Après la rupture avec l'Orchestre symphonique tunisien en juin 2018, Hafedh Makni n'est pas resté les bras croisés et a vite créé son propre orchestre : Carthage Symphony Orchestra, formé de 36 musiciens permanents et de 100 choristes. «Voyage symphonique de Carthage à Tunis» est le concert inaugural qui a eu lieu, vendredi dernier au Théâtre municipal plein comme un œuf. La spécificité de cet orchestre conduit par Hafedh Makni est qu'il propose outre les œuvres symphoniques du répertoire international, des compositions purement tunisiennes. Quatorze pièces ont été jouées au cours de ce concert qui a démarré un embarquement tout en douceur et en subtilité avec un morceau intitulé : «Now we are free» de Lisa Gerrard et Hans Zimmer dont les arrangements ont été réalisés par le jeune Wassim Makni. Les images en arrière-plan de la scène devant accompagner ce morceau ont malheureusement fait défaut. Ensuite, le voyage débute avec un départ sur le thème «Les Méditerranéens», pièce composée par Hafedh Makni. Onze escales ont jalonné cette virée musicale enchanteresse. La première «Sidi Bou» signée Jalloul Ayed, la deuxième «Ballet Emna : scène et valse» de Mohamed Makni. A partir de la troisième escale, les choristes font leur entrée pour interpréter le thème emblématique de «La traviata» de Giuseppe Verdi : «Coro di zingarelle». Un chœur de bohémiennes portant châle et fleur dans les cheveux avancent au-devant de la scène et dans la salle sous les regards réjouis des spectateurs. La quatrième escale est revenue à la jeune pianiste et compositrice Amira Knani qui a remporté un prix à l'«International Youth Piano» à New York et est considérée comme la deuxième meilleure pianiste au monde. Sa composition «Du Sud au Nord» arrangée par Mohamed Makni a remporté un franc succès compte tenu des ovations de la salle. «Gloria» d'Antonio Vivaldi constitue la cinquième escale de ce voyage et est un chant de louange qui exulte la joie. Une œuvre solaire, pilier de la discographie vivaldienne, a été interprétée avec ferveur. Au cours de la sixième escale, Mourad Gaâloul introduit le «oud» (luth) dans sa composition «Amali», ce qui donne un ton assez pittoresque et flatteur de l'orchestre. Une intrusion bien acceptée par l'auditoire. La septième escale a été réservée à un tube signé Gilbert Sinoué et chanté par Dalida : «Helwa ya baladi». Mourad Gaâloul a assuré l'arrangement orchestral de ce refrain allègre qui sera repris en bis à la fin du concert. L'auditoire a succombé aussi au charme du violoniste et compositeur Anis Hammami, qui, avec sa composition «Sanad» arrangée par Jawhar Matmati, a fait de la huitième escale un vrai bonheur. Neuvième escale, retour à Giuseppe Verdi avec «El trovatore coro di zingare», extrait d'un opéra romantique en quatre actes, dédié au chœur qui a su triomphalement revisiter l'œuvre lyrique. Le maître de céans Hafedh Makni nous livre au cours de la dixième escale une composition de Mohamed Makni : «Rapshodie : de Carthage à Tunis» qui remonte à la Carthage punique, romaine, arabe jusqu'à Tunis après la Révolution du 14 Janvier. Les mouvements sont tantôt apaisés, tantôt nerveux, exprimant de la sorte les différentes époques de la Tunisie. L'humour est aussi de la partie avec l'introduction de la cornemuse, corps étranger à un orchestre symphonique tout autant que la tabla qui a investi aussi la scène. La onzième escale, la dernière, est un hommage à Aznavour, chanteur français d'origine arménienne, décédé récemment laissant un riche et long répertoire de mélodies. L'Orchestre symphonique de Carthage a choisi l'une d'elles «Emmenez-moi» qui a subi un arrangement orchestral, signé Wassim Makni. L'hommage a reçu un accueil chaleureux du public. Ce dernier a apprécié la nouvelle lecture de ce refrain célèbre. L'arrivée, fin du concert, est un «Rondo ouverture» de Mohamed Makni au ton apaisé et serein révélant la fraîcheur de ce voyage musical aux surprises agréables. A ceux qui veulent faire partie de ce voyage, le prochain aura lieu le dimanche 25 novembre au Théâtre municipal de Tunis. Réservez vos tickets.