Des lacs collinaires sédimentés, une invasion urbaine, des cadereaux engloutis par des quartiers d'habitations, l'absence de bassins de rétention à la périphérie des villes, etc., tels sont les facteurs qui ont aggravé la catastrophe causée par les inondations du 22 septembre 2018, selon les experts. L'association le «Club de Nabeul» a organisé, avant-hier, dans une unité hôtelière de la Cité des potiers, une rencontre intitulée «Les inondations de Nabeul, le 22 septembre 2018… Pour ne pas oublier» dans laquelle une équipe d'experts a mis en relief les différents dysfonctionnements qui ont aggravé les effets des pluies torrentielles.. Selon M. Mohamed Selmane, ingénieur général et ex-ministre de l'Equipement, les pluies qui se sont abattues sur la ville de Nabeul s'élèvent à «presque plus de 50% de la quantité annuelle». Parallèlement, plusieurs facteurs ont contribué à l'aggravation de la situation, notamment le «manque d'entretien des équipements de drainage» en amont ou de proximité à la périphérie des villes ou carrément à l'intérieur. La protection à l'amont «Deux points très importants sont à signaler. Premièrement, il y a protection au niveau des barrages et des lacs collinaires. Il reste à rappeler que plusieurs ouvrages de CES (Conservation des eaux et du sol) ont été endommagés et n'ont pas été restaurés. Et si le premier niveau de protection n'est pas efficace, alors le deuxième niveau à la périphérie des villes ainsi que celui l'intérieur des cités ne pourront faire face à ce type d'inondations exceptionnelles», a-t-il déclaré. «Aux alentours, il y a des ouvrages qui peuvent jouer le rôle de rempart contre les inondations. Je cite par exemple: les canaux, les digues, les bassins de rétention comme c'est le cas dans la Cité Ennasr à Tunis, dits aussi d'orages. Ces ouvrages qui se construisent au niveau du bassin versant sont très efficaces techniquement et économiquement. Ils permettent d'économiser sur les réseaux de drainage à l'intérieur des villes et le fonctionnement normal de ce réseau à travers la rétention d'une grande quantité d'eau», a-t-il ajouté. De son côté, M. Mohamed El Fahem, chef d'équipe de recherche du Club de Nabeul et coordinateur de la rencontre, a pointé du doigt le manque d'entretien des lacs collinaires en amont des oueds de la ville de Nabeul et Dar Chaâbane El Fehri (Oued El Malah, Oued El Mankaâ, Oued Souhil, Oued R'bat, Oued Moussa, Oued Amroun, et Oued Essghir) ainsi que l'invasion urbaine au bord des cours d'eau, ou carrément des cadereaux (ruissellements à sec) engloutis par les habitations. Ex: celui d'Oued R'bat qui est désormais occupé par une rue principale du quartier des Nattiers. Les nouveaux plans d'aménagements de l'AFH en question «A Nabeul et Dar Chaâbane El Fehri, nous avons vécu les inondations de 1969 et ceux de 1986. Et nous avons remarqué que les choses n'ont cessé d'évoluer de mal en pis. Les choses sont en train d'évoluer dans le mauvais sens. Est-ce qu'il y a une responsabilité humaine ? Est-ce que c'est le changement climatique qui est derrière tout cela ?», s'est-il interrogé. «Nous avons un très bon travail de terrain. Tout le monde sait que la zone de la ville de Nabeul et de Dar Chaâbane El Fehri est situé dans une petite cuvette et est entourée d'une petite chaîne de montagnes et de collines. A notre surprise générale, nous avons constaté que la plupart des lacs collinaires qui devaient protéger la zone des inondations étaient sédimentés et hors de service», a-t-il renchéri. Parallèlement, Mohamed El Fahem a tiré la sonnette d'alarme concernant les nouveaux plans d'aménagement de l'Agence foncière d'habitation (AFH) situés entre Nabeul et Hammamet, et considérés comme l'extension de la ville de Nabeul. On parle ici de la cité AFH1 (Nabel al-jadida), AFH2 et AFH3 (en cours d'étude). «La grande question qui se pose est la suivante: est-ce qu'on a fait de bonnes études pour éviter des catastrophes dans ces zones à risques vu leurs proximités avec les oueds El Maleh et celui d'El Mankaâ? », a-t-il conclu.