JOHANNESBURG (Reuters) — A moins de cent jours de la Coupe du monde de football en Afrique du Sud, des manifestants ont dressé des barricades hier à travers les rues de Soweto, près de Johannesburg, pour réclamer des logements et de meilleures conditions de vie. La grogne de la population des bidonvilles sud-africains s'est traduite ces derniers mois par des manifestations parfois violentes, alors qu'un pays d'Afrique se prépare à accueillir pour la première fois un rendez-vous footballistique de cette importance. Un millier de personnes réclamant des logements se sont rassemblées hier à Soweto non loin du stade où doivent avoir lieu en juin le match d'ouverture et la finale de la Coupe du monde. «Des policiers se sont rendus sur place, ont parlé à la foule qui a accepté de se disperser. Nous gardons un oeil sur la situation», a précisé une porte-parole de la police, Katlego Mogale. La semaine dernière, un policier a été tué par balle lors de violents incidents dans plusieurs «townships» de Johannesburg. Des dizaines de personnes ont été arrêtées. Ce mouvement de protestation s'est étendu et a atteint cette semaine la capitale, Pretoria, où les manifestants ont clairement menacé de perturber le déroulement de la Coupe du monde en juin. «Marre de vivre comme cela» Pour Nthamaga Kgafela, chercheur au South African Institute for Race Relations, ce regain de tension coïncide avec l'élection l'an dernier à la présidence de Jacob Zuma, le «candidat des pauvres», qui a rempli d'espoir les classes les plus défavorisées du pays. «Les gens se disent qu'il y a maintenant quelqu'un pour les entendre», a-t-il dit. Il s'agit apparemment de faire pression sur le Congrès national africain (ANC), le parti au pouvoir, avant les élections locales de 2011. «Il n'y a pas de force politique spécifique derrière ces manifestations, ce sont simplement des gens qui en ont marre de vivre dans de telles conditions», explique le politologue Nel Marais, du cabinet de consultants Executive Research Associates. «Si la situation ne se calme pas, les élections de l'an prochain pourraient se transformer en cauchemar, tant du point de vue de la sécurité que du point de vue politique», ajoute-t-il. Le ministre sud-africain de la Police, Nathi Mthethwa, a assuré fin décembre que son pays était prêt à faire face à toutes les menaces, y compris celles d'attaques chimiques et nucléaires, pendant la Coupe du monde. La sécurité est un des principaux points d'interrogation qui pèsent sur la tenue du Mondial dans un pays qui a un des taux de criminalité les plus élevés du monde hors zones de guerre. Bhaki Cele, préfet de police chargé d'une mission spéciale par le Président Zuma à l'occasion de la Coupe, a fait savoir que des tribunaux spéciaux appliqueraient une politique de «tolérance zéro». Après dix ans de croissance économique, l'Afrique du Sud est confrontée à la récession, la première vécue par le pays depuis 1992.