Lundi matin. C'était hier. Ils avalaient quatre par quatre les marches du vieil immeuble de La Presse. Ils étaient dix, vingt, trente, non, ils étaient beaucoup plus nombreux. D'habitude, seule une poignée de journalistes sont là. Mais aujourd'hui, c'est spécial. Journalistes, techniciens, agents de l'administration, syndicalistes et même d'anciennes belles plumes à la retraite. Tous étaient là, de la manière la plus spontanée, la plus naturelle et la plus informelle comme attirés par l'aimant du fameux quatrième étage, le siège historique du journal tunisien, le plus vieux, La Presse de Tunisie. Beaucoup ont pris la parole. Ils parlaient tous de liberté et surtout, surtout, c'est le mot d'ordre : de demain. Demain, le mot est lâché. Tiens ! Demain, il faut bien que quelqu'un fasse le journal de demain. Mais c'est vrai que ceux qui ont fait le journal d'hier ne sont pas là pour faire le journal de demain. Et de toutes façons, le journal de demain ne sera plus le journal d'hier. Qui veut donc faire le journal de demain ? Des mains sont levées. Le comité provisoire de rédaction qui fera le journal de demain s'est formé. Ils sont déjà au boulot. Au départ, ils ne savaient pas de quoi ce journal sera fait. Mais ils savaient au moins de quoi il ne sera pas fait : ni langue de bois, ni censure, ni brosse à reluire, ni rien de tout cela. Il sera fait pour plaire au lecteur et non point aux supérieurs. Il sera fait pour être lu, pas pour être élu. Nous nous sommes donc réparti les tâches. Nous sommes sortis dans la rue. Nos avons sorti nos carnets d'adresses oubliés. Nous nous sommes rués sur nos téléphones. Voilà, le journal est prêt. Il y aura donc dans La Presse de demain de l'information précise, car l'information c'est sacré. Et du commentaire libre, car, il n' y a pas d'opinion sans liberté. De la photo. De la vérité et de la liberté. La Presse de demain, vous la lirez tous les jours.