Le chef du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero a donné hier une conférence de presse à la résidence de l'ambassade d'Espagne à Gammarth. Il avait auparavant, et à l'occasion de sa visite en Tunisie qui avait débuté dans la matinée, rencontré le président de la République par intérim ainsi que le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères. M. Zapatero a expliqué que sa visite avait pour but de souligner le soutien de son pays au processus de transition démocratique en Tunisie. Dans une salle improvisée où étaient présents également des membres du gouvernement qui l'accompagnaient durant son voyage ainsi que des journalistes espagnols, il a déclaré : «Nous sommes venus écouter, aider et construire avec vous» et a insisté sur le caractère historique de ce qui s'est passé en Tunisie, aussi bien au niveau du monde arabe que du monde entier. S'il pense que le vent démocratique va s'étendre à l'Algérie et au Maroc ? A cette question, le chef du gouvernement espagnol répond que l'extension est un fait, que le rôle de l'Espagne et de l'Europe est de «soutenir et stimuler» chaque fois que la société promet des changements. Il a cependant ajouté que «personne ne peut ni ne doit interpréter notre attitude comme une volonté d'ingérence». S'agissant des aides concrètes que l'Espagne pourrait apporter à la Tunisie en ce contexte délicat, M. Zapatero a évoqué «différents programmes d'aides» en vue de faciliter le processus de reprise économique, et en particulier l'engagement de l'Espagne à hauteur de 300 millions d'euros sur 3 ans par le biais de la Banque européenne d'investissement. Il s'agit aussi de mobiliser des entreprises transnationales déjà présentes dans la région afin qu'elles renforcent leur engagement dans notre pays. Le Premier ministre espagnol a signalé à ce propos qu'il avait manifesté aux autorités tunisiennes l'importance qu'il y a à parvenir à un accord entre l'Etat, les syndicats et les entreprises afin de créer un climat de stabilité. S'agissant de l'avenir de l'Union pour la Méditerranée, M. Zapatero a fait remarquer que le regard de l'Espagne a toujours mis l'accent sur le sud, et que les changements qui s'opèrent actuellement dans les pays arabes vont renforcer l'Union pour la Méditerranée. Il a parlé d'une pertinence de l'Europe lorsqu'elle se tourne vers les sociétés qui ont une soif de liberté et de changements sociaux : «L'Europe est plus l'Europe quand elle se tourne vers ces aspirations». Quoi qu'il en soit, «il s'agit pour l'Europe d'être à la hauteur des circonstances... Ce qui a commencé en Tunisie peut changer la carte des forces dans le monde !» A la question des écueils qui guettent le processus de transition démocratique en Tunisie, le chef du gouvernement espagnol a affirmé qu'il existe des priorités spécifiques à chaque pays en pareille situation et que, sans doute, la relation entre religion et Etat serait ici une question fondamentale. Il a ajouté que la nouvelle Constitution serait rédigée par les Tunisiens mais que, de son point de vue, le fait de maintenir la religion dans la sphère du privé est un gage de durabilité pour toute démocratie. En outre, l'élimination de toute discrimination entre homme et femme au sein de la société équivaut à une démocratie plus forte. M. Zapatero a évoqué enfin le code électoral en insistant sur la nécessité qu'il recueille le plus large consensus, considérant par ailleurs que la question de savoir si le régime serait plutôt présidentiel ou plutôt parlementaire ne touche pas à la solidité du système démocratique. Evoquant l'expérience espagnole après la mort de Franco, il a déclaré que «quelque chose a été fondamental dans notre pays: le consensus sur le fond pour se tourner vers l'avenir».