BRUXELLES (Reuters) — Le Pakistan s'est déclaré prêt, hier, à favoriser les pourparlers de réconciliation entre gouvernement et insurgés afghans, assurant qu'il y va de son propre intérêt. "Nous sommes là pour aider. Parce que nous voulons un Afghanistan stable et pacifique. C'est dans l'intérêt du Pakistan", a déclaré à Bruxelles le chef de la diplomatie pakistanaise, Shah Mehmood Qureshi. Longtemps accusé de jouer un double jeu en Afghanistan, où il avait soutenu le régime des talibans renversé en 2001 par les forces internationales, le Pakistan aurait d'ores et déjà commencé à déployer des efforts avec l'assentiment des Etats-Unis. "Je ne sais pas si ces contacts réussiront ou non, mais le processus a été lancé. Nous n'en sommes qu'au début mais c'est en soi un succès car auparavant les Etats-Unis s'y opposaient", a expliqué un responsable pakistanais. Le représentant spécial américain pour l'Afghanistan et le Pakistan, Richard Holbrooke, s'est réjoui de l'initiative pakistanaise, de même que le secrétaire au Foreign Office, William Hague. Washington fera "tout ce qu'il faut" pour mettre en route ces efforts de paix, avait assuré la veille le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates. Mais Qureshi a souligné que ce sont les Afghans eux-mêmes qui doivent rester maîtres du processus. Les autres responsables de l'Otan réunis à Bruxelles se sont tous dits prêts à appuyer les efforts de réconciliation du Président Hamid Karzaï avec les taliban, dont la direction nie tout contact avec l'administration de Kaboul et pose toujours comme préalable le retrait des troupes étrangères. L'Isaf laisse un chef taliban gagner Kaboul De source autorisée, on croit toutefois savoir que des contacts préliminaires ont eu lieu entre le régime de Kaboul et les trois principaux mouvements insurgés, les talibans du mollah Omar, le réseau islamiste Haqqani et le Hizb-ul-Islami de l'ancien président Gulbuddin Hekmatyar. Le général David Petraeus, qui commande la task force américaine, ainsi que la Force internationale d'assistance à la sécurité (Isaf), a révélé que ses hommes avaient facilité la venue d'un important chef militaire taliban à Kaboul pour des contacts avec le gouvernement. Petraeus a fait état de contacts à un "stade préliminaire" entre plusieurs hauts responsables du mouvement taliban et le gouvernement de Kaboul, ou d'autres pays impliqués en Afghanistan. "D'une certaine façon, nous les facilitons", a-t-il dit à Londres. "Ce ne serait pas très facile pour un chef militaire taliban de se rendre à Kaboul si l'Isaf n'était pas tenue au courant et elle laisse donc faire." Les propos du chef de l'Isaf trahissent un engagement plus actif de la part des Occidentaux dans le processus de réconciliation qu'ils n'ont bien voulu l'admettre jusqu'à présent. Les responsables de l'Otan mettent toutefois en garde contre tout excès d'optimisme, soulignant que la réconciliation nationale en Afghanistan sera un processus long et complexe. Le conflit est entré depuis 2009 dans sa phase la plus meurtrière, plus de la moitié des 2.000 militaires étrangers tués depuis l'intervention de 2001 ayant perdu la vie ces seules deux dernières années. Ces pertes, pour des forces internationales qui comptent 150.000 hommes sur le terrain, entretiennent le scepticisme des pays engagés quant aux chances d'un règlement rapide.