L'Ugtt a, certes, en la dégradation du pouvoir d'achat des fonctionnaires, un argument important, mais la situation de crise du pays et les impératifs s'imposant au gouvernement en matière de relance du développement et de respect de ses importants engagements sociaux ne laissent pas au gouvernement une grande marge de manœuvre Les normes internationales en vigueur en matière de masse salariale et de son incidence budgétaire montrent clairement les risques majeurs d'une nouvelle fuite en avant en la matière Une augmentation des salaires qui interviendrait aujourd'hui, à un moment où l'économie nationale n'a pas vraiment redémarré, n'engendrerait qu'une illusion d'amélioration du pouvoir d'achat La réunion hier entre le chef du gouvernement et le secrétaire général de l'Ugtt n'a pas abouti à un accord sur les augmentations salariales dans la fonction publique, ce qui signifie que la menace de grève brandie par la centrale syndicale historique devient effective. Selon Noureddine Taboubi, la réunion n'a abouti à aucune solution, ce qui a mis fin aux négociations. Et le secrétaire général d'évoquer l'intention des syndicats de recourir à l'escalade et de mettre en route le processus de mobilisation qui devrait mener à la grève prévue pour le jeudi prochain. L'Ugtt a, certes, en la dégradation du pouvoir d'achat des fonctionnaires, un argument important, mais la situation de crise du pays et les impératifs s'imposant au gouvernement en matière de relance du développement et de respect de ses importants engagements sociaux, ne laissent pas à Youssef Chahed une grande marge de manœuvre. La responsabilité des deux négociateurs La responsabilité des deux parties est donc, aujourd'hui, sérieusement sollicitée, afin de désamorcer le bras de fer menaçant. Car il est essentiel d'épargner au pays une épreuve évitable. Les normes internationales en vigueur en matière de masse salariale et de son incidence budgétaire montrent clairement les risques majeurs d'une nouvelle fuite en avant en la matière. D'un autre côté, le taux d'inflation officiel autant que la dégringolade sans fin du dinar exigent réparation. Or, une augmentation des salaires qui interviendrait aujourd'hui, à un moment où l'économie nationale n'a pas vraiment redémarré, n'engendrerait qu'une illusion d'amélioration du pouvoir d'achat. Car il ne pourra s'agir que d'une augmentation inflationniste sans lendemain, qui poussera vite le niveau général des prix vers le haut. La quadrature du cercle Est-ce donc la «quadrature du cercle», avec un couffin de la ménagère qui peine désormais à se remplir face à des prix galopants ? En quelque sorte oui. Car sans rétablissement sérieux et durable de l'économie, sans reprise de l'investissement, de la production et de l'exportation, les salaires effectifs ne pourront pas s'améliorer, puisque le pouvoir d'achat ne sera pas en mesure de redécoller. Que pourrait-on entreprendre pour ainsi dire «sauver les meubles» ? D'abord ôter de son esprit, autant que possible, les solutions négatives qui affaiblissent davantage la production nationale et grèvent d'autant plus les finances de l'Etat, c'est à dire les finances publiques, du citoyen. Car, sans conteste, la grève représente une perte sèche pour le pays, même si c'est un droit constitutionnel garanti. Ensuite, recourir à un deal échelonné correspondant à un compromis de dernière minute. Une spécialité tunisienne rassurante et sympathique qui a permis au dialogue social de s'incruster dans les traditions du pays. Quant à l'intention du gouvernement de "céder certains établissements publics afin de combler les lacunes budgétaires», faut-il rappeler qu'il ne s'agit que d'établissements qui grèvent, chaque année, le budget de l'Etat et que leur cession pourrait donner une petite bouffée d'oxygène aux finances, laquelle pourrait permettre, un jour, pourquoi pas, de revaloriser les salaires.