L'inflation frappe encore et de nouveau, et les cris de protestation se font assourdissants, relayés par les médias, les syndicats et les réseaux sociaux. Alors que les experts économiques «analysent» et que les politiciens s'accusent mutuellement, les ménages souffrent en silence au constat de l'irrésistible délitement de leur pouvoir d'achat. Mais il est important de tenir compte des hausses saisonnières ou conjoncturelles des prix, comme celles enregistrées lors des saisons touristiques ou lors d'une hausse conjoncturelle du prix du pétrole. Or nous sommes en pleine saison touristique ayant marqué une reprise appréciable. C'est pourquoi les pouvoirs publics ont institué une aide sociale régulièrement revalorisée attribuée à une liste de plus en plus longue de citoyens nécessiteux qui bénéficient également d'avantages et de subventions spécifiques ainsi que de soins gratuits. Compensation contre inflation En Tunisie, il est important de savoir que si les prix des produits de première nécessité sont effectivement stabilisés par d'importants fonds de compensation qui alourdissent le budget de l'Etat, la loi du marché se dresse comme un mur infranchissable face aux sollicitations des pouvoirs publics visant à modérer ou contenir les prix non homologués des produits soumis à la libre concurrence. Mais, en dehors des produits compensés, le renchérissement incontrôlé du coût de la vie, qu'aggrave la montée vertigineuse des prix des produits importés, du fait de la dégringolade du dinar, pousse régulièrement les salariés à demander réparation sous la forme d'augmentations appelées à corriger le pouvoir d'achat, ce alors que les petits artisans et commerçants ainsi que les catégories les plus pauvres se marginalisent toujours davantage. Une course sans fin entre prix et salaires Ce tableau se présente puis se renouvelle régulièrement depuis la révolution dans un environnement de crise économique et d'explosion de la contestation sociale sans précédent, en un cercle vicieux alternant poussées inflationnistes et «amélioration» des salaires. Sauf qu'en réalité, ces améliorations en chiffres et sur le papier (la fiche de paie) n'engendrent, en définitive, aucune revalorisation durable du pouvoir d'achat effectif des salariés. Et, par contre, augmentent la masse salariale, grèvent les finances publiques et produisent de l'inflation. Mais ces conséquences sont aussi inévitables que les augmentations salariales. Sauf qu'il faut y recourir avec modération, notamment en temps de crise. Or c'est lors des crises que l'inflation peut menacer le plus sévèrement. Les mécanismes et les subtilités de l'inflation doivent être bien appréhendés par les politiques, les syndicats, les salariés, les patrons et, bien sûr, les économistes. Car il est essentiel d'en saisir les causes pour pouvoir maîtriser le phénomène et identifier des solutions réelles qui n'aggravent pas le cercle vicieux des prix et des salaires. Les diverses causes de l'inflation L'inflation est souvent définie comme étant une augmentation durable du niveau général des prix. Elle constitue l'un des sujets les plus préoccupants autant pour les politiciens que pour les économistes, et détermine la bonne ou la mauvaise santé d'une économie donnée, en interaction avec la croissance, l'emploi et les échanges extérieurs. On identifie habituellement quatre causes pouvant induire l'inflation : la hausse des coûts de production (matières premières ou salaires), la hausse de la demande, les pratiques économiques anticoncurrentielles et enfin l'augmentation de la masse monétaire. La première augmente les coûts de production, lesquels sont répercutés sur les prix. L'augmentation de la masse monétaire La seconde est due à une augmentation de la demande sur le marché, sans augmentation conséquente de l'offre. La troisième est due aux ententes entre producteurs qui se concertent pour augmenter les prix des produits. C'est le cas des marchés peu concurrentiels ou monopolistiques. La quatrième est l'inflation par l'augmentation de la masse monétaire, une opération du ressort de la Banque centrale, lorsque l'Etat fait appel à la «planche à billets» pour parer à ses difficultés de trésorerie. Plus généralement, «lorsque le crédit se développe plus rapidement que la production». Là aussi, apparaît un déséquilibre entre l'offre et la demande qui va entraîner ou favoriser la hausse des prix Les rôles de la BCT et de l'Etat La BCT a la responsabilité de la gestion et de la surveillance de la masse monétaire ainsi que de la fixation des taux d'intérêt directeurs (ainsi appelés car ils déterminent toute la pyramide des différents taux d'intérêt du système bancaire du pays). C'est donc à elle que revient la mission d'agir en faveur de la stabilité des prix en veillant, en particulier, à ce que le volume de la création monétaire corresponde aux besoins de l'activité économique nationale. Car, en fixant les taux d'intérêt, la Banque centrale peut, en fonction des besoins dictés par la conjoncture, encourager ou décourager la distribution du crédit. Le rôle de l'Etat est d'agir sur l'appareil productif, pour renforcer son caractère concurrentiel et lutter contre les ententes dans les différents domaines d'activité et les marchés du pays. C'est un combat élaboré mené au quotidien avec les structures professionnelles des différentes activités économiques, les marchés de gros, la Douane, l'Office du commerce, les importateurs et les grossistes des différents secteurs. Sans oublier les rôles spécifiques et complémentaires de la Banque centrale, du ministère des Finances et de celui de l'Economie...