Militantisme, corruption, colonisation, oppression sont les mots clés qui ont ponctué le discours de la présidente de l'Instance vérité et dignité L'Instance vérité et dignité (IVD) achèvera officiellement ses travaux le 31 décembre qui auront duré plus de 4 ans. Une conférence de clôture a été tenue hier à Tunis, en présence du président de l'Inlucc, Chawki Tabib, du président du Conseil supérieur de la magistrature, Youssef Bouzakher, la représentante du Haut Commissariat aux droits de l'Homme en Tunisie, Teresa Albero, et de figures politiques islamistes et de gauche, en l'occurrence le président du mouvement islamiste Rached Ghannouchi et le chef du Parti des travailleurs Hamma Hammami accompagné de Radhia Nasraoui. Des barres de fer soudées avec une serrure faisant office d'une porte de cellule de prison en arrière plan de la tribune, la présidente de l'IVD, Sihem Ben sedrine, a prononcé son discours annonçant la clôture des travaux de l'Instance. Une fin qui devrait annoncer l'aboutissement de la justice transitionnelle en Tunisie, mais sur fond de dissidences. Les sphères politiques, médiatiques et sociales sont partagées entre détracteurs et partisans du programme de l'indemnisation des victimes de la dictature. Loin d'être réconciliatrice, Ben Sédrine a choisi de hausser le ton, parfois de menacer — « la machine corrompue et oppressante de l'ancien régime » persiste et agit encore dans la durée —, de caricaturer, voire culpabiliser les détracteurs, et d'inciter les citoyens à revendiquer « la récupération des cagnottes empochées par les voleurs et les corrompus qui circulent toujours en toute liberté». Incitation des victimes à revendiquer leur droit à l'indemnisation En dressant le bilan du mandat de l'IVD, la présidente de l'Instance a mis en exergue les difficultés et les entraves que les membres de l'IVD ont rencontrées dans leurs missions. C'est grâce aux réalisations de l'IVD que les réseaux de corruption ainsi que le système oppressif ont été identifiés et démantelés, c'est grâce à ce que l'IVD a accompli que l'Etat a pu récupérer une somme assez importante ( !), notamment à travers la liquidation des biens de l'ancien régime, soutient-elle. Et c'est ce même système oppressif qui a essayé dès le départ d'intervenir et d'entraver le processus de justice transitionnelle, affirme-t-elle. « L'indemnisation des victimes n'est pas une faveur ! », répète plus de deux fois Ben Sedrine, incitant ainsi les victimes à revendiquer leurs droits. Militantisme, épopée, corruption, colonisation, oppression (la machine) sont les mots clés qui ont ponctué le discours de la présidente de l'Instance. Avec une note plutôt déterminée d'aller de l'avant dans ce processus, Sihme Ben Sedrine affirme : « Le printemps de la Tunisie est là et il perdurera grâce à l'activation des recommandations de l'IVD ». De son côté, le président de l'Inlucc, Chawki Tabib, a mis en garde contre la machine de corruption qui puise aujourd'hui sa force dans un terreau législatif et réglementaire. Il a affirmé que la corruption était à l'origine des mouvements sociaux, tout en mettant en exergue sa menace à la transition démocratique en Tunisie. Les mêmes pratiques mafieuses persistent dans les diverses institutions de l'Etat. Eradiquer la corruption est un impératif, soutient-il. Un bilan détaillé avec des statistiques et des recensements des divers dossiers déposés à l'IVD ont fait l'objet d'une présentation en début d'après-midi. Il est à noter que la conférence de clôture des travaux de l'IVD se déroule sur deux jours. Aujourd'hui, les travaux seront consacrés au programme d'indemnisation des victimes.