison pour laquelle je pense à des projets qui mobilisent cette jeunesse dans les domaines des musiques électroniques, du jeu vidéo, des nouvelles technologies et une certaine forme de cinéma. On connaît la place qu'occupe le numérique dans la vie quotidienne de tous et spécialement auprès des jeunes.
Quels sont les grands axes de la nouvelle programmation ?
L'Ift est un lieu où tous les secteurs artistiques peuvent se retrouver. Le débat d'idées y figure en bonne place. Cela pourrait être autour d'un film. A titre d'exemple, samedi dernier au cours de l'avant-première du film «La belle et la meute», a eu lieu un très intéressant débat avec la réalisatrice Khaouther ben Hania et les associations qui ont soutenu la vraie Meriem dont l'histoire a inspiré le film. Le débat était très émouvant avec ces femmes, partant du fait que le film représente un moment particulier de l'histoire de la Tunisie. Il y en a une qui a même dit : «Quand on voit ce film, on comprend qu'il y a eu une révolution en Tunisie». Et pour cause, jamais il n'aurait pu être réalisé avant. Telle est notre mission ; ouvrir des espaces de dialogue. Par ailleurs, au mois de janvier, «La Nuit des idées» s'étendra au-delà de l'Ift dans différents points d'ancrage avec des partenaires tunisiens, des personnalités franco-tunisiennes et des artistes qui proposeront des programmes autour de la thématique «l'imagination au pouvoir». «Les toits sonores» est un rendez-vous qui se tient une fois par trimestre sur la terrasse de l'Ift, autour d'une soirée de musique électronique avec le festival E-Fest. Au mois de mars, pour la journée du 8 mars, nous envisageons un grand rendez-vous. L'année dernière, Christiane Taubira avait créé l'événement. Nous allons également développer un volet cinématographique important avec le Cnci, qui porte le nom l'«Etoile de mer». Cet événement qui se tient au mois de juin autour du cinéma de la Méditerranée aura pour mission de développer des rencontres avec les professionnels du cinéma tunisien et international. Ce sera également un grand moment populaire, puisque nous avons prévu d'inviter le public massivement sur les plages à Hammamet, à La Goulette, à Nabeul, à Bizerte pour venir découvrir des films. Nous allons ainsi ponctuer l'année de moments importants.
Si vous nous parliez de l'événement en cours, le Novembre numérique ?
Novembre numérique est un événement qui s'étale du 1er au 30 novembre. Ouvert au public et gratuit, il permet à tous ceux qui s'interrogent sur le numérique et qui ne sont pas forcément à l'aise avec ces outils, ou alors au contraire, qui sont de vrais geek de venir découvrir toutes les nouvelles innovations. Des ateliers installés permettent aussi bien de découvrir comment utiliser une tablette que d'apprendre à coder et à créer des jeux vidéo. Il y a surtout cet espace d'expérimentation autour de la réalité virtuelle que nous avons ouvert au public dans le hall de l'Institut, tous les jours de 14h00 à 18h00, pour vivre l'expérience de la réalité augmentée. Il s'agit d'une action qui consiste à mettre une lunette sur la tête dans laquelle est projeté un film à 360° ou un spectacle. Le spectateur peut être à tous les endroits en même temps. Selon la manière dont on tourne la tête, à gauche, à droite, en haut, derrière, on est au cœur du plateau comme si on était nous-mêmes interprète de cette pièce ou de ce spectacle. On peut être assis à la place d'un musicien ou d'un danseur sur scène ou avec le public ou même à la place du technicien derrière sa console. C'est une sensation très particulière.
En dehors de Tunis, quels sont les rendez-vous importants prévus dans le reste du pays ?
L'Institut français est présent à Sousse et à Sfax. Mais au-delà, nous nous devons d'être présents d'une autre manière. Ainsi, l'Institut français mobile se déplace une fois par trimestre dans huit à dix villes avec un spectacle ou une séance de cinéma, et apportera les contenus culturels, médias, films, livres de la médiathèque numérique. La médiathèque numérique à travers l'outil culture-tech permet aux gens qui sont abonnés à la médiathèque d'être soit abonnés physiques et d'aller retirer un livre, soit de pouvoir faire venir les livres à soi sur son ordinateur. Cet outil permet d'apporter des contenus riches et variés aux gens qui sont éloignés des centres urbains. Mais on ne pense jamais à la culture déconnectée de l'éducation qui est un sujet majeur ici.
Avez-vous défini un projet avec le ministère de l'Education nationale ?
Nous travaillons avec le ministère de l'Education autour d'un sujet qui est important : en 2020, la Tunisie accueillera le Sommet de la Francophonie. Le français est un vrai sujet à cause du recul de la langue. Il y a une inquiétude qui s'exprime. Le français est une langue qui véhicule au-delà des mots, une idée du monde et une façon de penser. Le français détient, en outre, un pouvoir optimisant en termes d'employabilité. Il ouvre les perspectives d'emploi pour beaucoup de gens qui le maîtrisent correctement. Nous sommes en train de mettre en place un grand plan pour renforcer les capacités des enseignants du français et les remettre à niveau pour pouvoir repartir sur de bonnes bases. L'échéance de 2020 doit pouvoir permettre à la Tunisie de montrer que ce challenge de la Francophonie a été pris en main. Les alliances françaises, qui sont de petits pôles culturels, seront déployées dans plusieurs villes comme Gabès, Gafsa, Bizerte, Kairouan, Djerba et dans le Grand Tunis où ouvrira la première alliance d'ici quelques semaines. Ce sont des projets franco-tunisiens portés par des investisseurs tunisiens. Ces outils permettront d'installer dans ces villes des médiathèques et des occasions pour développer des débats d'idées et donner des spectacles.
D'après-vous, les rendez-vous entre professionnels et acteurs culturels tunisiens et étrangers sont insuffisants, de quelle manière ?
Il faudra penser à faire venir en Tunisie les milieux internationaux pour rencontrer la créativité tunisienne ici, et non pas qu'ils la découvrent uniquement lorsque les artistes tunisiens sont invités à New-York ou ailleurs. C'est, à mon avis, un élément qui manque aujourd'hui. Les moments qui se concentrent autour de l'invitation de professionnels étrangers à venir découvrir la scène artistique tunisienne sont rares. J'étais directrice de la culture à l'Institut français à Paris, mon métier consistait à construire des projets avec les acteurs culturels et d'accompagner ces projets. Je connais bien les paysages culturels à travers le monde, ce qui me surprend, connaissant assez bien la dynamique culturelle et artistique tunisienne, c'est que les artistes tunisiens sont insuffisamment présents sur les scènes internationales. Il y a un manque de rayonnement que j'attribue à l'insuffisance d'occasions qui auraient dû se tenir ici en Tunisie, permettant aux artistes locaux de s'exprimer et d'accueillir les artistes et les professionnels étrangers. Je prendrais un exemple très simple, l'Arabie Saoudite qui n'est pas réputée comme étant le pays de la créativité artistique, les Saoudiens ont pourtant créé un rendez-vous à Djeddah qui est une sorte de foire biennale d'art contemporain. Depuis deux à trois ans, les professionnels du monde entier s'y rendent pour rencontrer les artistes saoudiens.
C'est aussi une question de moyens, n'est-ce pas ?
Il y a beaucoup d'argent qui est dépensé sur un certain nombre de festivals tunisiens. Je pense que c'est une question de vision de ce qu'on souhaite projeter. J'ai vu le succès des JCC pour le public, un événement populaire. Mais, outre ces rendez-vous populaires, il faudra penser à ajouter la dimension rencontre des professionnels entre eux. Cela doit s'organiser par anticipation de manière à ce que ces professionnels inscrivent les rendez-vous tunisiens sur leurs agendas.
Nous avons constaté une implication dans les événements nationaux qui ne sont pas forcément organisés par l'Ift, est-ce une stratégie pensée ?
Construire avec les partenaires acteurs en Tunisie, telle est notre stratégie. Nous étions partenaires de Dream city, nous sommes partenaires de E-Fest, le festival des musiques électroniques. C'est important de créer pour le public des rendez-vous fixes pour qu'il se repère. A Tunis, il y a une offre culturelle intéressante, nous sommes situés en face du quatrième Art, à côté du théâtre municipal et des cinémas, il faut qu'on trouve dans cet environnement des projets à faire les uns avec les autres.
La question budgétaire est toujours omniprésente. Avec la nouvelle saison vous seriez contraint de réduire vos activités ou au contraire de les renforcer ?
Nous avons une chance que la Tunisie fasse partie des pays qui sont considérés comme prioritaires par la France. C'est le cinquième pays le plus doté. Nous avons un bon réseau d'institutions, et notamment l'Institut français de Tunisie figure parmi les cinq grands instituts à travers le monde en termes de personnels et de moyens. Ce n'est jamais assez, quand nous souhaitons développer des projets et voulons toujours faire plus. Mais il faut dire que nous sommes dans une période où les budgets ne peuvent croître ni ici en Tunisie ni chez nous. Par contre, nous avons la capacité de créer des rendez-vous majeurs dans lesquels des acteurs culturels peuvent se retrouver et beaucoup de partenaires et de mécènes tunisiens et français peuvent potentiellement nous rejoindre et accompagner financièrement certains de ces projets.
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