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Philosopher
Tribuine
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 02 - 2018


Par Mohamed KOUKA
Je viens de rencontrer un ami d'enfance que j'ai perdu de vue depuis la classe de sixième, l'ancêtre de la première année secondaire actuelle, c'était à l'ancien collège Khaznadar, devenu depuis lycée du Bardo, il y a de cela quelques dizaines d'années. Ce qui m'a le plus étonné c'est que cet ami que je viens de retrouver, et avec quel plaisir, garde de notre ancienne sixième d'il y a plus d'un demi-siècle un souvenir d'une étonnante fraîcheur, bref une mémoire sidérante. Mon ami, qui est maintenant professeur à la retraite, cela va sans dire, relève que d'après ses informations je serais devenu, en quelque sorte, «philosophe», donc inaccessible intellectuellement, puisque «métaphysicien», vivant dans les nuées. Je dois souligner, tout de suite, que je n'ai jamais été philosophe, et je ne le serai jamais, car je n'en ai ni les moyens intellectuels ni le savoir, et puis, quelle responsabilité ! Ce qui ne manque pas de m'intriguer, c'est que certains continuent de penser que la philosophie est une matière assez obscure, en tous les cas coupée du réel dans lequel on vit. On croit que celui qui est tenté par la réflexion philosophique se sépare du monde, vivant dans les ‘‘nuées''. Dans le monde de la pensée pure.
Néanmoins, pour tenter de comprendre le ‘philosopher', cela ne m'empêche pas de m'informer auprès de Socrate, celui-là même qui a fait descendre la philosophie du ciel sur la terre. Le premier philosophe à centrer sa réflexion sur l'humain. La philosophie répond, alors, moins à la question de la nature des choses, la science s'en chargera, qu'à celle du bien-vivre : «Comment faut-il vivre pour vivre selon le bien ?» Avant d'être une connaissance ou un savoir, elle est de l'ordre de l'expérience, pensée de l'expérience, la philosophie ne peut l'être qu'en étant expérience de la pensée en acte. On ne s'imagine Platon et Aristote qu'avec de grandes robes de pédants. C'étaient des gens honnêtes et, comme les autres riant avec leurs amis, et, quand ils se sont divertis à faire leurs Lois et leur Politique, ils l'ont fait en se jouant, c'était la partie la moins philosophe et la moins sérieuse de leur vie, la plus philosophe était de vivre simplement et tranquillement. C'est le philosophe janséniste Pascal qui fait cette évocation. Et puis il y a le patron, Platon, qui rabroue en quelque sorte un vieillard qui lui racontait qu'il écoutait des leçons sur la vertu : «Quand vas-tu enfin commencer à vivre vertueusement ?». Les philosophes de la Grèce ancienne conservaient une intimité admirable avec les forces réelles de leur philosophie : ils étaient profondément engagés dans la présence et la matière humaine. Leur sagesse vise à des solutions immédiatement applicables. Il y a un commerce perpétuel entre le philosophe et le passant : la philosophie d'Epicure garde un ton quotidien dont nous avons perdu le secret, le platonisme même malgré ses appels célestes, écrit Paul Nizan dans «Les chiens de garde», est encore lié à l'argile de la vie humaine. Dans le monde civilisé, on commence à réentendre le sens des démarches des philosophes du siècle de Périclès où le terme ne désignait pas des joutes intellectuelles et des spéculations abstraites. Les écoles philosophiques de l'Antiquité offraient à leurs disciples bien autre chose qu'une appréhension intellectuelle du monde. Devenir philosophe, c'était pratiquer un changement profond concerté, volontaire, dans sa manière d'être au monde. C'était une conversion patiente et continue, engageant tout l'individu, une manière de vivre, impliquant un long et constant exercice sur soi. C'était un travail autant affectif qu'intellectuel, pour se dépouiller de l'angoisse, des passions, de l'illusoire et de l'insensé. La philosophie aide à préserver la pensée de toute fixation dogmatique ce dont nous avons le plus besoin aujourd'hui.
En ce moment, notre pays traverse une des périodes les plus sombres de son histoire. Qu'est-ce qui nous arrive ? Après avoir été classés par les instances internationale deuxième pays africain émergent après l'Afrique du Sud il y a quelques années, nous voici à la peine, à la traîne des pays sous-développés d'Afrique loin derrière les Seychelles, le Rwanda, le Botswana, la Namibie, sans parler du Maroc et de l'Algérie, l'Ethiopie, le Togo, le Burkina Faso... La Tunisie est classée 95e sur un total de 100 pays par le Forum économique mondial (WEF). Economie au bord de la faillite si ce n'est pas encore la banqueroute, conséquence du blanchiment d'argent, du trafic en tout genre, de la corruption absolument à tous les étages, le marché parallèle florissant. A mon âge qui est déjà bien avancé, je n'ai pas le souvenir de vente de carburant, en contrebande, qu'assez récemment, cette vente illicite se fait, benoîtement, à quelques pas d'une présence policière. La première fois que j'étais à Beyrouth, j'étais étonné de voir le change de devises se faire au bord du trottoir, librement. En ce moment, il se fait sous les arcades de la Porte de France en toute quiétude... Sans oublier le soutien apporté au terrorisme, que ce soit par l'envoi de jeunes se faire massacrer en Syrie, la formation de soi-disant prêcheurs ou le versement d'importantes sommes d'argent aux groupuscules et autres cellules terroristes... Quelques questions me taraudent, tout de même, d'où vient l'argent ? Et puis le ‘‘jihad'' en Syrie contre quels mécréants, quels satans, alors qu' Al-Qods, Jérusalem, est sous domination sioniste, ainsi que les territoires palestiniens occupés pendant que les Palestiniens de Gaza vivent dans un ghetto qui rappelle, en pire, le ghetto juif de Varsovie de triste mémoire et qui attendent délivrance. Ah, les valises noires ! Quelques questions me taraudent tout de même : d'où vient l'argent ? Et que penser de ces milliers de fonctionnaires engagés, sans nécessité, par les gouvernements à dominante religieuse de la Troïka, rien que pour satisfaire la clientèle d'Ennahdha. Dernièrement, le directeur de la société du transport s'est plaint d'avoir à supporter la rémunération de plus de 400 fonctionnaires qui ne fichent rien !
C'est bien le modèle de société arriéré, périmé, imposé au pays par les frères musulmans nahdhaouis. Depuis le soulèvement du 14 janvier 2011, le pays vit sous l'influence des théologico-politiciens régressifs et anachroniques. Les articulations de la société sont tenues par des proches des Frères musulmans-Ennahdha-Ansar Echaria et autre wahhabisme, qui manient un discours d'une religiosité sophistique d'autant plus dogmatique que populiste et décalé de l'histoire, et cela marche bien sûr auprès de bon nombre de crédules et déphasés laissés-pour-compte. La situation est inquiétante. C'est un cri d'alarme : la nation est en voie de régression généralisée, pas seulement sur la plan économique, mais aussi éducatif, social, culturel. Bref, nous sommes en train de sortir de l'Histoire comme dirait l'autre.
Que faire ? Il faut d'abord compter sur la lucidité critique de la minorité consciente de l'enjeu... La puissance d'interroger ne semble pas aller de soi en ce moment, alors qu'il importe de mettre en pièces, tout de suite, les fausses évidences du discours commun pseudo-religieux. Il s'agit de discerner, c'est-à-dire de critiquer, d'aider à sortir de cette «foi perceptive primordiale», dirait Merleau-Ponty. Dépasser les données sensibles, l'immédiateté, qui constituent le fonds de commerce de ces cheikhs théosophes à la petite semaine, mais qui empoisonnent tout autour d'eux. Ils sont le centre d'accueil de ces préjugée moyenâgeux, régressifs et mortifères. Toutefois, ils sont d'une efficacité redoutable car assez largement écoutés par les crédules et le innocents. Malheureusement, je dois reconnaître qu'en face, nous avons pas mal de professeurs de philosophie mais pas de philosophes. Si pourtant, nous en avons un : Youssef Seddik. Lors de son intervention à la télévision l'autre soir, il n'a pas manqué d'invoquer quelques versets du Coran prônant la tolérance, la liberté de croyance, l'ouverture à l'Autre et les rapports pacifiés entre humains. Cette intervention de Youssef Seddik est salutaire à plus d'un titre car il a parlé un langage de tous les jours avec intelligence, perspicacité et profondeur, sans s'abaisser à la facilité et aux lieux communs, sans déroger à ses convictions tout en gardant une hauteur d'esprit. Il me paraît s'inscrire dans une démarche pédagogique proche du ‘‘Discours décisif'' d'Ibn Rochd (Averroès, en latin) quand on y lit : «Que la Révélation nous appelle à réfléchir sur tout ce qui existe en faisant usage de la raison, et exige de nous que nous les connaissions, par ce moyen, voilà qui appert à l'évidence de maints versets du Livre de Dieu — béni et exalté soit-Il. En témoigne, par exemple, l'énoncé divin : ‘'Réfléchissez donc, ô vous qui êtes doués de clairvoyance'' qui est une énonciation univoque du caractère obligatoire de l'usage du syllogisme rationnel, ou du syllogisme rationnel et juridique tout à la fois ; ou par exemple l'énoncé divin : ‘'Que n'examinent-ils le royaume des cieux et de la terre et toutes les choses que Dieu a créées?'', encouragement énoncé de manière univoque à l'examen rationnel de tout ce qui existe (...) Puisque est donc bien établi — poursuit Ibn Rochd — que la Révélation déclare obligatoire l'examen de tout ce qui existe au moyen de la raison et la réflexion sur ceux-ci, et que par ailleurs, réfléchir n'est rien d'autre qu'inférer, extraire le connu de l'inconnu, alors nous avons l'obligation de recourir au syllogisme rationnel pour l'examen de tout ce qui existe» Ibn Rochd dixit in le ‘'Discours décisif''.
Aux hébétés de l'islamisme obscurantiste, dont la conscience est complètement gangrénée par de fausses traditions, la superstition, et l'incommensurable bêtise des cheikh extrémistes, et autres théologico-politiciens frères musulmans, il n'y a qu'à écouter ce que profèrent ces cheikhs comme immondices, à travers les réseaux sociaux, pour savoir combien nous avons besoin d'une profonde conversion, un travail affectif autant qu'intellectuel pour dépouiller les égarés de leurs phobies, de leur sentiment de culpabilité. Bref de l'illusoire et de l'insensé.
La tâche du philosophe est rude. Il nous faut un Héraclès de la pensée pour nettoyer ces obscures écuries d'Augias. Cependant, nous avons besoin de la philosophie comme manière de vivre plutôt que matière à discours, car «il y a de nos jours des professeurs de philosophie, mais pas de philosophe», observe Henry David Thoreau.
Peut-on apprendre à penser et comment, car on n'apprend pas la philosophie, on n'apprend qu'à philosopher selon Emmanuel Kant...Il faut écouter la voix de la raison !


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