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Ce qu'on écrase, ce qui tient debout
Publié dans Business News le 21 - 06 - 2025

Episode 1 : Le régime contre un mètre cinquante de rébellion
Il paraît qu'en prison, on mesure tout : les visites, les vêtements, la tension artérielle. On ne mesure jamais, en revanche, la taille du courage.
Sonia Dahmani n'est pas bien grande. Un petit mètre cinquante à tout casser. Un « petit bout de femme », comme dirait une tante envahissante au mariage d'un cousin dont on ne se souvient pas. Sauf que ce petit bout de femme-là fait trembler tout un régime. Un président, un parquet, une chambre d'accusation, un service pénitentiaire, cinq juges au minimum. Il en faut du monde pour tenter d'enfermer une idée. Parce que Sonia, c'est ça : une idée debout dans un box, le sourcil levé, la voix posée, et des juges qu'elle tutoierait presque s'ils n'étaient pas si vexés.
Ce qu'on lui reproche ? D'avoir parlé. D'avoir dit que le pays n'allait pas bien. D'avoir dénoncé le racisme, les conditions de détention, le zèle d'une ministre, la bêtise érigée en méthode de gouvernement. En Tunisie, aujourd'hui, tout cela vous vaut des années de prison. Et une co-détenue psychopathe comme lot de consolation.
La vraie tragédie, ce n'est pas qu'on cherche à la faire taire. C'est qu'on y met tant de moyens, tant de zèle, tant d'énergie… pour si peu de résultat. Car Sonia Dahmani parle encore. Elle parle à travers ses avocats, sa sœur, ses soutiens, ses silences aussi. Elle est derrière les barreaux, mais le régime est enfermé avec elle, à l'étroit dans sa propre peur.
Alors qu'ils l'habillent de sefsari, qu'ils la déshabillent de ses droits, qu'ils la déplacent de cellule en cellule, elle reste là : invisible et omniprésente. Plus on l'écrase, plus elle grandit. Et à force de vouloir enterrer Sonia Dahmani, ils finiront peut-être par comprendre qu'elle est une graine.
Une graine de liberté. Qui n'a pas fini de germer.

Episode 2 : Le président, la nuit, les lobbys et l'eau du Kef
Il est trois heures du matin. Les chats dorment. Les citoyens dorment. Le responsable du Kef dort. Le président, lui, publie un communiqué.
Ce n'est pas un poème, ni un plan d'action, ni même un message d'espoir. C'est un mélange d'exaspération, d'accusation et d'illumination nocturne. Le dernier conseil ministériel, tenu jeudi 19 juin, n'a rien apporté de nouveau. Sinon une répétition : les traîtres sont partout, les réseaux d'affamement se multiplient, les coupures d'eau coïncident mystérieusement avec les fêtes, et les anciens ministres sont tous des escrocs qui vendent les biens deux fois.
On croyait que le rôle d'un président était de vendre des rêves, d'ouvrir des horizons, de dessiner des projets. Le nôtre, il dénonce, accuse, nomme sans nommer, s'indigne, dort peu et parle beaucoup. On ne lui connaît pas de réforme phare, mais un vocabulaire fourni en complot, lobby, infiltration et sabotage.
Il faut dire qu'à force de répéter que tout va mal, ça finit par devenir un programme. Et à force de dire que c'est la faute des autres, ça devient presque une vision. Ce jeudi, entre deux dénonciations de familles qui contrôleraient le pays et de réseaux qui saccageraient les barrages, le chef de l'Etat a même eu une pensée pour les agents administratifs du Kef, endormis à l'aube. Sans se demander si publier des communiqués présidentiels à 3 heures du matin, ce n'est pas un peu exiger de la République qu'elle vive à son insomnie personnelle.
Pendant ce temps, la Tunisie attend. Attends quoi ? Des solutions. Des orientations. Une ligne claire. Mais ce que le pays reçoit, c'est un monologue. Furieux, répétitif, nocturne. Comme si la présidence avait été transformée en émission de talk-show solitaire, sans contradicteur, sans sommaire et sans fin.
Alors on attend. Le lever du jour. Et peut-être, un matin, un projet plutôt qu'un procès.

Episode 3 : Bombes sélectives et indignations conditionnelles
Il y a les guerres qu'on condamne. Et celles qu'on comprend. Il y a les missiles qui violent le droit international. Et ceux qui « relèvent de la légitime défense ». Il y a Moscou, le grand méchant loup. Et Tel-Aviv, le pauvre petit chaperon armé jusqu'aux dents.
Quand la Russie a envahi l'Ukraine, les chancelleries occidentales ont bondi. Drapeaux bleu et jaune sur les monuments, discours martiaux, larmes sur les plateaux télé. Violation de la souveraineté, crime d'agression, horreur impérialiste. On connaît le lexique par cœur.
Mais quand Israël bombarde Gaza jusqu'à la moelle et envoie ses avions de chasse sur Téhéran sans avoir été attaqué, on nous explique qu'il s'agit d'une riposte préventive. Riposte à quoi, au juste ? À une menace qui n'a pas encore eu lieu ? À une hypothèse militaire ? À une peur ? Si l'anticipation devient une justification, alors il n'y a plus de droit, seulement des préférences.
Et quand l'Iran frappe un hôpital mitoyen d'une caserne à Tel Aviv, c'est un scandale planétaire. Mais quand Israël fait de Gaza un champ de ruines, quand des familles entières disparaissent sous les gravats, quand des enfants sont tués par milliers, ce n'est plus du terrorisme, c'est une « tragédie collatérale ». Le langage s'ajuste, la compassion aussi.
Heureusement, il reste les peuples. À Londres, Paris, New York, Madrid, des foules immenses défilent pour la Palestine. Parce que les peuples, eux, ont encore des yeux pour voir et un cœur pour comprendre. Pendant que leurs dirigeants distribuent des armes à Israël, leurs citoyens brandissent des drapeaux palestiniens.
Le vrai fossé aujourd'hui n'est plus entre les blocs géopolitiques. Il est entre les opinions publiques et leurs élites. Entre les dirigeants qui vendent des armes, et les peuples qui réclament du droit. Entre ceux qui mesurent l'horreur au prisme des alliances, et ceux qui la voient telle qu'elle est : insupportable, d'où qu'elle vienne.

Episode 4 : Danser quand les roquettes passent… et respirer encore
Cette semaine, alors que les tensions Iran‑Israël éclairent la nuit de leurs roquettes, un instant suspendu a émergé à Beyrouth. Sur un rooftop, plein de vie, un orchestre de cuivres explose en musique au moment même où des missiles traversent le ciel. Un contraste qui gifle : des sourires, de la danse, et la guerre au-dessus de leurs têtes.
Voilà ce qu'on appelle résister. Non par les armes, mais par l'humanité la plus simple : celle de vivre, rire, créer. Le clip montre un saxophoniste ou trompettiste sur scène, les invités debout, leurs portables levés pour immortaliser la scène. Les lumières des missiles se reflètent dans les verres et dans les yeux. Et c'est beau. Parce que c'est encore de la vie.
Il n'y a là ni naïveté, ni inconscience. Il y a un défi : ceux qui dansent refusent d'avoir peur. Et ils nous rappellent qu'il y a sans doute un moment plus salutaire dans un rire partagé que dans tous les discours officiels condamnatoires de cette guerre.

Après trois épisodes sombres – Sonia Dahmani sous pression, un président noctambule et des chancelleries à géométrie variable – cet instant à Beyrouth est une bouffée d'air. Une preuve que, parfois, la réponse la plus forte à l'absurde, c'est un pas de danse.
Alors aujourd'hui, on lève le poing… au rythme d'un orchestre sur un toit. Et on se dit que la vie, finalement, c'est aussi ça : un pied de nez collectif au chaos.


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