Au moment où les Tunisiens ont été informés sur l'identité des casseurs et de ceux qui les manipulent, on se demande ce que Youssef Chahed va faire. Et si le chef de l'Etat prenait tout le monde de court et montrait à ces nouveaux politiciens de gauche ou de droite que dans les moments exceptionnels, il faut prendre des décisions exceptionnelles et fournir au peuple la réponse qu'il espère ? Finalement, Youssef Chahed, chef du gouvernement, a décidé de jouer cartes sur table en répondant clairement à la question qui taraude les esprits des Tunisiens et des Tunisiennes depuis l'éclatement des mouvements de contestation à la suite de la hausse des prix prévue dans la loi de finances 2018. Il s'agit, en effet, de révéler l'identité de ceux qui manipulent ces jeunes qui investissent la rue, à la tombée de la nuit, pour commettre des actes de violence, de pillages et de banditisme en signe de contestation des décisions gouvernementales. Pour Youssef Chahed, les choses sont claires : «Les auteurs des actes de vandalisme et de pillages appartiennent aux réseaux de la corruption, de la contrebande et de la malversation. Leurs objectifs n'échappent à personne : ils cherchent à exercer toutes les pressions possibles sur le gouvernement dans le but de l'empêcher de faire aboutir sa guerre contre la corruption, les corrupteurs et les corrompus». Et le chef du gouvernement de faire exploser la bombe que tout le monde attendait : «Beaucoup de politiciens irresponsables, dont ceux du Front populaire, incitent ces réseaux à descendre dans la rue et à commettre les actes de pillages et de vandalisme ciblant les biens publics et privés et menaçant l'autorité de l'Etat et l'idée même de la République. Seulement, l'Etat est toujours debout et il résistera par tous les moyens légaux à ceux qui cherchent à saper ses fondements». Un discours double Les accusations exprimées par le chef du gouvernement à l'encontre du Front populaire sont venues renforcer les suspicions et les reproches adressés aux députés frontistes et aux leaders du Front par les autres partis, notamment Ennahdha, qui estiment qu'il «est inacceptable que ces mêmes députés votent les dispositions contenues dans la loi de finances 2018 puis appellent les citoyens à descendre dans la rue pour dénoncer les articles de cette même loi et exiger leur annulation». Le discours double qu'on a toujours reproché aux nahdhaouis est de nos jours imputé aux leaders du Front populaire dont le leader même, Hamma Hammami, qui s'est trouvé ces derniers jours dans l'obligation de justifier l'injustifiable, de recourir «aux tirades révolutionnaires des années 60 et 70 du siècle précédent auxquelles personne n'accorde plus d'importance et de répéter à ceux qui veulent encore l'entendre que le Front populaire est prêt à assumer le pouvoir et qu'il dispose des solutions économiques et sociales à même de sauver le pays». Et pas plus tard qu'hier, Hamma Hammami et ses camarades du Front ont tenu une conférence de presse dans le but de répondre aux accusations du chef du gouvernement et pour appeler à la création d'une commission d'enquête formée de compétences indépendantes. «Ces compétences indépendantes et neutres montreront que le document dans lequel les leaders du Front populaire appellent à descendre dans la rue et à protester contre la LF est un document falsifié. Le Front populaire n'entretient aucun rapport avec les réseaux incriminés dans la corruption et la contrebande. Déjà, Ali Laârayedh, Habib Essid et même Mehdi Jomaa nous ont collé les mêmes accusations mais sans pouvoir apporter les preuves qu'il faut». Quel avenir pour le Pacte de Carthage Maintenant que les Tunisiens ont été édifiés sur les réalités des événements qui ont secoué le pays ces derniers jours et qu'ils ont compris que la contestation de la hausse des prix n'est finalement qu'un alibi auquel ont recouru les casseurs et les pilleurs, les questions qui appellent une réponse aussi rapide que possible sont les suivantes : Qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour surmonter la crise ? Le dialogue économique et social dont la tenue a été annoncée à l'issue de la dernière réunion des signataires du Pacte de Carthage est-elle toujours d'actualité ? Les partis politiques qui ont quitté le gouvernement d'union nationale sont-ils toujours habilités à participer aux réunions que tiennent les signataires du Pacte de Carthage? Et si c'est le cas, comment peuvent-ils s'assurer que leurs propositions vont être concrétisées alors qu'ils ne disposent plus de ministres au sein du gouvernement comme c'est le cas pour Al Joumhouri (Iyed Dahmani ayant démissionné du parti tout en préservant son poste ministériel) ou pour Afek Tounès (ses deux ministres et secrétaires d'Etat ont été écartés du parti et restent au gouvernement ?)». Et si le président de la République, Béji Caïd Essebsi, prenait tout le monde de court et montrait à ces nouveaux politiciens de gauche ou de droite que dans les moments exceptionnels, il faut prendre des décisions exceptionnelles.