Le nombre de signalements est passé de 10.057 cas en 2016 à 16.158 en 2017, ce qui dénote une prise de conscience croissante de la société civile tunisienne. Hier, dans la matinée, une conférence de presse sur les mécanismes de protection de l'enfance a été organisée par M. Mehiar Hamadi, délégué général à la protection de l'enfance dans un hôtel de Tunis. D'emblée, un bulletin statistique des activités des délégués à la protection de l'enfance 2017 a été remis à l'assistance. Il présente les principaux indicateurs enregistrés en 2017 concernant la situation des enfants en danger et des enfants en conflit avec la loi pris en charge par les délégués à la protection de l'enfance. M. Hamadi résume l'enjeu découlant de cette étude : «Le travail statistique élaboré par des experts issus du ministère de la Femme, de la Famille, de l'Enfance et des Personnes âgées, et les délégués à la protection de l'enfance suppose qu'on sensibilise beaucoup plus les institutions publiques, le corps médical, les services des urgences et la société civile». C'est qu'à travers les signalements, on relève que les enfants sont exposés à plusieurs formes de menaces : ils peuvent être agressés dans la rue, par un voisin, par leurs pairs, ainsi que par des proches de leur famille et de leur entourage. La menace subie entraîne une situation de violence qui peut évoluer négativement vers un comportement de déviance chez l'enfant. De ce fait, il risque de devenir un enfant délinquant privé de toute sa liberté. La spirale de la violence ne se raconte plus avec les scènes de violence quotidienne qu'on peut voir dans la rue, les établissements scolaires, les stades... Les adolescents ne sont pas protégés dans leur espace éducatif durant les heures de permanence et se retrouvent dans la rue exposés à tous types de danger. La Tunisie compte actuellement quatre-vingt-deux délégués à la protection de l'enfance, soit plus de deux délégués pour 100.000 enfants (2,4 délégués pour les enfants âgés entre 0 et 17 ans). Valoriser l'enfant «Il faut valoriser la présence de l'enfant dans le milieu scolaire. Lui faire sentir qu'il a toute sa place dans le système éducatif. L'élève ne doit pas avoir le sentiment d'être simplement un enfant parmi des centaines d'autres au sein de son établissement». Le nombre de signalements est passé de 10.057 cas en 2016 à 16.158 en 2017, ce qui dénote une prise de conscience croissante de la société civile tunisienne. Beaucoup de chemin a été parcouru en matière de signalements des actes de violence contre l'enfance non protégée depuis 2007 au regard du diagramme présenté dans le bulletin. Même si la violence s'est globalement accrue après la révolution de 2011, chiffres à l'appui. Quelques chiffres sont à noter : 45 signalements sont reçus par les délégués à la protection de l'enfance par jour, 60,7% est le taux d'évolution du nombre de signalements en 2017 par rapport à l'année précédente. On enregistre 4,8 signalements pour 1.000 enfants entre 0 et 17 ans. Bannir les jeux violents Que ce soit dans le milieu scolaire où l'on voit des enfants se chamailler et en venir aux mains ou dans les espaces de jeux vidéo où les agressions verbales sont banalisées, la violence bat son plein. Les jeux électroniques dangereux qui mettent en scène la violence ont été pointés du doigt par M. Hamadi comme un frein au bien-être de l'enfant : «L'enfant s'isole avec son smartphone. Sans autorité parentale, l'irritabilité de l'enfant devient inévitable à cause des agressions liées aux jeux». Lors des débats qui ont suivi l'allocution de M. Hamadi, un intervenant a mis en doute le nombre de signalements sur le travail des enfants qui s'élève à 308 cas. Un chiffre qu'il juge insignifiant au regard des réalités sur l'exploitation de l'enfant à des fins pécuniaires en Tunisie. En effet, selon l'Institut national de la statistique, on estime qu'un enfant sur dix fait l'objet d'une exploitation commerciale par sa famille. 270.000 enfants travaillant dans l'illégalité malgré l'interdiction de la loi ont été recensés. Des chiffres qui ont été commentés par M. Hamadi qui a signalé à ce propos que la société civile devrait intervenir davantage sur le terrain pour signaler le travail au noir des enfants. Pour rappel, le 1899 est un numéro vert mis à la disposition du public pour signaler les abus sur les enfants de quelque nature qu'elle soit. Signaler c'est bien, mais sévir c'est mieux. «Le signalement est un devoir pour toute personne, y compris celle qui est tenue au secret professionnel. Il est impératif de signaler au délégué à la protection de l'enfance tout ce qui est de nature à constituer une menace pour l'enfant au sens de l'article 20 du Code de la protection de l'enfant».