L'Association des femmes démocrates vient d'éditer un petit livre riche en révélations sur les grandes batailles de cette ONG, engagée pour l'égalité entre les femmes et les hommes et pour les valeurs de la démocratie et de la liberté. C'est un livre de moins de cent pages qui vient d'être publié en ce mois de janvier, celui de toutes les luttes. Rédigé par un collectif de militantes de l'Association tunisienne des femmes démocrates (Atfd), «L'Atfd au cœur des luttes pour l'égalité et la démocratie » rappelle les grandes victoires, les larges défis et parfois les petits échecs de cette association créée en août 1989, fille du mouvement féministe autonome des années 70. S'il révèle beaucoup de vérités mal connues sur cette ONG historique, l'ouvrage vient répondre également à des campagnes de dénigrement subies par l'Atfd à la suite de la Révolution au moment du retour sur la scène politique du mouvement Ennahdha. «Laisser des traces, tirer les leçons d'une expérience dans un contexte particulier, c'est aussi un engagement à ne pas perdre de vue la voie tracée, celle qui doit conduire à la justice, à l'égalité et à la démocratie », lit-on en introduction de l'ouvrage. Un activisme politique qui remonte à 2008 Le livre revient sur l'implication de l'Atfd dans le soutien des militants et militantes du Bassin minier en 2008, des événements considérés comme la grande répétition de la révolution de 2011. Puis il consacre une seconde partie à la participation de l'Association à la transition politique, à travers notamment sa représentativité à l'Instance Ben Achour, et au processus électoral. Le dernier chapitre concerne la constitutionnalité des droits des femmes. «Nous voulions sortir de l'ombre toutes ces femmes dans les régions, qui ont subi répression et violences policières, des militantes souvent oubliées, tel Jomaâ Hajji ou Leïla Khaled du Bassin minier », soutient Hedia Jrad, ancienne présidente de l'Atfd, le 11 janvier au moment de la présentation de l'ouvrage à Tunis. Répandre la culture de l'égalité et de la démocratie Si on sait que les femmes ont contribué à la radicalisation du mouvement de protestation de 2008, on connaît beaucoup moins, en ces temps de blackout médiatique et de censure, le rôle joué par l'Atfd pour briser l'isolement du bassin minier en créant notamment le Comité national pour la solidarité avec la population du bassin minier. Plaidoyer auprès de la société civile et mise en place d'un pôle de défense des militantes à travers la présence des avocates de l'Atfd aux procès de Gafsa sont quelques-unes des actions de l'Association à ce moment-là. La révolution tunisienne est une occasion pour l'Association de déployer une série de mécanismes pour jeter la lumière sur ce qui s'est passé entre le 17 décembre et le 14 janvier, dont la Commission enquête et vérité menée entre autres dans les régions pour exiger la reddition des comptes et accompagner juridiquement les victimes. L'Atfd recueille également les témoignages des victimes dans un tribunal fictif. Lors de la période post-révolution, la bataille en premier lieu fut celle de la parité dans la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique. Les femmes démocrates se sont ensuite engagées sur le terrain pour permettre une participation effective des femmes au processus électoral. Pour l'Atfd, et comme le décrit très bien l'ouvrage, la constitutionnalisation des droits des femmes a représenté une expérience riche en matière d'apprentissage de négociation, de lobbying et d'échange. «Mais les batailles qui nous attendent ne sont pas seulement à envisager dans le domaine juridique et politique. Face à la régression sociale et culturelle, il est important de répandre la culture de l'égalité et de la démocratie, se mobiliser contre les tabous concernant le corps des femmes pour leur liberté sexuelle et contre les clichés, les stéréotypes, les messages haineux diffusés par certains médias…», concluent les auteurs de l'ouvrage.