Le ton monte entre le gouvernement et le Front Populaire, accusé d'avoir nourri de manière irresponsable les protestations, de les avoir mal gérés et d'avoir favorisé les actes de vandalisme qui auraient coûté plusieurs millions de dinars au contribuable. Le parti Ennahdha, souvent cible des critiques de la part du Front, s'en donne à cœur joie et renvoie la balle au parti de gauche, pour lui imputer «la responsabilité politique et morale» des derniers évènements (dixit Zied Laâdhari, ministre du Développement et de la Coopération internationale). La réponse du secrétaire général du Front populaire, Hamma Hammami ne s'est pas fait attendre : «Nous n'avons pas de leçons à prendre, puisque nous, nous n'avons jeté d'acide sur personne». Loin des petites phrases, la responsabilité des frontistes a été pour la première fois évoquée de manière claire et officielle par le chef du gouvernement Youssef Chahed, en visite à El Battan, pour constater les dégâts d'une nuit d'émeutes. Certaines informations accablent le parti, sans forcément le mettre directement en cause. L'arrestation de trois membres du bureau local du Front à El Gtar sème le doute. La justice les suspecte en effet d'avoir apporté un «soutien» aux émeutiers. Mais en l'absence de preuves tangibles, les trois dirigeants ont été libérés. Est-ce suffisant pour faire porter le chapeau à la gauche ? Pas si sûr, puisque dans certaines régions, les actes de vandalisme ont touché le Front populaire. A Siliana, ville natale du Leader du Front Hamma Hammami plus exactement Laaroussa, le bureau Front populaire a été brûlé. Aujourd'hui, Jilani Hammami, député et l'un des leaders du Front populaire, estime que le parti a été la cible d'une chasse aux sorcières, savamment orchestrée. «Il est évident que le but principal de cette manœuvre est de détourner l'opinion publique du vrai débat, celui de l'aggravation de la détresse sociale», nous explique-t-il. Evoquant l'arrestation de membres du parti à Siliana, Jilani Hammami a affirmé que ces derniers ont été libérés sans même subir un interrogatoire. Pour lui, c'est la preuve qu'il y a absolument rien contre eux. Il regrette cependant que le chef du gouvernement soit tombé dans le piège des accusations sans preuves. Le leader du Front s'est dit d'ailleurs en accord total avec le communiqué d'Amnesty International qui avait demandé «l'arrêt des intimidations contre les protestataires». «Les termes du communiqué sont même légers par rapport à ce qui se passe, dit-il. Quand des militants font la sensibilisation autour de la loi de finances et que la police rédige à leur égard des fiches de renseignement, c'est plus que de l'intimidation». Quant aux casseurs, Jilani Hammami est catégorique : «Ces gens n'appartiennent pas au Front et n'obéissent pas au Front, ce sont des jeunes en colère, certes, mais leur colère est destructrice». Selon lui, à Mahdia, à Siliana et dans d'autres régions, les militants du Front populaire sont même intervenus pour protéger les sites vitaux.