En apparence, la question des droits de l'Homme transcende les idéologies et semble être une quête commune. Mais derrière les apparences d'un front uni, se cachent en réalité des divergences de fond Cinq députés ont annoncé hier la naissance d'un réseau de parlementaires pour les droits de l'Homme. Une initiative portée par Ibtissem Jebabli (Coalition nationale) et qui réunit jusqu'à présent Leila Hamrouni (Coalition nationale), Kalthoum Badreddine (Ennahdha), Jamila Debbech Ksiksi (Ennahdha) ainsi que "d'autres députés issus de plusieurs groupes parlementaires", selon les propos de Jebabli. Ce nouveau réseau a pour but d'impulser le rôle des parlementaires dans l'ensemble des questions ayant trait au thème des droits de l'Homme. Ces députés ont également annoncé leur volonté de soutenir les projets de loi et initiatives relatifs aux droits de l'Homme. "Nous sommes réunis autour des valeurs universelles des droits de l'Homme, explique Ibtissem Jebabli. Notre objectif est d'être à la fois une force de proposition et une force de pression pour veiller à l'application de la législation en la matière". Amendement du code pénal La députée a d'ores et déjà annoncé que le "réseau" suggérera prochainement une proposition d'amendement du code de procédure pénale. "Bien qu'il ait été amendé en 2016, nous souhaitons davantage de garanties pour les suspects lors des gardes à vue, précise Ibtissem Jebabli. Nous souhaitons que les avocats puissent voir leurs clients pendant la garde à vue". De son côté, Jamila Debbech Ksiksi (Ennahdha) a reconnu que la Tunisie, bien avant la révolution, avait une aisance à ratifier toutes les conventions internationales, mais qu'en réalité, elle avait du mal à adapter la législation nationale aux exigences de ces conventions. "Il y a encore des faiblesse dans notre arsenal juridique, indique la députée. Nous devons veiller à la bonne application des lois existantes et à en créer d'autres". Des divergences de fond "La question des droits de l'Homme transcende les idéologies, c'est une quête commune", martèle Jamila Debbech Ksiksi. Mais derrière les apparences d'un front commun, se cachent en fait des divergences de fond. Lorsque le journal La Presse tente d'en savoir plus en posant des questions plus précises, le petit édifice se fissure très vite, et c'est Leila Hamrouni qui donnera finalement le coup de grâce à cette initiative mort-née. En effet, lorsqu'on évoque la question de l'égalité dans l'héritage, la députée Hamrouni (Coalition nationale) affirme haut et fort que le projet de loi adopté en Conseil des ministres sera soutenu par le réseau et devra être l'une de ses priorités. Des propos qui créent un malaise parmi les députés présents à la salle des conférences de presse de l'ARP. "Non nous ne sommes pas d'accord sur cette question", tient à se démarquer Kalthoum Badreddine, soutenue en cela par sa collègue Jamila Debbech (Ennahdha). Ibtissem Jebabli tente de rattraper le coup en expliquant que le sujet mérite d'être débattu au sein du réseau. "Ces questions que vous avez évoquées doivent faire l'objet d'une profonde discussion et cela nécessite du temps, dit-elle. Nous voulons donner une note positive à ce lancement, nous sommes, en quelque sorte, en train de réfléchir à haute voix". Mais tout de suite, Leila Hamrouni en rajoute une couche et met les députés d'Ennahdha dans l'embarras. "Oui, dit-elle, il faudra donner une chance à la discussion, mais au bout de ces discussions, chacun devra assumer ses responsabilités et on saura alors qui sont ceux qui sont réellement engagés envers les droits de l'Homme et ceux qui ne font que scander des slogans". L'initiative lancée par ces parlementaires risque d'être rapidement rattrapée par l'actualité. La discussion du projet de loi relatif à l'égalité dans l'héritage est une question idéologique, difficile à insérer dans le moule d'un "consensus".