La réforme de la fonction publique est l'une des grandes réformes anticipées par le gouvernement actuel. Avec les difficultés économiques actuelles, la réduction de la masse salariale de la fonction publique est l'un des objectifs majeurs de cette réforme. Les recrutements massifs dans la période post-révolution ont induit un gonflement de la masse salariale. Cette masse absorbe une grande partie des ressources de l'Etat, alors que la priorité devrait être donnée à l'investissement et à la création de richesse. Une problématique qui a été pleinement débattue lors d'une conférence organisée hier à l'Ecole nationale d'administration (ENA), en présence de Taoufik Rajhi, ministre chargé des grandes réformes auprès de la présidence du gouvernement M. Rajhi a indiqué, lors de la conférence, que le programme de départ volontaire initié par le gouvernement a permis de recevoir 6.400 demandes dont 4.600 ont été acceptées. Le programme a déjà commencé à être appliqué depuis janvier 2018 avec le départ de plusieurs fonctionnaires. On prévoit également le départ de 1.054 enseignants du secteur de l'éducation (primaire et secondaire) en juillet 2018 après la fin de l'année scolaire. Le ministre a souligné que 1.000 demandes ont été refusées par souci de maintenir la qualité du service public, dont plus de 500 provenant du secteur de la santé et qui sont difficilement remplaçables. Ce programme permet aux bénéficiaires de profiter d'une prime incitative de 36 mois, un accompagnement pour la création de projets en collaboration avec la BTS et la Bfpme et d'une couverture dans les établissements publics de santé pour une année. Le ministre a affirmé que ce programme s'inscrit dans le cadre de la stratégie du gouvernement pour la réforme de la fonction publique. Une réfome qui s'appuie sur deux composantes : la révision du statut de la fonction publique et la rationalisation de la masse salariale et des recrutements. Il a ajouté que les recrutements massifs durant la période 2011-2014 n'ont pas induit une grande augmentation au niveau des salaires; mais c'est au cours de la période 2015-2017 qu'elle a été ressentie à cause de l'application des augmentations salariales et la réactivation de certaines conventions sectorielles. Recrutements en baisse «Nous avions un phénomène d'effectifs et puis un phénomène de salaires. La masse salariale représente aujourd'hui 15,7% du PIB. Elle est de l'ordre de 16,5 MDT. Ceci ne nous permet pas de résoudre les problèmes dans plusieurs secteurs comme la santé et l'éducation. Pour cela, nous devons rationaliser les politiques de recrutement. Jusqu'à 2016, on recrutait entre 20.000 et 25.000 personnes par an. Ceci a changé depuis 2017, baissant à un niveau de 7.200 nouveaux recrutements et en 2018 à moins de 3.000 nouveaux recrutements. D'ailleurs, on prévoit qu'une seule personne remplacera quatre personnes sortantes. Une disposition qui a été appliquée en 2017 et aussi pour l'année en cours», a précisé le ministre. Il a ajouté que le gouvernement travaille sur un autre mécanisme, ayant pour objet la mobilité des fonctionnaires entre les administrations et aussi les régions. Un projet de loi est en cours de préparation pour fixer les modalités de cette mobilité. M. Rajhi a souligné que l'objectif est de réduire la part de la masse salariale dans le PIB à 12% d'ici 2020. Un objectif qui ne résout qu'une partie du problème puisque cette part reste toujours élevée par rapport aux besoins des ressources de l'Etat, pour renforcer le développement régional, l'investissement et l'amélioration du service public. Retraite: augmentation des cotisations et de l'âge de départ En ce qui concerne la réforme du système de retraite, M. Rajhi a indiqué que, depuis 2017, sept Task Force ont été créés afin d'effectuer une évaluation du système et fixer des choix de réforme. Mais il a affirmé que la démarche devrait être collaborative avec l'Union générale des travailleurs tunisiens (Ugtt) et l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica) pour réfléchir sur la réforme des deux caisses sociales, la Caisse nationale de retraite et de prévoyance sociale (Cnrps) et la Caisse nationale de sécurité sociale (Cnss). «On devait commencer la réforme des caisses depuis l'année 2000. Mais il n'y avait pas de volonté pour réformer parce qu'il y avait un matelas financier disponible. Actuellement, ce matelas n'existe plus. En 2016, la Cnrps a connu un déficit structurel. Pour la première fois, elle a demandé un transfert pour les pensions de retraite à hauteur de 300 MDT. De même en 2017, elle a demandé 500 MDT et a eu 600 MDT. Les deux caisses sont en situation de déficit structurel de 1500 MDT en 2018», a-t-il lancé. Sur ce plan, M. Rajhi a signalé qu'il n'est pas possible de réaliser l'équilibre des caisses sociales à travers les cotisations sociales parce que le système ne le permet pas, expliquant que la cotisation se fait sur les deux années les plus élevées. Pour cela, il y a eu une proposition de la contribution sociale de solidarité de 1% stipulée dans la loi de finances 2018, mais qui ne résout pas non plus le problème puisqu'elle ne permettrait de mobiliser qu'entre 250 MDT et 300 MDT, selon le ministre. Il a ajouté qu'il sera également procédé à l'application d'une décision ancienne qui est celle de l'augmentation des cotisations des fonctionnaires pour la Cnrps de 2%, qui devrait passer par une loi ainsi que d'augmenter l'âge de la retraite de deux années de façon progressive en 2019 et 2020. Pour le secteur privé, M. Rajhi a affirmé que la réforme requiert l'accord de l'Utica pour l'augmentation de la cotisation sociale.