Le premier président de la Cour des comptes, Néjib Ketari, a révélé hier, lors d'une conférence de presse, que seules 144 listes sur un total de 2.074 listes candidates aux élections municipales de 2018 ont soumis leur état financier de campagne électorale auprès de la Cour des comptes. Soit 6,94% seulement des listes. Parmi les listes disciplinées, 11 représentent des coalitions (3 coalitions), 70 représentent des partis (13 partis) et 63 représentent des indépendants. En théorie, les listes candidates disposent jusqu'au 28 juillet pour déposer les documents relatifs aux recettes et dépenses de leur campagne. Autant dire que le temps presse. "Même si l'on va vers une interprétation plus souple de la loi, les listes n'auraient que jusqu'au 6 août prochain", explique M. Ketari. Au-delà de ces dates, les listes contrevenantes sont passibles d'une amende égale à dix fois le montant du plafond du financement public dans la circonscription électorale concernée. « Je ne savais pas » n'est plus recevable "Tous les membres de la liste ont une responsabilité solidaire, prévient le premier président de la Cour des comptes. Personne ne pourra dire je ne savais pas du jour au lendemain, chaque membre de la liste pourrait se retrouver avec une amende d'une centaine de milliers de dinars". Outre la sanction financière, les élus sur ces listes contrevenantes perdront leurs sièges dans la circonscription. Cependant, ôter le siège à un élu peut s'avérer une entreprise trop longue et l'élu pourrait terminer tranquillement son mandat de cinq ans sans qu'aucune décision de justice définitive ne soit prononcée. En effet, si la Cour des comptes peut décider que tel où tel élu perd un siège, ce dernier bénéficie du droit de faire appel, avec tous les délais que cela implique. "Nous avons les moyens d'accélérer les choses", menace toutefois Néjib Ketari. Présenter ses comptes de campagne est une obligation légale pour toutes les listes candidates aux élections. Mais le travail de la Cour des comptes ne s'arrête pas à la réception des documents. Juges et experts de la Cour des comptes doivent éplucher les comptes et vérifier si les dépenses sont réellement des frais relatifs à la campagne électorale. Si tel n'est pas le cas, les listes se verraient privées de l'aide publique au titre de remboursement de frais de campagne. Elles se verraient également infligées des amendes pouvant aller de 5 à 10 fois le montant du plafond du financement public dans la circonscription électorale concernée. Autant dire que les nouveaux élus risquent gros et qu'ils ont tout intérêt à présenter, avant la fin du mois, des comptes de campagne conformes à la législation. A noter que 28 listes relevant de Nida Tounès ont présenté leurs comptes de campagnes contre 25 pour le parti Ennahdha, et ce, sur un total de 350 listes présentées par chacun des deux partis. Ce qu'il faut faire ! La Cour des comptes invite les listes concernées à déposer les copies originales des relevés de comptes bancaires ouverts au nom de la campagne électorale pour les élections municipales ainsi que les justificatifs des recettes et des dépenses électorales signés par le président de la liste et l'intermédiaire financier. Elle insiste également sur la nécessité de déposer la copie originale de la liste détaillée des manifestations, activités et rencontres effectuées lors de la campagne électorale certifiée par l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie). Le fait de ne pas déposer les documents demandés est passible des sanctions prévues dans l'article 98 de la loi organique n° 2017-7 du 14 février 2017, modifiant et complétant la loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014 relative aux élections et référendums. L'article 98 (nouveau) stipule que «si l'état financier d'une liste, d'un candidat ou d'un parti n'est pas déposé conformément aux modalités et dans les délais prévus par l'article 86 de la présente loi, la Cour des comptes pourrait infliger une amende égale à dix fois le montant maximum de l'aide publique dans la circonscription concernée».